Une Megane RS bien plus radicale en version Trophy.
Mars 2018, Jerez de la Frontera dans la province de Cadix, en Espagne. C’est à cette occasion que nous avions pu découvrir la nouvelle Megane RS dans ses deux versions d’alors, “Sport” et “Cup”. Si ces versions n’avaient pas convaincues, principalement par leur manque de radicalité, Renault Sport avait fait le choix étrange de déjà annoncer au salon de Francfort la version Trophy, histoire de calmer un peu les esprits (et de cannibaliser les ventes ?).
Confidences d’ingénieurs de la marque, les changements mécaniques devaient porter sur l’adoption d’un turbocompresseur et d’un échappement différent afin de rendre (enfin) cette Megane RS aussi radicale qu’espéré. Est-ce que le contrat est rempli ? Voyons sur les plus de 800 kms à son volant.
En ces temps de course à la puissance, rappelons que Renault Sport atteint, pour la première fois de son histoire, la barre symbolique des 300 ch à 6’000 t/min (+20 ch par rapport à la version de base) avec les modifications apportées au dénommé M5Pt commun à plusieurs modèles de la marque, ou de ses dérivés.
Le turbocompresseur profite de la technologie issue de la formule 1, soit une turbine tournant à près de 200’000 t/min sur un roulement à billes en céramique. L’utilisation de ce matériau se traduit par d’avantage de légèreté, mais également de dureté, et offrant une surface plus lisse permettant de diviser par trois la friction par rapport à la technologie habituellement utilisée du film d’huile, réduisant théoriquement le temps de réponse.
La double offre de boite à vitesse est maintenue mais amène une divergence de couple maximum développé: 400 Nm à 3’200 t/min en manuelle à six rapports (+10 Nm mais 800 t/min plus haut) contre 420 Nm au même régime pour l’EDC6 (+30 Nm), grâce à une cartographie spécifique. L’échappement est propre à la version Trophy avec, à nouveau pour la première fois à Dieppe, une ligne d’échappement recevant un silencieux arrière à clapet électromécanique.
Si cette option permet d’offrir une sonorité différente, elle permet également une réduction de la résistance à l’écoulement pour permettre aux gaz d’emprunter un chemin plus direct lorsque le clapet est ouvert. Autre nouveauté avec cette Trophy, mais étendue pour l’ensemble de la gamme RS de la 4ème génération, la possibilité d’opter pour les très convaincants sièges Recaro Sportster CS en Alcantara. Si l’habitacle de la version RS “de base” pouvait sembler lourd, le design fin des Recaro améliorera cette impression et permet surtout de faire passer un harnais, OUI !
Cette version Trophy a l’avantage de proposer, de base, le “Pack Cup”, comprenant le châssis du même nom, les étriers de freins Brembo rouges et surtout le différentiel Torsen, mais également le RS Monitor et les disques de frein bi-matière. Par contre, pas de grand signe distinctif à l’extérieur. Un stripping TROPHY sur la lame F1 à l’avant, ainsi que des jantes spécifiques “Jerez” de 19 pouces mais rien de plus. Dommage car Renault nous avait habitué à mieux pour leurs divers séries. Pas de limitation du nombre ou de la durée non-plus, ce qui ne rend en réalité pas cette édition si spéciale que ça. Mais qu’est-ce que tout ça va amener véritablement dans les faits ? Mettons en route ce fameux bloc 1.8L pour le savoir.
Dès les premières secondes, la présence acoustique s’impose. Si ce n’est pas une révolution pour le segment, une sonorité pareille ne pouvait être obtenue qu’avec un échappement Akrapovic pour les anciens modèles. Je me force à ne par enclencher le mode Sport tout de suite, et … je cale lamentablement. La commande d’embrayage est très directe et un filet de gaz est nécessaire pour accompagner le 1.8L dans un démarrage réussi. Il faut s’y habituer mais ce soucis m’arrivera trois fois dans les premières minutes au volant, plus ensuite, heureusement pour mon orgueil.
L’amortissement primaire est vraiment rude dès les premiers kilomètres. La direction est déroutante de réponse et de précision et l’effet du 4CONTROL se remarque dès le premier virage. La visibilité est bonne malgré des montants “A” bien présents et un pare-brise assez incliné. La voiture semble véritablement vissée au bitume et toutes les aspérités remontent bien, autant dans le volant que dans les lombaires.
En utilisation citadine, les manœuvres sont aisées et les diverses aides sont là pour combler la visibilité réduite vers l’arrière, mais meilleure que sur la 3ème génération. Le moteur est vraiment creux avant le spool-up du turbo et sous le régime de couple maximum de 3’200 t/min. Cela impose de de rouler un rapport en-dessous et de maintenir un régime inhabituellement élevé pour les groupes turbocompressés contemporains. Et la consommation s’en ressent, nous y reviendrons.
Si ce n’est la magnifique couleur jaune “Sirius” qui attire tous les regards, cette Megane 4 RS Trophy est assez passe-partout et docile, pour autant qu’on n’ait pas trop de démangeaisons au niveau du pied droit. C’est l’entrée d’autoroute de Chexbres, direction Valais, qui me fera très rapidement prendre conscience que la Trophy n’est pas proposée pour rigoler.
Virage à 270 degrés se refermant, voie d’entrée en montée et insertion dans le trafic aux alentours de 16h30 un vendredi, autant avoir de la cavalerie sous le capot pour que tout se passe comme nous l’avons décidé. Le virage passe sans forcer et le bloc M5Pt prend les tours à une vitesse hallucinante, sans pour autant mettre à mal l’adhérence. Si l’accélération n’a pas le côté brutal d’une Peugeot 308 GTi ou d’une Hyundai i30N, elle se traduit rapidement par des vitesses répréhensibles sur le compteur.
Si ce moteur, de par sa cartographie, déçoit bas dans les tours, il est redoutable lorsque nous sommes “in the zone”. J’ai trouvé le contrôle de l’adhérence plus aisé qu’avec la Honda Civic Type-R, et caractère presque typé atmosphérique, tant il est important de retomber juste au changement de rapport pour garder la mécanique sous pression.
L’adhérence est juste d’une qualité XXL pour une traction dès l’instant où on la patience de remettre les roues avant en ligne pour ouvrir en grand, faute de quoi le sous-virage peut être copieux. La caisse, dans sa configuration “Cup”, vire à plat grâce à des amortisseurs et des ressorts plus fermes de respectivement 25% et 30% ainsi qu’à une barre anti-roulis plus rigide de 10%.
Ajoutez à cela le différentiel Torsen, efficace mais pas omniprésent non-plus, et l’ensemble ne bougera pas en virage. Contre-partie du Torsen, les renvois de couple dans la direction sont très perceptibles et demandent de la poigne. Le couple passe au sol efficacement, mais on ne ressent pas l’effet vectoriel du différentiel proposé par Ford sur la Fiesta ST par exemple.
Avec le système 4CONTROL, les premiers lacets m’ont surpris. Donnant l’impression d’un arrière mobile ayant tendance à lever la patte et à se dérober, il n’en est rien une fois apprivoisé. Les courbes passent à une vitesse conséquente, sans mettre à mal la monte pneumatique, d’excellents Bridgestone Potenza S001. Le freinage est endurant en usage routier, certainement grâce aux disques bi-matière. Le mordant à l’attaque et le feeling à la pédale sont convaincants. Mode Race activé, l’arrière devient très mobile au lever de pied et impose un certain respect pour être prêt à rattraper des dérives assez brutales.
La commande de boîte manuelle est bonne dans son ensemble mais pas au niveau de Honda, avec un guidage précis mais un léger jeu mécanique et des verrouillages un peu fermes qui nuisent à la rapidité. La réponse à la pédale des gaz est quasiment immédiate pour autant qu’on maintienne le moteur dans sa plage de fonctionnement. A défaut, les reprises sont anémiques. Il faut anticiper les descentes de rapport pour bien ressortir des courbes serrées, et ce côté pointu est parfois frustrant avec un moteur si coupleux et puissant sur le papier. La contre-partie est une belle aisance dans les tours, et un côté rageur qui se prolonge au-delà du régime de puissance maxi.
Dans le registre acoustique, lorsque le clapet d’échappement est ouvert, la sonorité rauque et sportive est agréable, mais les claquements en retenue deviennent très vite lassants, même si ils sont plus aléatoires et moins convenus que sur la dernière Audi RS3 par exemple.
L’ensemble des finitions est identiques à ce qui existait déjà sur la Megane 4 RS de base, avec l’ajout bienvenu des excellents sièges Recaro. Le système d’infotainement est identique à celui de la gamme Renault actuelle et reste donc convaincant. Les places arrières permettent d’accueillir deux adultes ou des sièges enfants, toutefois l’habitabilité n’est pas du niveau d’une Civic Type R par exemple.
La consommation est un des deux gros bémols de cette version Trophy. Nous avons relevé 11.3 L/100 km, soit 1L de plus qu’avec la Honda Civic Type R, pourtant équipée d’un bloc de 1’996 cm3. Le caractère pointu du moteur a ses attraits, mais compromet l’agrément en conduite normale ou pousse à rouler plus agressif qu’avec la concurrence, et ça se voit à la pompe. L’autre est l’amortissement, qui finira par être lassant en utilisation quotidienne. L’absence de suspension réglable est une faiblesse, et le tarage est résolument sportif, il faut en être conscient.
Le prix de base a légèrement pris quelques milliers de francs par rapport à la Megane 3 RS Trophy, mais le standard de finition et d’équipement a également clairement évolué. Le rapport prix/performance de la 3 RS était son point fort, mais l’écart par rapport aux intégrales allemandes se réduit de plus en plus.
La Megane 4 RS se veut polyvalente, et a même trop bien réussi son coup; cette version Trophy est clairement différenciée et plus destinée à une utilisation très sportive, à l’image de ce que propose Honda avec sa Type-R. Les pistards et arsouilleurs s’en réjouiront, mais les plus calmes ne devront pas se fourvoyer dans le choix de la version adaptée à leur utilisation.
Prix et options du véhicule essayé
Renault Megane R.S. | CHF 38’900 | € 38’300 |
Version Trophy | CHF 3’500 | € 6’000 |
Pack Easy Parking | CHF 750 | € 500 |
Pack Safety | CHF 700 | € 300 |
Siège Recaro en Alcantara | CHF 3’100 | € 1’200 |
Volant sport en Alcantara | CHF 400 | de série |
Peinture métallisée “Jaune Sirius” | CHF 1’900 | € 1’600 |
Total | CHF 50’200 |
€ 47’450 |
Face à la concurrence – caractéristiques techniques
Renault Megane IV RS Trophy |
Hyundai i30N | Honda Civic Type-R GT | |
Moteur | L4 turbo 1798cm3 | L4 turbo 1998 cm3 | L4 VTEC turbo 1996cm3 |
Puissance (ch / t/min) | 300 / 6000 | 275 / 6000 | 320 / 6500 |
Couple (Nm / tr/min) | 420 / 3200* 400 / 3200** |
353 / 1450–4700 378 / 1750-4200 |
400 / 2500-4500 |
Transmission | traction | traction | traction |
Boite à vitesses | EDC 6* / man. 6** | manuelle 6 | manuelle 6 |
RPP (kg/ch) | (5.23)* / (5.16)** | 5.39 | (4.31) |
Poids DIN (constr.) | 1568* / 1549** | 1483 (1509) 61.4%AV 38.6%AR |
(1380) |
0-100 km/h (sec.) | 5.7 | 6.1 | 5.8 |
Vitesse max. (km/h) | 260 | 250 | 272 |
Conso. Mixte (constr.) | (7.7)* / 11.3 (8.0)** | 10.46 (7.1) | 10.4 (7.7) |
Réservoir (l) | 50 | 50 | 46 |
Emissions CO2 (g/km) | 176* / 183** | 163 | 176 |
Longueur (mm) | 4364 | 4335 | 4557 |
Largeur (mm) | 1874/2118 | 1795 | 1877 / 2076 |
Hauteur (mm) | 1428 | 1447 | 1434 |
Empattement (mm) | 2669 | 2650 | 2699 |
Coffre (L) | 380/1270 | 381/1287 | 420 / 786 |
Pneumatiques | 245/35 R19 | 235/35 R19 | 245/30 R20 |
Prix de base (CHF) | 44’100* / 42’400** | 36’990 | 42’800 |
Prix de base (EUR) | 44’300 | 34’800 | 39’880 |
Nos remerciements à Renault Suisse pour le prêt de cette Megane IV RS Trophy.
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