La nouvelle Lexus GS450h à l’essai.
Si Lexus et Toyota ont été parmi les premiers à se positionner sur le marché de l’hybride, de l’eau a coulé sous les ponts et la concurrence est venue réclamer sa part du gâteau. En particulier Infiniti, qui a frappé un grand coup avec sa M35h, qui surclassait une GS450h vieillissante. Lexus se devait de réagir pour garder son statut de pionnier. Et le moins qu’on puisse dire c’est qu’ils n’y sont pas allés avec le dos de la cuiller ! Entre une consommation annoncée à 6.2 L/100km et une puissance combinée de 345 ch, Lexus étale sa maîtrise de la technologie: la puissance d’une Audi S4 et la consommation d’une Renault Megane 1.6 dans un seul et même package. Enfin, tout du moins, c’est que la fiche technique laisse croire. Mais au delà des chiffres, le produit répond-il aux attentes ?
L’exemplaire qui nous concerne ici est la version F-Sport de la gamme. Celle-ci se caractérise par un kit carrosserie exacerbant les traits stylistiques du modèle de base : bouclier plus dynamique à l’avant, des jantes spécifiques de 19 pouces sur les cotés (265/35 à l’arrière, excusez du peu!), et un pare-chocs arrière redessiné, avec un mini diffuseur. Enfin, un petit écusson est apposé sur les flans pour faire bonne mesure. La poupe est très réussie, même si décidément, je n’aime toujours pas les baguettes chromées. Pour rester politiquement correcte, la GS masque ses échappements sous sa jupe, coquetterie que je trouve discutable également. A l’avant, la calandre se veut en rupture avec ce que l’on l’habitude de croiser. Une façon cohérente d’illustrer son coté avant-gardiste, aussi bien technologiquement qu’écologiquement, mais qui manque d’élégance et d’intemporalité.
Mais en laissant au garage les jugements de valeur, il faut reconnaitre que la ligne est équilibrée et dynamique, que le nouveau style de la calandre Lexus est audacieux et réussi dans l’exercice, et que le kit carrosserie «F-Sport» est globalement valorisant par rapport au modèle de base. Rien que pour les jantes et le diffuseur arrière, que j’imagine malgré tout plus esthétique que fonctionnel, la F sport apporte indiscutablement de la valeur ajoutée au modèle de base. Vous me direz: “encore heureux, vu le prix demandé !” En l’état notre exemplaire est facturé 111’150 CHF prix catalogue, ce qui pour une fois place une japonaise au niveau d’une allemande, voire peut être même un peu plus haut qu’une BMW ActiveHybrid 5 équipée de manière similaire.
Une fois à bord, j’ai la surprise d’avoir un message en allemand qui m’accueilles sur le combiné d’instrument, alors que l’écran central est, lui, en français. Un bug ? Non, comme le confirme le manuel de … 900 pages (!) Il y a bien une option de choix de langue dans le menu de l’ordinateur central, mais celui-ci ne concerne que l’écran central. Pour changer la langue du combiné d’instrument, il faut passer par un autre menu, via un bouton du volant… Moi qui pensait qu’on avait touché le fond avec la Citroën DS4 et sa profusion de boutons, je m’aperçois qu’on peut faire pire : il suffit de dédoubler les commandes. J’ai même trouvé un bouton pour désactiver l’éclairage intérieur en cas d’ouverture des portes. Sans doute très pratique pour les filatures discrètes, mais pourquoi ne pas regrouper tous ces paramétrages dans l’ordinateur de bord ?
C’est d’autant plus incompréhensible que visiblement un soin particulier a été porté à l’intérieur. La qualité Lexus est ici associée à des spécifications de haut vol sur le choix des matières, et l’habitacle est véritablement agréable au toucher. Que ce soit les plastiques, les boutons en aluminium ou le cuir recouvrant la planche de bord, tout témoigne ici d’un grand soin et fait honneur à la marque. Malgré des dimensions extérieures sommes toutes contenues pour la catégorie, la place reste suffisante à bord. Les plus grands apprécieraient peut-être un peu plus d’espaces aux jambes à l’arrière, mais cela reste anecdotique. En fait, je dirais plutôt que c’est l’ergonomie qui pêche, avec certains contrôles relativement éloignés du conducteur, et qui obligeront les petits gabarits comme moi à tendre le bras pour les atteindre. Si l’on met de coté la grille du levier de vitesse totalement anachronique, l’habitacle est résolument high-tech. A commencer par la console centrale qui, épurée comme un meuble design contemporain, héberge en son centre rien de moins que le plus grand écran multimédia disponible sur une voiture de série (hormis le Model S de Tesla, pas encore commercialisé en Europe). Fort de ses 12,3 pouces (31 cm), il permet d’avoir un écran partagé avec d’un coté une partie principale parfaitement lisible en toute circonstance (et bien protégé du soleil), et de l’autre les informations annexes et un accès rapide aux autres menus. Une option indispensable, dont l’agrément est renforcé par une molette à retour de force assez ludique.
Au premier démarrage, je suis surpris d’entendre le moteur thermique, alors qu’avec une batterie bien chargée, je pensais bénéficier de l’électrique. En effet, à froid, Lexus met la priorité sur la montée en température du moteur et des fluides. Même une tentative d’override manuel du système en forçant le mode EV se solde par un message d’erreur opiniâtre. Deuxième surprise, la climatisation. Je vous épargne les détails sur la technologie nanoe que Lexus a mis en place pour concurrencer le plasmatruc d’Infiniti puisque l’option n’est pas disponible sur la F-Sport. Ici c’est surtout la gestion intelligente qui retient l’attention. En cas de basse température, la voiture actionne automatiquement le chauffage des sièges, et module le débit de la ventilation en tenant compte de la température à bord, bien sûr, mais également de celle du moteur, pour permettre à celui-ci de chauffer plus vite et, partant, d’optimiser la consommation. Bien vu !
On ne le répétera sans doute jamais assez, mais la véritable révolution qu’apportent les véhicules hybrides n’est pas dans la réduction des émissions carbone, mais dans l’agrément qu’ils procurent. Quiconque a une fois gouté au silence et à la grâce d’un démarrage en hybride ne peut plus regarder son TDI de la même façon, aussi bon et moderne soit ce dernier. C’est simple, c’est aussi agréable qu’un V8 italien, bien que paradoxalement totalement à l’opposé du spectre auditif. Une autre façon d’apprécier l’automobile, tout en douceur et en finesse. Un contexte parfait pour redécouvrir ses classiques et profiter pleinement de l’excellent système Mark Levinson. Ne vous attendez pas à retrouver l’équivalent des systèmes high-end de la grande époque du constructeur audio (il faudrait presque doubler le prix de la voiture !), mais on est tout de même dans le haut de gamme de l’audio embarquée.
A l’occasion d’une virée en montagne, le système a montré ses limites. Dès que la route grimpe un peu, il devient illusoire de vouloir rouler en mode Eco. La puissance requise pour rouler à des allures décentes impose de facto d’utiliser le moteur thermique, et on use bien vite la capacité de stockage des batteries. Qu’à cela ne tienne, c’est le moment rêvé de tester le mode «Sport+»!
Changement d’ambiance. Une animation accompagne théâtralement le passe d’un mode à l’autre sur l’écran central, et le combiné d’instruments passe d’une ambiance bleutée à un rouge plus agressif. La loi de gestion de l’accélérateur se veut plus volontaire et rends la voiture beaucoup plus réactive, on a enfin l’impression d’avoir une voiture de 345 ch. Une belle ligne droite s’offrant à moi, je me dois de les compter. Je mets le pieds dedans, le moteur se cale à 5000 tr/m et… n’en bouge pas. Ca pousse pourtant, et pas qu’un peu, comme me le rappelle le compteur, mais dans un bruit monocorde peu compatible avec l’idée qu’on se fait d’une conduite inspirée. Mea culpa, j’aurais du lire la fiche technique jusqu’au bout : c’est un variateur qui sert de relai entre le moteur et les roues. En échange, on a une douceur de fonctionnement réellement impressionnante, et finalement très cohérente avec la conduite coulée qui sied à une berline de cette taille.
Il faudra donc apprécier ce mode pour ce qu’il est : le moyen d’avoir une voiture plus réactive, avec les réglages de suspension qui vont avec. Le confort reste privilégié, mais on n’a plus cette impression de matelas à eau qu’on pouvait avoir dans les virages. Les premières traces de neige révèle un ESP assez sensible qui se déclenche à la moindre amorce de patinage. Décidément, la F-Sport n’est pas si sport que ça. Nous avions dit la même chose à l’époque de la M35h, mais comparativement, l’Infiniti incite plus aux envolées lyriques, ne serait-ce que du fait de sa sonorité à l’échappement.
Par contre, on appréciera malgré tout le système à quatre roues directrices, moins spécialement pour le dynamisme qu’il apportent en conduite sportive, puisque la voiture n’y invite pas outre mesure, mais surtout pour l’agilité qu’il apporte, que ce soit pour prendre des croisements serrés ou en manoeuvre dans les parkings. Avant de s’habituer au système, on est surpris par le rayon de braquage vraiment faible de la voiture. Tentez un demi-tour sur route, et vous sentirez réellement l’arrière “glisser” légèrement de coté, pour accentuer le mouvement. Bluffant d’efficacité.
A la descente, je remets le mode Eco. Le compte-tour est remplacé par un indicateur de charge du système, un vrai plus en terme d’utilisation, car il permet véritablement d’optimiser sa façon de rouler pour coller à la philosophie “ecoDrive” de la voiture. Les 200 ch du moteur électrique autorisent de rouler en tout électrique jusqu’à 45 km/h, ce qui est suffisant pour rouler vraiment propre en ville, pour autant qu’il n’y ait pas de traffic. Car c’est là que le bât blesse. Pour rester en électrique, il faut vraiment être parcimonieux sur l’accélérateur et se satisfaire d’une allure de sénateur asthmatique. Idéal dans les zones 30 et les embouteillages, mais encore un peu juste dès lors que vous voulez vous insérer dans la circulation. Toutefois, on a là un système vraiment utilisable et cohérent, qui permet subjectivement d’exploiter l’électricité bien plus que sur l’Infiniti par exemple.
Bluffant également est le confort dispensé par cette voiture, que ce soit par les sièges au maintien et à l’assise irréprochables, par le filtrage remarquable des suspensions ou par l’isolation acoustique, dont la perception est renforcée par le silence de l’hybridation. Equipé d’un tel véhicule, les déplacements deviennent un véritable plaisir, un moment authentique de détente.
Pour ce qui est de l’autonomie en mode purement électrique, une question légitime, il est difficile d’établir un chiffre, étant donné la nature du système. L’électrique intervient ici en appoint du moteur thermique, chacun fonctionnant quand il a le plus de valeur ajoutée (thermique pour les accélérations, électrique pour les manoeuvres et les faux plats à vitesse modérée. Impossible par exemple de rouler électrique uniquement à plus de 45 km/h. Le moteur électrique prend également le relais automatiquement dès lors que la batterie descend en dessous de 20% de charge, le système privilégiant la durée de vie des batteries. Dans la pratique, il est donc impossible d’avancer une autonomie en électrique, tant les deux systèmes se complètent et se passent la main de façon quasi imperceptible et toujours pertinente.
Malgré le cycle Atkinson (James, pas Rowan), qui optimise la consommation énergétique au détriment de la puissance spécifique et le poids plus contenu qu’on ne l’aurait craint (1894 kg, dont 50.7% sur l’avant et 49.3% sur l’arrière, au lieu des 1910 kg annoncés), notre consommation s’est établie à 9.0L/100km (pour 8.1 L/100km indiqués par l’ordinateur de bord), bien au-dessus des chiffres annoncés. Comme toujours, cette valeur est à replacer dans un contexte d’essai, sur tout type de routes. Nous avons mesuré, suivant les type de trajets, des pics de consommation à 10.7 L/100 km, et un minima à 7.6 L/100km (autoroute uniquement). Cela dit, notre consommation moyenne sur l’essai s’est tout de même révélée inférieure de 15% à celle mesurée sur l’Infiniti, ce qui est une performance notable, étant donné que la consommation de cette dernière était déjà très correcte. Pour mettre ce chiffre en perspective, avec un turbo diesel, nous avons mesuré la Honda Accord 2.2 i-DTEC à 8.0 L/100km lors de notre essai.
Il est sans doute possible de faire mieux, ne serait-ce qu’en attendant l’été, mais si vous espérez atteindre les chiffres constructeurs, il faudra vous astreindre à une discipline monacale. Et vous mettre sous tranquillisants, pour vous accommoder des relances narcotiques que cela implique. Le chiffre reste néanmoins très bon dans l’absolu, au vu des dimensions de la voiture et en regard de la concurrence.
Mais la véritable cerise sur le gâteau, c’est indubitablement le coffre, point noir habituel des berlines hybrides. Un moteur électrique additionnel, ça prends forcément de la place dans une voiture. Et le jeu des 240 cellules de batteries NiMH qui l’accompagne, encore plus. Et fatalement, c’est le coffre qui en fait les frais. Pour l’occasion, les ingénieurs de Lexus ont réussi à réduire la taille de la batterie à 135L, ce qui a permis de préserver 465L pour le coffre. Voila qui est (enfin!) digne de la catégorie et peut soutenir la comparaison avec les modèles essence ou diesel, même si les sièges ne sont pas encore rabattables.
Malgré quelques défauts d’ergonomie et des promesses non tenues sur l’invitation à une conduite sportive, Lexus signe ici un joli coup en prenant un parti pris différent de celui d’Infiniti, qui mise sur le dynamisme, en se positionnant plus haut en gamme. Toutefois, au vu de la différence de prix, il n’est pas évident que le jeu en vaille la chandelle pour tout le monde. Si on considère un litre à 1.90 CHF, il faudra tout de même couvrir 65’000 km pour rentabiliser l’investissement supplémentaire demandé par Lexus par rapport à l’Infiniti. Mais la valeur ajoutée de la voiture n’est pas que dans son économie potentielle. Elle est aussi dans un confort d’utilisation objectivement plus poussé ici, et dans un système à la fois plus pointu et plus mature. La GS450h est une voiture qui distille une grande sérénité de conduite, une véritable atmosphère, bref une voiture à vivre.
Prix catalogue du modèle essayé dans sa configuration: 111’150 CHF.
Face à la concurrence
Lexus GS 450h F-Sport | Infiniti M35h | BMW ActiveHybrid 5 | Porsche Panamera S Hybrid | |
Moteur | V6, 3456 cm3 VVTi – Atkinson | V6, 3498 cm3 | 6L, 2979 cm turbo | V6 compresseur 2995 cm3 |
Puiss. moteur (ch/t) | 292 / 6000 | 306 / 6800 | 306 / 5800 | 333 / 5500-6500 |
Puiss. électr. (ch/t) | 200 / 5613–13000 | 68 / 1770-2000 | 55 | 47 – dès 1150 t/min |
Puiss. totale (ch/t) | 345 | 364 | 340 / 5800 | 380 / 5500 |
Couple moteur (Nm/t) | 352 / 4500 | 350 / 5000 | 400 / 1200-5000 | 440 / 3300-5250 |
Couple électr. (Nm/t) | 275 / 0–3840 | 270 / 1770 | 210 / 0 | 300 / 0-1150 |
Couple total (Nm/t) | 352 | N.C. | 450 / 1200-5000 | 580 / 1000 |
Transmission | Roues AR | Roues AR | Roues AR | Roues AR |
Boite à vitesses | CVT | Automatique 7 rapports | Automatique 8 rapports | Tiptronic S 8 rapports |
RPP (kg/ch) | 5.61 | (5.03) | (5.44) | 5.41 |
Poids DIN (constr.) | 1894 (1910) | (1830) | (1850) | 2058 (1980) |
0-100 km/h (sec.) | 5.9 | 5.5 | 5.9 | 6.0 |
Vitesse max. (km/h) | 250 | 250 | 250 | 270 |
Conso. Mixte (constr.) | 9.0 (6.2) | 10.7 (7.0) | (6.4) | 9.77 (7.1) |
Réservoir (l) | 66 | 70 | 67 | 80 |
Emissions CO2 (g/km) | 145 | 162 | 149 | 167 |
Longueur (mm) | 4850 | 4945 | 4899 | 4970 |
Largeur (mm) | 1840 | 2061 | 1860/2094 | 1931 |
Hauteur (mm) | 1455 | 1500 | 1464 | 1418 |
Empattement (mm) | 2850 | 2900 | 2968 | 2920 |
Coffre | 465 | 350 | 375 | 335 – 1153 |
Pneumatique AV | 245/40/18 | 245/50/18 | 225/55/17 | 245/50/18 |
Pneumatique AR | 245/40/18 | 245/50/18 | 225/55/17 | 275/45/18 |
Prix de base (CHF) | 88500* | 85’900 | 76’500 | 144’800 |
Prix de base (EUR) | 59’900 | 55’090 | 69’100 | 107’794 |
*Exécution F-Sport: 99’800 CHF
Nos remerciements à Lexus Suisse pour le prêt de cette GS450h. Photos: J-A Dayer.
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