Essai Audi R8 V10 Spyder

La version Spyder de la nouvelle R8 est-elle au niveau des prestations éblouissantes du coupé ? 

L’essence d’un cabriolet réussi est d’offrir les prestations dynamiques d’un coupé avec, en bonus, les plaisirs de la conduite en plein air, la vision panoramique, le son du moteur et la communion avec les paysages traversés. Le malus qui guette les exécutions hâtives est une perte de rigidité (en torsion et flexion) en conséquence de l’ablation du toit. Nul besoin d’être ingénieur mécanicien ou expert en simulation à éléments finis: prenez une boîte à chaussures, enlevez le couvercle, et le résultat est flagrant. La clé du succès est une caisse conçue d’emblée pour pouvoir être déclinée en version cabriolet, avec des points de renforts ciblés, sans pénalité pondérale exagérée.

La nouvelle R8 Spyder est 55% plus rigide en torsion que la première R8 Spyder, mais des valeurs absolues sont plus révélatrices. Elle atteint 19300 Nm/degré, une valeur équivalente au coupé R8 de première génération (environ 22’000 Nm/degré). La caisse de la R8 Coupé de deuxième génération atteint des valeurs naturellement supérieures, 32’000 Nm/degré.

  

Pour parvenir à ce résultat, les ingénieurs d’Audi ont travaillé sur plusieurs axes pour compenser l’absence de toit, et l’amputation de deux larges sections du tablier arrière en carbone – fabriqué chez Lamborghini à Sant’Agata – pour dégager de l’espace pour les bras du mécanisme de capote. Le cadre de pare-brise a été renforcé, et la section des profilés extrudés de bas de caisse est majorée, avec des parois d’aluminium variant entre 4 et 6mm au lieu de 1.5 à 2mm sur le coupé. Le nombre de couches de carbone appliquées sur le tunnel et le tablier arrière a été également majoré. Au final, Audi annonce 1720 kg DIN pour la R8 Spyder, soit 80 kg de plus que la R8 V10 Coupé “pas Plus”, renforts et mécanisme de capote inclus.

 

  

A notre arrivée à Barcelone, je lance une OPA sur un exemplaire bleu Ara équipé des baquets sports (en cuir gris en l’occurrence) et nous partons à la découverte de la R8 Spyder en direction de Torello. La bonne nouvelle est que la voiture est imperturbable. Aucune vibration n’est perceptible dans la direction, le cadre de pare-brise ou le plancher. Que ce soit sur des cassures sèches ou des routes bosselées, toutefois rares dans cette région de la Costa Brava, la R8 Spyder encaisse sans la moindre vibration révélatrice d’un défaut de rigidité.

La R8 Spyder n’est (pour l’instant) disponible qu’en version “pas Plus”, soit avec une configuration du V10 atmosphérique développant 540 Nm à 6500 t/min et 540 ch à 7800 t/min (le moteur de la R8 V10 Plus développe 560 Nm à 6500 t/min et 610 ch à 8250 t/min). Les différences mécaniques avec la déclinaison Plus se limitent à un collecteur d’admission différent, des soupapes en alliage conventionnel au lieu du titane, et d’une cartographie plus sage. Sans comparaison directe, je serais incapable de déceler des différences flagrantes de performances. Les accélérations sont massives et la souplesse du V10 à bas régime (il fonctionne régulièrement à moins de 1500 t/min en septième) n’a d’égal que sa verve à 8000 t/min. Les montées en régime sont inlassables, un crescendo organique qui reste incontestablement l’apanage des mécaniques atmosphériques. La réponse à la pédale est d’une pureté absolue, immédiate à l’ouverture, sans à-coups au lever de pied.

Malgré un régime de couple maxi élevé, le 5.2L est bien rempli, avec plus de 420 Nm dès le ralenti, un décollage significatif depuis 3000 t/min et 500 Nm à partir de 5000 t/min. Les performances ne sont pas aussi saignantes que celles d’une McLaren 570S – plus coupleuse (600 Nm) et surtout beaucoup plus légère, mais paradoxalement plus pointue également. Le V10 atmosphérique de la R8 donne l’impression tenace de mieux reprendre à bas régime que le 3.8L biturbo de la “petite” McLaren.

L’expérience sonore est dantesque. Comme sur le TT RS, les voitures équipées de l’échappement sport se reconnaissent à leurs sorties d’échappement noires, alors que les échappements standard sont chromés. Les deux systèmes sont équipés de clapets (pneumatiques en l’occurrence) qui altèrent le flux des gaz, permettant d’alterner entre deux modes. Toutes les voitures présentes au lancement international étaient équipées de l’échappement sport, il m’a donc été impossible de comparer avec le système standard.

Si la possibilité de fermer les clapets est appréciable et rend la voiture reposante sur long trajet, l’échappement sport ne m’a pas totalement convaincu. En mode normal, le bruit à mi-régime est dominé par la résonance de l’admission et n’est pas particulièrement attractif à mes oreilles. En mode Sport, le volume sonore devient massif, à la limite de l’inconfort, que ce soit capote fermée ou capote ouverte. La richesse des harmoniques est enchanteresse, modulée et subtile, mais l’amplitude problématique pour mes tympans. Exaltante à faible dose, mais fatigante jusqu’à la migraine à la longue. Les acousticiens d’Audi ont réussi le tour de force de donner une présence immédiate au V10 sans avoir recours à des conduits acoustiques ou autres artifices. Le son ne semble pas sortir des échappements, là-bas à l’arrière de l’auto, mais directement du moteur, à quelques petits centimètres des sièges.

Stephan Winkelmann, le nouveau patron d’Audi Sport, reconnaît que, pour la marque, la R8 se trouve à un extrême en termes de l’équilibre entre sensations et confort, et j’abonde dans son sens. Pour l’acheteur, le piège est de succomber à l’euphorie d’une course essai. L’option échappement sport n’est par ailleurs pas bon marché (CHF 2’480), une remarque que l’on peut faire au sujet de beaucoup d’options sur la R8 V10 Spyder. Les amateurs de belles pièces en carbone seront comblés – leur réalisation est magnifique, mais l’addition est lourde.

 

Les baquets sports tiennent bien le corps, des cuisses aux épaules en passant par les fesses et le dos, mais ils sont relativement fermes. Les sièges sport standard offrent plus de rembourrage (et de jolis motifs en losange si l’on opte pour des coutures contrastantes), mais leur maintien est moins omniprésent, sans être vraiment pénalisant en conduite sportive. Ils intègrent également dans les appuie-tête des hauts-parleurs Bang & Olufsen sensés assister les 9 autres éléments disposés dans l’habitacle. Dans mes essais, leur contribution ne m’est pas apparue flagrante, mais la qualité du système audio est très bonne. L’habitacle de l’Audi R8 Spyder est par ailleurs très plaisant pour cruiser, la ceinture de caisse haute et le filet de protection (malheureusement fixe) procurent une bonne protection contre le vent et les remous.

Des températures encore clémentes pour la saison, une belle fin d’après-midi ensoleillée, je profite de quelques heures pour embarquer un exemplaire jaune Vegas et partir pour la route côtière entre Sant Feliu de Guixols et Lloret de Mar. De beaux points de vue sur la Méditerranée, un enchaînement incessant de virages serrés, le dépassement occasionnel d’une voiture se traînant à 30 km/h. Ce terrain met en relief la remarquable homogénéité du châssis de la R8. Agile dans les changements d’appui, fiable dans les accélérations en sortie de courbe serrée, imperturbable  sur les inégalités, je retrouve presque toutes les qualités que le coupé R8 V10 Plus avait démontré dans les alpes helvétiques, avec une petite nuance. Le train avant me semble un peu moins incisif, un peu moins franc et mordant. Selon les gens d’Audi, il n’y pas de différence intentionnelle de réglage de géométrie entre Spyder et Coupé, donc l’explication est peut-être à aller chercher dans la monte pneumatique, 19” en Continental SportContact 6 sur le Coupé contre 20” en Pirelli PZero sur de sublimes jantes forgées (optionnelles) sur le Spyder.

Cette nuance identifiée, le comportement et la prestation d’ensemble sont enchanteurs. C’est l’expérience supercar par excellence, mais sans le côté indomptable et intimidant. Le cadre, le son, la performance, le grip, tout concourt à des sensations de très haut niveau, mais avec une facilité de conduite déconcertante tant que l’on respecte les vitesses atteintes à la moindre accélération. Toutes les voitures présentes étaient équipées de freins céramiques, je n’ai donc pas pu tester les disques en acier de base. La monte carbone céramique est irréprochable en usage routier, que ce soit en mordant, puissance et feeling. Selon Audi, plus de la moitié des clients la spécifient sur les R8 (les modèles V10 Plus en sont dotés de série), malgré le tarif conséquent (CHF 11’570). La boîte S-Tronic s’est également montrée irréprochable, douce en conduite décontractée, rapide et précise à l’attaque.

 

Alors que je traverse tranquillement Tossa sous les regards admiratifs des autochtones sortis faire leurs courses du soir, une conclusion s’impose: Audi a réussi son Spyder R8, délivrant tous les attraits de la conduite au grand air sans compromis sur les prestations dynamiques.  Un défaut notable de l’Audi R8 demeure l’espace de chargement pour partir en week-end. Le coffre de 112L est étriqué et ne reçoit qu’au grand maximum un petit bagage de cabine et un sac souple. Et à la différence du coupé, il n’y a aucun espace de rangement derrière les sièges. C’est un réel handicap, de ceux qui rendraient la perspective d’un road trip d’une semaine en couple difficile à réaliser. Cette carence pratique n’est cependant pas pire que sur la première R8, il est juste regrettable qu’elle n’a pas été adressée.

La première R8 a été un succès incontestable pour Audi. Sortie en 2007, elle a donné une nouvelle dimension à la marque, étendant le portefeuille vers le haut avec un produit légitime qui s’est écoulé à 27’000 exemplaires, dont environ 6000 Spyder. Tout porte à croire que cette seconde génération va connaître le même destin.

Prix et options du véhicule essayé

 

Audi R8 V10 Spyder CHF 219’900 € 184’000
Freins en carbone céramique CHF 11’570 € 10’430
Echappement sport CHF 2’480 € 2’230
Side blade carbone brillant CHF 1’440  € 2’580
Jantes alu forgé 20″ noir brillant  CHF 3’260 € 2’940
Pack extérieur en carbone brillant  CHF 7’680  € 6’920
Finition tout cuir Nappa fin  CHF 4’010  € 3’610
Coutûres de couleur contrastante  CHF 910 € 820
Applications intérieures en carbone brillant CHF 2’280  € 2’000
Applications étendues en carbone brillant CHF 2’540 € 2’250
Rétroviseurs en carbone CHF 1’830  € 1’640
Volant multifonctions à 4 satellites  CHF 2’220 € 2’000
Direction dynamique CHF 1’830 € 1’640
Caméra de recul CHF 810  € 730
Audi Smartphone Interface CHF 330  € 310
Bonus premium – CHF 9’890
Prix catalogue du véhicule de test CHF 253’850 € 224’690

 

Face à la concurrence

Audi R8 V10 Spyder Lamborghini Huracan LP610-4 Ferrari 488 Spider Porsche 991 Turbo Cabriolet
Moteur V10 5204 cm3 V10 5204 cm3 V8 biturbo 3902 cm3 B6 biturbo 3800 cm3
Puissance (ch / t/min) 540 / 7800 610 / 8250  670 / 8000 540 / 6400
Couple (Nm / tr/min) 540 / 6500 560 / 6500  760 / 3000 710 / 2250-4000
Transmission Quattro 4 RM AR  4 RM
Boite à vitesses S-Ttronic, 7 LDF, 7  F1, 7  PDK, 7
RPP (kg/ch) (3.19) N.C. (2.28)  (3.08)
Poids DIN (constr.) (1720) N.C. (1525) (1665)
0-100 km/h (sec.) 3.6  3.4 3.0 3.1
Vitesse max. (km/h) 318  324  330 320
Conso. Mixte (constr.) (11.7) (12.5) (11.4) (9.3)
CO2 (g/km) 277 280 260 216
Réservoir (l) 80  80 78 68
Longueur (mm) 4426 4459 4568 4507
Largeur (mm) 1940-2037 1924-2236  1952 1880
Hauteur (mm) 1244 1165  1211 1294
Empattement (mm) 2650 2620  2650 2450
Coffre (L) 112  N.C.  230 115
Pneus AV 245/35 R19 245/30 R20  245/35 R20 245/35 R20
Pneus AR 295/35 R19 305/30 R20  305/30 R20 305/30 R20
Prix de base (CHF) 219’900 274’000 277’600 225’100
Prix de base (EUR) 184’000 223’860 232’399  190’895

Nos remerciements à Audi Suisse pour l’invitation au lancement international de la R8 V10 Spyder.

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