Essai Porsche Boxster Spyder
En résumé, nous sommes donc en présence d’un subtil cocktail: ensemble moteur-boîte-différentiel du Cayman GT4 avec 50 Nm et 45ch en bonus par rapport au Boxster GTS, châssis du Boxster abaissé de 20mm avec allègement de 30kg grâce à la capote mécanique. Un cocktail qui me convainc dès les premiers tours de roue. Nous sommes à Courmayeur, le soleil est mordant entre quelques cumulus inoffensifs. La montée vers le tunnel du Mt Blanc n’a rien d’excitant, la traversée des 11.6km de l’ouvrage dans la plage de vitesse et distance prescrits encore moins. Dès la sortie du côté Chamonix, je m’empresse de piquer 3 semi-remorques pour avoir le champ libre pour les 3 épingles qui suivent.Talon-pointe pour rentrer la deuxième, gros appui et on ouvre en grand dès la “corde” pour resortir comme une balle dans la glorieuse sonorité du flat 6. La commande de boîte est parfaite, subjectivement un peu plus légère hors de l’axe central que celle du Cayman GT4. Je désactive rapidement l’échappement sport, beaucoup trop vulgaire à mes oreilles dans ses pétarades systématiques. Je me contente également du mode Sport pour éviter l’égalisation de régime activée par le mode Sport Plus. Comme sur le Cayman GT4, le système est bien réalisé mais éminemment inutile si l’on se charge soi-même du double débrayage.
Pour le reste, l’ensemble est redoutablement convaincant dès ces premiers ébats et le col des Montets me tend les bras. La conduite en plein air magnifie les sensations: la communion avec les éléments, le timbre chatoyant du flat-six résonnant contre les montagnes. Elle est d’autant plus attractive qu’elle n’implique ici aucun compromis: La rigidité de l’ensemble est irréprochable, l’agilité démoniaque grâce au poids contenu et au centre de gravité abaissé par le châssis -20mm. L’amortissement est certes ferme, mais sur ces routes bien revêtues, le compromis entre rigueur et confort parait parfait. C’est surtout l’homogénéité de l’ensemble qui est enthousiasmante. Il n’y a aucun défaut marquant avec lequel composer, aucun compromis sur lequel transiger, juste l’harmonie du pilote, de la voiture et de la cadence dictée par les méandres de la D1506.
Une harmonie qu’une Audi A5 TDI Cabriolet récalcitrante vient sérieusement troubler. Les reprises du 3.8L sont charnues au-dessus de 3500 t/min, mais le manque de visibilité me force malgré tout à un dépassement au scalpel avec freinage en plein changement d’appui dans un pif paf entre roche et muret. Le Boxster Spyder réagit conformément à son architecture, prenant un angle de lacet léger mais perceptible. Bénin, mais symptomatique d’une auto réglée pour être efficace et vivante. Dans la descente sur Vallorcines puis la remontée sur le col de la Forclaz, la conduite de ce Spyder m’offre – comme les produits laitiers – un festival de sensations pures. Il n’a pas le côté pur et incisif à l’extrême du Cayman GT4, mais l’enveloppe de performances demeure très proche sur route, avec en prime les joies incomparables du plein air. A moins d’être pistard pratiquant ou d’être tombé en pamoison incurable pour l’esthétique aguicheuse du croco de course – le risque est réel – le Boxster Spyder aurait ma préférence. Les opportunités de jouir des plaisirs d’un spyder sont plus fréquentes, plus réalistes et moins risquées pour le permis de conduire que d’espérer exploiter le surcroît de potentiel et de rigueur du Cayman GT4 sur route ouverte.
A 150 km/h de croisière en descendant la plaine du Rhône par l’autoroute, vitres remontées le confort est tout-à-fait acceptable, les remous bien bloqués par la vitre faisant le pont entre les deux arceaux. Bien câlé dans le baquet, j’énumère les enseignements de cet essai. L’installation du 3.8L de la 991 Carrera S dans la caisse 981 est une réussite indéniable avec les définitions de châssis que Porsche a concocté. Plutôt que de paraître sur-motorisés, Cayman GT4 et Boxster Spyder sont des produits typés, moins polyvalents que leurs versions 3.4L, mais redoutablement homogènes et attractifs dans leur registre respectif.
Le plus gros défaut de ce Boxster Spyder reste de n’être plus disponible à la vente. Le quota de production d’environ 1800 exemplaires prévus entre 2015 et 2016 a trouvé preneur, et la série 981 tirera alors sa révérence pour être remplacée. L’excellente nouvelle est que le succès commercial du Boxster Spyder et du Cayman GT4 ont démontré l’appétit de la clientèle pour des versions plus musclées et rigoureuses des berlinettes à moteur central de Zuffenhausen. La mauvaise est qu’il va falloir être patient ou se rabattre sur le marché de l’occasion et des cotes de revente qui risquent d’être soutenues.