Essai BMW M5 F90 : le missile

Nous avons amené la nouvelle BMW M5 sur nos routes favorites.

Pour la sixième génération de la M5 BMW installe une transmission aux quatre roues. Jusqu’ici la M5 était restée fidèle à la propulsion. Le passage au moteur turbo compressé avait déjà eu lieu lors de la 5ème génération c’est donc bien la transmission qui tient la vedette dans les caractéristiques techniques de ce modèle. Baptisée M xDrive elle dispose d’une commande électronique de la répartition de couple entre les trains avant et arrière. Le couple est envoyé en priorité au train arrière, ce n’est que lorsque les limites d’adhérence de ce train sont atteintes que le système utilise le train avant. Pour les amateurs de drift, dont la M5 est une des voitures de prédilection, il est possible de configurer le système pour qu’il reste en mode propulsion, deux roues motrices. Nous y reviendrons.

La série 5 en est à sa 7ème génération d’une lignée débutée en 1972, mais la première M5 ne fut introduite qu’en 1985 sur une base de 535i E28 de l’époque avec un moteur dérivé de celui équipant la fameuse M1. Elle peut se targuer d’avoir été le précurseur des berlines haute performance. Les motorisations ont évolué BMW avec les époques, passant du six cylindres en ligne au V8 atmo en 1998,  puis le V10 de l’E60 en 2005, à l’époque ou la Formule 1 utilisait ce type de moteur et BMW en était un des acteurs. En 2011 pour la 5ème génération BMW convertit sa M5 au turbocompresseur, les normes anti-pollution obligeant les constructeurs au downsizing, BMW revient ainsi au V8 suralimenté par deux turbos.

Le modèle actuel reprend ce V8 de 4.4 litres de cylindrée avec de nouveaux turbos et une pression d’injection augmentée. Ce moteur délivre maintenant 600 ch de 5600 à 6700 tr/mn et un couple de 750 Nm sur une plage de régime exceptionnelle allant de 1800 à 5600 tr/mn. Les ingénieurs ont travaillé sur la signature sonore de l’ensemble avec notamment une ligne d’échappement spécifique équipée de valves pour le contrôle du volume sonore à l’aide d’un bouton sur la console centrale.

Après une série de boites à vitesse à commande manuelle suivie de la fameuse boite robotisée SMG III puis d’une boite à double embrayage pour la génération précédente, la M5 adopte aujourd’hui une boite automatique à 8 rapports baptisée M Steptronic. Cette boite peut fonctionner en mode automatique comme manuel avec sélection des rapports par les palettes au volant ou le levier central. Lorsque ce dernier mode est sélectionné il est possible d’aller toucher le limiteur de régime, comme de sélectionner la 1ère en roulant, sans reprise en main du système en montant un rapport ou refusant le rétrogradage. BMW a aussi installé le système Drivelogic inauguré par la boite SMG. Il permet de choisir parmi trois modes de fonctionnement pour des passages de vitesse confortable ou agressifs.

Le châssis a été mis au point sur les circuits de Miramar et du Nürburgring. Il dispose à l’avant d’une suspension à double-triangle superposé et à l’arrière d’une configuration à 5 bras classique. Il est équipé de suspensions pilotées et d’une direction assistées elle aussi contrôlée électroniquement. Ces deux systèmes disposent de 3 modes prédéfinis : Confort, Sport et Sport Plus. Ces modes sont sélectionnés à l’aide de boutons spécifiques sur la colonne centrale avec celui des caractéristiques du moteur, disposant lui des modes Efficient, Sport et Sport Plus.

On peut également sélectionner les modes sport ou Sport Plus pour ces trois paramètres à l’aide de deux petits leviers rouge libellés M1 et M2, installés sur le volant. Ces derniers s’avèrent très pratique en roulant. Le mode Sport Plus demande d’être pressé deux fois pour quittancer l’avertissement de la désactivation du contrôle de trajectoire. La monte pneumatique standard est composée de 275/40 19 et 285/40 19, alors que notre voiture dispose d’une monte majorée à 275/35 20 et 285/35 20 optionnelle.

Il est temps de s’installer à son volant. Notre voiture de test de couleur bleu Marina Bay métallisé dispose de l’intérieur tout cuir Tartufo (option à CHF 8630 / € 6900) provenant de la gamme BMW Individual. Cet intérieur est de toute beauté, tant par la qualité du cuir que par la réalisation de l’ensemble, Les sièges baquets disposent de nombreux réglages et permettent de se sentir à l’aise. Une pression sur le bouton « start » et le moteur démarre dans un bruit sourd masquant mal ses caractéristiques sportives, d’autant plus que le ralenti s’établi à 1400 tr/mn dans un grondement valorisant.

Je prends l’autoroute en direction du Gothard pour quelques jours de conduite sur nos routes de prédilection. La suspension est ferme mais confortable. La boite à vitesse dans ces conditions est au niveau des meilleures boites automatique actuelles, mais elle reste moins raffinée dans son fonctionnement qu’une boite à double-embrayage telle que la Porsche PDK 8 montée dans les Panamera. Je note juste un retard lors des ré-accélérations pour permettre le rétrogradage. Je prends la sortie Wassen pour éviter le bouchon du tunnel du Gothard et profiter des belles routes de montagne de cette région. Je passe en mode sport à l’aide du bouton M1, il me reste à pousser le levier de sélection de la boite pour passer en mode manuel. Les accélérations sont féroces, ce moteur ne manque pas de poigne, je n’ai constaté aucun délai dû aux turbos, le couple déboule toujours avec spontanéité. L’échappement pétarade lors des descentes de rapport ainsi que lors des montées.

Le comportement est souverain, pas de roulis, le système de transmission permet de rouler fort sans soucis, avec une grande facilité. La voiture reste toujours bien balancée, elle est neutre dans ses réactions si on choisit de rester en mode sport. Le passage au mode sport plus rend la voiture plus survireuse, on retrouve les sensations d’antan avec un arrière qui peut se montrer un tantinet mobile en attaquant très fort. Les performances sont extraordinaires, cette berline, relativement discrète, est très difficile à suivre, il faudra aller chercher dans les supercars pour avoir de quoi jouer dans la même catégorie. L’expérience sonore, vitre baissée est à l’avenant, le grondement du V8 est entrecoupé par les retours secs de l’échappement. BMW a bien travaillé l’équilibre entre les sources sonores de l’échappement et de l’admission pour un résultat convaincant à mes oreilles.

En mode M2, avec direction, transmission et amortissement dans leurs réglages les plus sportifs, le M5 passe d’une très bonne berline sportive à un outil qui atteint un très haut niveau, dans un remarquable grand écart entre efficacité et sensations. La mise en vitesse du V8 biturbo est saignante, et surtout sans la moindre relâche alors que la boîte claque rapport après rapport avec une fermeté implacable. Le plus époustouflant est cette aptitude du châssis à encaisser un tel traitement, maîtriser la physique d’une telle masse au gré des accélérations longitudinales et latérales, le tout sans se désunir ni devenir scabreux. Et la M5 réussit ce tour de force en distillant des sensations physiques et sonores immersives, mais qu’avec le côté positif. L’ensemble donne totale confiance, mais le rythme dont est capable la voiture et les sensations qu’elle distille sont presque éprouvants. Cette M5 livre sur un plateau le meilleur de l’automobile sportive et se charge du reste avec maestria. Le cocktail est remarquable.

Si je devais émettre une réserve, elle viendrait du train avant que j’aurais aimé un peu plus incisif dans les épingles lentes, mais pour le reste, la M5 F90 nous a subjugué sur un terrain exigeant et à un rythme punitif. Motorsport réussit son passage à la transmission intégrale de fort belle manière, préservant les attributs de sportivité attendus du label tout en amenant polyvalence et efficacité.

La M5 dispose naturellement de l’équipement pléthorique des nouvelles série 5 avec une touche supplémentaire pour distinguer la M5 de ses congénères. Les inévitables aides à la conduite sont présentes comme le suivi de lignes actif et le radar de distance. Ces deux systèmes ensemble montrent les premiers pas dans le domaine de l’autopilotage. Je profite du tronçon monotone entre Brienz et Spiez, une route à une voie serpentant à flanc de montagne et toujours encombrée. J’enclenche le système et observe son fonctionnement. La voiture suit correctement la ligne de gauche mais reste un peu trop proche de celle-ci à mes yeux.

 

Tout se passe bien lorsque les conditions sont claires, mais la situation se gâte assez sérieusement lorsque des travaux sont signalés par une bande orange sur la route, ou lorsque la voiture prend la direction d’un embranchement au lieu de continuer sur sa trajectoire. Il faut bien entendu garder les mains sur le volant sinon la voiture proteste visuellement dans l’affichage tête haute et finit par  désactiver le mode. Le stress de devoir reprendre le contrôle à plusieurs reprises m’empêche d’admirer les splendeurs des lacs de Thun et de Brienz en cette après-midi ensoleillée. Plus tard sur autoroute dans un bouchon en avançant entre 0 et 50 km/h le système démontre sa valeur, dans ces conditions il se montre parfaitement à son affaire et apporte un confort de fonctionnement appréciable.

 

Les températures estivales lors de cet essai m’incitent à enclencher la ventilation des sièges. Une option que je recommande, mais qui ici est restée un mystère, son effet s’est avéré imperceptible y-compris à puissance maximale. La climatisation de l’habitacle s’est aussi montrée récalcitrante, en fonction de la température extérieure elle est soit trop prononcée soit pas suffisamment. Les nombreuses tentatives d’ajustement n’ont pas été fructueuses. Ce qui m’amène à réfléchir sur la pertinence de l’abondance de fonctions et d’ajustements que l’équipement de cette berline offre. La navigation à travers les nombreux menus et sous-menus à l’aide du bouton idoine demande un apprentissage qui m’est apparu plus ardu que je ne l’imaginais. Je ne peux m’empêcher de conclure que la limite est atteinte voire dépassée et qu’il serait souhaitable de changer de paradigme d’interface.

La clé de cette voiture dispose d’un affichage avec possibilités de visualiser et contrôler quelques fonctions de la voiture comme l’autonomie, le verrouillage des portes et fenêtres ou le contrôle de la climatisation. La batterie de cette clé semble se décharger rapidement mais elle peut être rechargée en la déposant sur la surface au standard QI sur la console centrale. Il faut juste veiller à ce qu’elle soit placée au centre de cette surface, ce qui n’est pas possible en roulant sur des routes sinueuses. Cette surface est prévue pour les smartphones, elle est juste dimensionnée pour les plus grands modèles actuels mais sans coque de protection. Cette M5 est l’une des premières voitures sur le marché disposant du CarPlay sans fil, soit la possibilité d’utiliser son iPhone directement depuis les commandes et l’écran de la voiture. Android Auto est également disponible pour les téléphones disposant ce système d’exploitation.

Sur nos balances la M5 de test pointe à 1928 kg avec le plein d’essence alors que le poids DIN annoncé est de 1855 kg. Avec une voiture aussi performante la consommation de carburant est un paramètre probablement secondaire pour la clientèle. Lors de cet essai sur près de 1600 km nous avons mesuré une consommation de 14.6 l/100km avec des extrêmes de 9.3 et 18.8 l/100km. L’affichage de la voiture indiquait à la fin de l’essai 14.0 l/100km pour une moyenne horaire de 63.2 km/h.

BMW délivre une très bonne copie avec cette sixième génération de M5. Son gabarit est tout à fait vivable dans nos villes comme sur route de montagne. Les performances sont extraordinaires et la facilité d’utilisation de ce potentiel remarquable. Nous nous sommes trouvé à plusieurs reprises confrontés à de très bonnes GT et la M5 s’est montrée à la hauteur en force d’accélération comme en comportement sur route sinueuse. La transmission aux quatre roues joue certainement un rôle primordial dans la facilité de prise en main, elle a cette capacité de valoriser le conducteur lorsqu’il accélère le rythme sans demander des compétences de pilote. Il est aussi possible de la rendre plus capricieuse sur simple pression d’un bouton. Le grand écart pour plaire à une nouvelle clientèle sans renier la tradition Motorsport.

BMW M5 contre Audi RS6: la bacchanale

La confrontation s’imposait. L’Audi RS6 C7 a acquis un status de voiture culte, construit sur ses aptitudes intrinsèques et amplifié par son look agressif. Au crépuscule de son cycle, est-ce que cette égérie des über-berlines soutient la comparaison avec la nouvelle M5 F90, alors que BMW s’est enfin décidé à doter sa sportive porte-étendard de la transmission intégrale ?

Sur le papier, la comparaison est relativement serrée. Avec 605 ch et 700 Nm (750 en overboost) dans cette version Performance, la RS6 C7 reste compétitive contre les 600 chevaux et 750 Nm du V8 biturbo de la M5. A un détail près: le poids. Cette RS6 rend 159 kg à la M5. Et dans cette balade musclée, ça se sent. A chaque relance en sortie de village, la M5 s’éloigne. De peu, eu égard au fait que je dois réagir aux relances, mais une chose est certaine, je ne lui reviens pas dessus.

La gestion de la boîte de la M5 prend le dessus sur la RS6 dans deux domaines précis. Le premier est le feedback mécanique en mode M2, qui ponctue les montées de rapport à pleine charge d’un léger à-coup très réussi. La boîte de la RS6 s’accommode très bien d’un rythme très soutenu, mais ne module pas les sensations de conduite. Le deuxième se situe à l’autre extrême: la M5 est parfaitement douce en manoeuvre ou à froid, alors que la rampante de la RS6 est caricaturalement empressée à froid.

En matière de comportement, BMW a su donner à la transmission intégrale de la M5 un côté propulsion que la RS6 n’a jamais prétendu avoir. Le train arrière de la RS6 est imperturbable alors que la M5 promet de belles virgules aux courageux. Sa plage de réglage d’amortissement est par contre un peu plus étroite que celle de la RS6: son DRC est capable de faire le grand écart entre un mode Comfort remarquablement confortable et un mode Dynamic extrêmement rigide, peut-être trop hors revêtement parfaits. Je n’ai pas trouvé le train avant de la M5 particulièrement accrocheur, mais la différence pourrait provenir des gommes, Pirelli PZero pour la BMW contre Dunlop SP Sport Maxx. Le freinage de la BMW m’est pas contre apparu plus endurant, mais ça pourrait être la conséquence du liquide de freins de l’Audi qui a déjà plus de 12 mois.

Ces considérations restent toutefois secondaires dans la mesure où les deux voitures offrent un très haut niveau de performance et d’agrément. La RS6 accuse son âge de conception, mais peut-être pas autant qu’on pourrait le penser. A ce niveau, les critères de choix iront d’abord à des éléments fondamentaux. Break ou berline, BMW ou Audi, une image en tout petit peu plus discrète pour la BMW que la RS6, ses canines de morse, ses ailes joufflues et son échappement un petit peu plus démonstratif. A ce niveau, il n’y a pas de mauvais choix, juste une évidence qui s’établit sans doute au premier coup d’oeil et qui se rationalise dangereusement vite ensuite.

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Prix et options du véhicule essayé

BMW M5
CHF 139’900 €127’550
Intérieur tout cuir BMW Individual Tartufo CHF 8’630 €6’900
Echappement sport M CHF 1’900 N/C
Jantes 20″ bicolores CHF 2’660 €2’150
Freins carbone-céramique CHF 11’160 N/C
Recouvrement moteur M carbone CHF 1’520 N/C
Soft close automatique pour portes CHF 810 €690
Vitrage calorifuge CHF 570 €460
Ceintures de sécurité M CHF 380 N/C
Liseuses individuelles arrière CHF 510 N/C
Sièges avant massant CHF 1’260 N/C
Intérieur aluminium à structure carbone CHF 740 N/C
Protection active CHF 440 N/C
Assistant parking Plus CHF 650 N/C
Paquet ConnectedDrive Service CHF 510 N/C
Volant chauffant CHF 320 €275
Télécommande universelle intégrée CHF 320 €300
Rouleaux pare-soleil CHF 750 €650
Ventilation active des sièges avant CHF 1030 €850
Paquet air ambient CHF 410 N/C
Placage céramique sur éléments de commande CHF 700 N/C
Prise 12V supplémentaire CHF 80 €70
Driving assistant Plus CHF 2’170 €1’760
Diverses option supplémentaires CHF 9’490 N/C
Prix catalogue du véhicule de test CHF 187’400
 

 

Face à la concurrence – caractéristiques techniques

BMW M5 F90
Audi RS6 Avant Performance
Mercedes-AMG
E 63 S 4MATIC
Alfa Romeo Giulia Quadrifoglio
Moteur V8 biturbo 4395 cm3 V8 biturbo 3993 cm3 V8 biturbo 3982 cm3 V6 biturbo 2891 cm3
Puissance (ch / t/min) 600 / 5600-6700 605 / 6100-6800 612 / 6500 510 / 6500
Couple (Nm / t/min) 750 / 1800-5600 700 / 1750-6000
750 / 2500-5500
850 / 2500 600 / 2500
Transmission 4 RM 4 RM 4 RM AR
Boite à vitesses Automatique, 8 Automatique, 8 Automatique, 9 Robotisée, 8
RPP (kg/ch) 3.21 3.45 (3.54) (3.32)
Poids DIN (constr.) 1928 (1855)
54.3%AV 45.7%AR
2087 (1950) (2165) (1695)
0-100 km/h (sec.) 3.4 3.7 3.4 3.9
Vitesse max. (km/h) 250 / 305 250 250 240
Conso. Mixte (constr.) 14.6 (10.5) (9.6) (10.9) (8.2)
CO2 (g/km) 241 223 247 198
Réservoir (l) 68 75 66 58
Longueur (mm) 4965 4979 4993 4639
Largeur (mm) 1903 1936-2086 1907 1873-2024
Hauteur (mm) 1473 1461 1495 1426
Empattement (mm) 2982 2915 2939 2820
Coffre (L) 530 565 540 480
Pneus AV 275/40 R19 285/30 R21 265/35 R20 245/35 R19
Pneus AR 285/40 R19 285/30 R21 295/30 R20 285/30 R19
Prix de base (CHF) 139’900 144’590 150’800 92’900
Prix de base (EUR) 127’550 135’160 134’501 80’290

Nos remerciements à BMW Suisse pour le prêt de cette M5.

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