Essai Audi A8 55 TFSI: le laboratoire

L’A8 est le laboratoire des innovations qui équiperont les futurs modèles d’Audi. 

Le marché suisse est relativement peu friand de grandes berlines du segment F, et les ventes sont dominées par la Mercedes Classe S pour les limousines et la Porsche Panamera pour les berlines coupé, devant la série 7 et une Audi A8 . Pourquoi se pencher sur le cas de l’A8 ? Pour une triple bonne raison: l’A8 55 TFSI intègre les toutes dernières innovations de la marque en matière d’interface d’infotainment, de conduite autonome et de motorisation hybride légère. Il n’en fallait pas plus pour me convaincre de rouler deux semaines en A8.

En version courte, la nouvelle A8 – génération D5 – mesure 5.17m, soit 13 cm de moins que la version à empattement long et ses 5302 mm. Des dimensions imposantes en termes absolu, mais la vivacité et manoeuvrabilité surprennent et mettent immédiatement en confiance. Grâce aux roues arrière directrices, le diamètre de braquage est réduit de 1 mètre à 11.4m, soit 30 cm de moins que la RS4 Avant dont j’achevais incidemment l’essai. Appliquant l’approche désormais classique: contre-braquage jusqu’à 5 degrés à basse vitesse, braquage parallèle aux roues avant pour stabiliser l’auto dans les prises d’appui à plus haute vitesse. Le système est cher (CHF 2’540, lié à la direction dynamique) mais semble indispensable.

Nous sommes en compagnie d’une A8 55 TFSI, la motorisation la plus puissante disponible jusqu’ici. Il ne s’agit pourtant que du V6 3.0 TFSI à simple turbo commun – entre autres – à la S4. Il développe 500 Nm entre 1370 et 4500 t/min, alors que sa puissance culmine à 340 ch entre 5000 et 6400 t/min. Il intègre un démarreur/alternateur à courroie connecté à une petite batterie Lithium Ion de 10Ah fonctionnant sous une tension de 48 Volts. L’ensemble permet de récupérer de l’énergie cinétique en décélération, et de la restituer lorsque les conditions s’y prêtent.

Audi utilise ce système hybride léger dans deux cas de figure. Le premier est une application du système stop-start jusqu’à 22 km/h. A l’approche d’un feu rouge, le moteur s’éteint bien avant l’arrêt, les périphériques de la voiture restant alimentés par le truchement de l’énergie stockée dans la batterie. Le second est une extension du premier: en descente, lorsque le pied droit est levé de la pédale des gaz, l’A8 peut éteindre son V6 et rouler librement sur sa lancée, sur une durée qui peut atteindre jusqu’à 40 secondes (selon le niveau de charge). Le moteur se remet ensuite en marche, soit au ralenti si il s’agit simplement d’alimenter les circuits électriques, soit en prise si il faut maintenir la vitesse ou freiner.

Elégant, imperceptible, absolument pas intrusif, l’intégration de ce système est une réussite. Ce n’est que par son action que je peux expliquer la consommation mesurée sur les presque 1400 km de cet essai parcourus à une moyenne horaire de 66 km/h: 9.15 L/100km pour 8.8 L/100km affichés. Pour une berline essence de ce gabarit et de ce poids, le résultat est remarquable. Cette approche d’hybridisation légère tient ses promesses.

Le V6 turbo est par contre nettement moins fringuant que dans une S4. Les prestations sont honnêtes sur le papier (0-100 km/h en 5.6s ne paraît pas indigent) mais l’ensemble n’est réellement à son aise qu’en conduite coulée et les dépassements en montagne, sans être laborieux, donnent la pleine mesure de l’effet des 2114 kg sur les reprises. La note d’échappement ronde a naturellement disparu. Le V6 turbo est inaudible la plupart du temps, ce qui est cohérent avec la vocation de l’A8, mais les harmoniques que l’on distingue à pleine charge n’ont rien de particulièrement flatteur.

La logique du groupe VW est d’ailleurs un peu difficile à comprendre. Le V6 2.9L biturbo a été choisi sur la Panamera E-Hybrid pour l’efficience de son B-Zyklus, son couple à bas régime et le temps de réponse moindre de ses deux petits turbocompresseurs, mais l’A8 55 TFSI hérite, elle, du 3.0L à simple turbo. Ce choix est singulier alors que le positionnement et la logique de gestion de cette motorisation mild-hybrid est clairement orienté vers l’efficience. Il reste un possible argument de coût, discutable dans la mesure où l’A8 55 TFSI est – pour l’instant – la motorisation de pointe.

Le temps de réponse du moteur dans les phases de démarrage ou d’évolution à basse vitesse est parfois gênant, rappelant en cela le comportement d’un turbodiesel. Le retard dans la réponse initiale incite à surcompenser du pied droit, le couple finit par débouler brutalement, au détriment du confort, surtout pour les passagers. La gestion de la boîte automatique à 8 rapports n’est pas non plus exempte de reproches. Elle se fait oublier la plupart du temps, mais ses petites maladresses occasionnelles détonnent dans une auto qui cultive l’excellence et le raffinement.

Intérieur: le triptyque

Et ce nouvel intérieur ? L’A8 a inauguré un changement de paradigme. La molette MMI et ses couronnes de boutons multifonctions a été remplacée par une interface entièrement tactile. L’écran MMI principal réintègre la planche de bord et devient tactile. Il mesure 10.1” en diagonale avec une résolution de 1,540 x 720 pixels. L’accès aux menus principaux se fait par une barre d’icônes groupées sur le bord gauche. Il est assisté par un second écran de 8.6” (1280 x 660 pixels) qui assure deux fonctions. La première regroupe les commandes de climatisation et de réglage des sièges. Lorsqu’une adresse doit être rentrée dans la navigation ou un interlocuteur choisi dans le répertoire téléphonique, l’écran inférieur se transforme en large tablette sur laquelle un mot complet peut être écrit, évitant l’entrée lettre par lettre des générations précédentes. Le triptyque est complété par le Virtual Cockpit de 12.3” de diagonale et 1,920 x 720 pixels de résolution, avec les vues familières qu’il propose.

Le positif tout d’abord. L’interface utilisateur est plutôt bonne, les graphismes et nouvelle visualisation de la carte de navigation plaisants. L’ensemble n’est pas d’une rapidité époustouflante dans ses réactions, mais reste fonctionnelle. La quittance haptique de certaines opérations ne m’est pas apparue d’une utilité primordiale dans la mesure où le système ne peut de toute manière pas s’utiliser à l’aveugle et force le détournement du regard. Certains menus de configuration (tonalité, assistance) imposent un défilement vertical un peu fastidieux et distrayant.

Sans surprise, les traces de sébum viennent rapidement consteller les surfaces des écrans et des nettoyages fréquents sont nécessaires pour maintenir ces pièces maîtresses dans un état présentable. Rien de fondamentalement différent d’une tablette ou d’un smartphone cependant. Plus fâcheux, la planche de bord est impérativement recouverte d’une large surface laquée en noir. Toute considération esthétique mise à part, les réflections du soleil sont aveuglantes sur une large plage d’angles incidents, et empirent lorsque les rayons tapent sur le bas du troisième écran et ses touches couleur aluminium.

 

Dans l’ensemble, les fonctions offertes maintiennent l’interface multimédia d’Audi à un haut niveau et la réintégration de l’écran central sera saluée par celles et ceux qui ne goûtaient pas les écrans juchés sur l’arête de la planche de bord. La division de l’interface en deux sous-écrans de 10.1” et 8.6” est plus gracieuse que les grosses dalles utilisées chez Tesla par exemple, mais cette nouvelle interface MMI n’est pas une révolution: c’est un compromis. Sans surprise, la qualité de réalisation est aux standards Audi. Choix des matériaux, assemblages, l’exécution est à la hauteur de la réputation de la marque. Les buses de ventilation escamotables ajoutent une touche aussi théâtrale que superflue.

 

L’assistant de vision nocturne (CHF 2’930) peut passer pour un gadget, mais paraît capable de détecter un piéton dans l’obscurité et d’en avertir le conducteur. Le cas est survenu une fois pendant l’essai, et le système surveille la chaussée même si l’écran de visualisation n’est pas activé dans le virtual cockpit.

L’A8 a été présentée comme pré-équipée d’une armada de capteurs capables – dans le futur – de délivrer des fonctions de conduite autonome de niveau 3, mais limitées dans leur application à un assistant de bouchon actif jusqu’à 60 km/h. Le résultat ne m’a pas paru convaincant. La seule évolution positive notable par rapport à l’assistant de bouchon d’une A4 (RS4 en l’occurrence) est l’aptitude à redémarrer depuis l’arrêt après des pauses légèrement prolongées. Les louvoiements du guidage de ligne à basse vitesse ne m’ont par contre donné qu’une confiance très limitée dans ce système qui se révèle stressant à l’usage.

Notre exemplaire d’essai est équipé des sièges contour individuels qui, comme chez BMW, offrent un réglage de l’inclinaison du dossier indépendant entre le dos et les épaules, avec des coussins de dossier et de placet réglables. Ajoutez la fonction optionnelle de massage et ventilation et vous flirteriez avec la perfection si la plage de réglage permettait d’augmenter encore un peu plus le maintien latéral.

Cette A8 offre un confort de très haut niveau, notamment silence de fonctionnement remarquable (options vitrage acoustique). Sur longue distance, ces quelques décibels gagnés sur une berline moins bien isolée se traduisent par une fatigue nettement moindre. L’amortissement pneumatique est réglable et j’ai la plupart du temps opté pour la position confort, très bien tarée pour un usage autoroutier. Le mode dynamique raffermit discrètement l’amortissement, mais le roulis demeure perceptible en conduite rapide, tout comme la plongée lors de freinages appuyés.

Ainsi réglée, l’A8 est capable d’enquiller des enchaînements de courbes à un rythme qui découragera les motards les plus entreprenants, mais l’exercice n’en devient pas exaltant pour autant. La rigidité de la caisse est bonne, mais pas irréprochable sur les grosses cassures d’autoroute ou quelques tremblements peuvent être décelés dans le plancher. Un empattement de presque trois mètres et les préoccupations d’allègement ont sans doute une contrepartie en termes de rigidité de flexion et de torsion.

La version “courte” de l’A8 n’est pas disponible avec des sièges arrière complètement individualisés, mais le pack 2+1 offre (pour la bagatelle de CHF 6’460) la majorité des fonctions attendues d’une limousine, avec un large accoudoir, la possibilité de commander le siège avant droit pour se ménager plus de place aux jambes, et des sièges arrière réglables en inclinaison. La place offerte est suffisante pour des adultes, mais n’a rien de royal. L’A8L se justifie au catalogue pour les 13cm supplémentaires offerts aux passagers.

 

La nouvelle A8 répond aux attentes qu’on peut avoir d’une grande berline du segment F et procure le confort et la quiétude de rigueur dans la catégorie. La motorisation 55 TFSI ne suscitera pas de convoitises concupiscentes, mais son hybridisation légère est aussi réussie qu’efficace, tout comme son système à quatre roues directrices. Le nouveau système MMI à trois écrans a ses attraits, mais l’océan de surfaces noires brillantes qu’il impose ne sera pas du goût de tous, et pose des problèmes d’éblouissement réels. La perspective de migration de ces dispositifs et équipements dans le reste de la gamme donne des raisons sélectives mais pas inconditionnelles de se réjouir des futurs modèles d’Audi, à moins que certaines évolutions et améliorations soient déjà en cours.

Prix et configuration du modèle testé

Audi A8 55 TFSI CHF 114’100 € 97’900
Pack sièges arrière individuels 2+1 CHF 6’460 € 4’260
Jantes alu à 20 rayons CHF 4’040 € 3’540
Pack assistance tour CHF 3’390 € 2570
Garantie +2 Jahre / 100’000 km CHF 3’070 € 2’440
Assistant de vision nocturne CHF 2’930 € 2’570
Direction dynamique intégrale CHF 2’540 € 2’230
Toit panoramique CHF 2’100 € 1’840
Sièges massants & ventilés avant CHF 2’080 € 1’830
Sièges contour individuels confort CHF 2’030 € 1’780
Pack Alcantara CHF 2’020 € 1’770
Chauffage/ventilation stationnaires CHF 2’000 € 1’750
Pack Assistance Ville CHF 1’830
Head-Up Display CHF 1’810 € 1’590
Bang & Olufsen Premium Sound CHF 1’560 € 1’370
Vitrage acoustique/climatique CHF 1’560 € 1’370
Peinture Terra Grau Métalique CHF 1’440 € 0
Pack cuir CHF 1’290 € 1’130
Cuir valcona CHF 790 € 690
Air quality pack CHF 720 € 630
Pack chrome extérieur CHF 700 € 670
Rear Seat Remote CHF 640 € 560
Touches de commande façon verre en noir avec réponse haptique y compris style aluminium étendu CHF 630 € 550
Essuie-glace adaptatif avec buses de lavage intégrées CHF 590
Volant cuir à branches doubles chauffant CHF 540 € 470
Télécommande de garage CHF 340 € 300
Lampes de lectures LED matrix CHF 330 € 290
Applications décoratives en aluminium brossé mat foncé CHF 250 € 220
Prise 230V CHF 230 € 190
Pack de rangement CHF 210
Audi music interface arrière CHF 200 € 170
Lecteur DVD CHF 160 € 140
Reconnaissance signalisation CHF 0 € 230
Climatisation à 4 zones CHF 0 € 1’420
Réservoir 82L CHF 0
Phares LED Matrix CHF 0 € 2’180
Rideaux pare-soleil pour lunette et vitres AR CHF 0 € 1’130
Fermeture assistée des portes CHF 0 € 780
Coffre assisté électriquement CHF 0 € 670
Premium-Bonus CHF -9’120  –
Total CHF  153’977 € 140’100

 

Face à la concurrence – caractéristiques techniques

Audi A8 55 TFSI BMW 730d xDrive Mercedes S350d 4Matic
Moteur V6 turbo 2995 cm3 L6 turbodiesel 2993 cm3 L6 turbodiesel 2925 cm3
Puissance (ch / t/min) 340 / 5000-6400 265 / 4000 286 / 4600
Couple (Nm / tr/min) 500 / 1370-4500 620 / 2000-2500 600 / 1200
Transmission Quattro xDrive 4Matic
Boite à vitesses Tiptronic 8 Steptronic 8 9G-TRONIC
RPP (kg/ch) 6.22 (6.87) (6.94)
Poids DIN (constr.) 2114 (1920)
55.1% AV 44.9% AR
(1825) (1985)
0-100 km/h (sec.) 5.6 5.8 5.8
Vitesse max. (km/h) 250 250 250
Conso. Mixte (constr.) 9.15 (7.7) (4.8) (5.7)
Emissions CO2 (g/km) 175 127 150
Réservoir (l) 72-82 78 70
Longueur (mm) 5172 5098 5125
Largeur (mm) 1945-2130 1902 1899-2130
Hauteur (mm) 1473 1478 1496
Empattement (mm) 2998 3070 3035
Coffre (L) 505 515 510
Pneumatiques 235/55 R18 245/50 R18 245/55 R17
Prix de base (CHF) 114’100 113’300 115’000
Prix de base (EUR) 97’900 93’250 96’649

Nos remerciements à Audi Suisse pour le prêt de cette A8.

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