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Essai Tesla Model S 90D

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Du sommet de la Bernina et ses lacs gelés, nous remettons le cap sur St Moritz, le col du Julier et l’A13 qui nous ramène sur Coire et le superchargeur de Maienfeld où nous nous arrêtons plus par curiosité journalistique que par nécessité absolue. Cinq des six places sont occupées par des autochtones et des voyageurs remontant vers Zürich. Un encas et 46 minutes plus tard, nous repartons vers le nord avec 148 km d’autonomie en plus. Notre prochain arrêt sera pour une station de charge d’un autre type, celle d’un centre commercial Coop dans la banlieue lucernoise. La recharge d’un véhicule électrique offre la possibilité de se parquer sur une large place bien éclairée proche de la porte d’entrée, mais l’accès n’est pas gratuit: un SMS et 7 CHF pour que la borne libère un courant de 24A sous 235V, soit 30x moins qu’un supercharger. Après 20 minutes d’emplettes, nous avons gagné 26 km. Dérisoire.

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Je ne tente même pas une recharge nocturne sur la prise de mon garage, 220V sous 8A ne sont suffisants que pour des hybrides légères, et opte plutôt d’aller manger une entrecôte en face du superchargeur de Beckenried. A notre sortie du restaurant, le propriétaire d’un Model S blanc est assis dans l’obscurité, refaisant le plein de sa voiture, soit par absence d’une solution de charge à son domicile, soit pour économiser sur sa facture d’électricité. Un plein de 90 kWh avec un rendement de 80% et un tarif nocturne de 17 centimes par kWh coûte pourtant moins de 20 CHF.

Sur le trajet qui me ramène de la région lucernoise à la romandie, je fais halte au superchargeur de Lully, près de Payerne, pour refaire le plein avant une semaine où je vais devoir composer sans l’infrastructure de Tesla. Seul à la station, j’accumule 231 km en 46 minutes. L’alternative la plus performante, faute de mieux, est le réseau EVite, dont certaines bornes supportent le standard ChaDeMo, pour lequel un adaptateur – gigantesque – est disponible. En deux visites, j’enregistre des taux de charge de 68 et 83 km par heure de charge respectivement, loin des 200 à 300 km par heure observés dans les stations Tesla.

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Sur les 1362 km de cet essai, nous aurons consommé au total 300.1 kWh, soit 220 Wh/km, avec un mélange de trajets autoroutiers, routiers et pendulaires, en plaine et en montagne, par des températures peu favorables. C’est une valeur remarquable comparée à toutes les autres électriques et hybrides rechargeables que nous avons testé jusqu’ici, avec le petit bémol qu’elle est invérifiable. Les ordinateurs de bord des voitures fonctionnant au carburant sont souvent optimistes par rapport aux quantités de carburant réellement ingérées, il n’y a pas de raison de faire une confiance aveugle à Tesla sur ce point.

Si l’on se base sur cette valeur et l’utilisation d’un chargeur personnel à domicile, notre Model S nous aurait coûté 3.7 CHF/100km en énergie, soit l’équivalent économique de 2 litres d’essence. En planifiant nos déplacements en fonction de l’infrastructure de charge disponible, nous avons roulé gratuitement. Cette situation ne durera naturellement pas si l’adoption des automobiles électriques continue, les états devront adapter leur fiscalité pour financer l’entretien des routes. Les adopteurs précoces qui acceptent les compromis inhérents à la lenteur des cycles de charge et à une infrastructure clairsemée bénéficient d’un avantage qui ne pourra pas être maintenu à plus large échelle.

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Tous ces points sont communs à toutes les électriques, et Tesla est pour l’instant le seul constructeur à offrir une infrastructure qui permet de rendre une mobilité individuelle électrique viable hors trajets pendulaires. Les compromis à consentir ne sont pas à minimiser. Passer une heure par week-end à bouquiner dans sa voiture dans un lieu pas forcément attractif n’est pas un progrès, c’est un sacrifice. Ni le fait qu’on est plus ou moins contraint d’aller en week-end où l’on peut plutôt que où l’on veut. Mais ce sont des compromis viables pour qui accepte de faire de sa voiture une sorte de hobby.

Le Model S lui-même est un produit robuste dans sa conception, dont le plus grand défaut objectif est l’habitabilité arrière. Ludique par ses accélérations, intéressant par ses innovations, l’offre est attractive, mais pas forcément à la portée de toutes les bourses. Je demeure convaincu que l’économie de quelques milliers de francs pour un Model S 60 ou 75 est une erreur dans la mesure où il fait d’une berline de 5 mètres une automobile réduite à un usage pendulaire. Hors conditions vraiment spécifiques, l’achat d’une compacte électrique (BMW i3, Nissan Leaf, toutes deux à l’autonomie récemment revue à la hausse) semble faire plus de sens.

Au terme de cet essai, je reste convaincu qu’une adoption plus large des voitures de Tesla en particulier, et des électriques en général restera tributaire d’avancées notables en matière de temps de charge. Pour illustrer, nos stations d’essence ubiquitaires seraient complètement engorgées si plus de 5 minutes étaient nécessaire à un plein de carburant. D’ici là, Tesla a encore trois à quatre années d’une hégémonie méritée avant que l’offensive des grands constructeurs allemands se traduise par une offre produit étoffée.

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