Essai Volvo V60 D6 TwinEngine Plug-in Hybrid
Nos essais d’électriques et d’hybrides rechargeables gravitent tous vers la même obsession: se recharger. Première tentative: un box de garage dans un complexe résidentiel. Le réseau électrique y est un peu faiblard et chatouilleux, mais les chargeurs de la plupart des électriques contournent l’obstacle en régulant le courant draîné vers les 8A. Ce n’est malheuresement pas le cas du chargeur de la V60 TwinEngine, un assemblage aussi rustique qu’encombrant, qui disjoncte immédiatement. Le boîtier de charge lui-même est réglable manuellement sur plusieurs courants de charge, mais je n’ai même pas la possibilité d’actionner le bouton de commande avant que le fusible ne saute. Echec et mat.
Qu’à celà ne tienne, je décide de me lever tôt pour aller avaler un bol de birchermuesli pendant que la Volvo se charge sur la station EVite du centre Emil Frey de l’ouest lausannois. Par une heure aussi matinale, les lieux sont déserts. Problème toutefois: la Volvo ne supporte qu’une charge sur courant alternatif, et Volvo n’a fourni qu’un adaptateur pour 220V monophasé, mais pas le cable nécessaire à une recharge sous 360V triphasé. La grosse prise de charge rapide sous courant continu ne m’est d’aucun secours: la V60 n’est pas compatible. La deuxième tentative est un échec.
Résolu à surmonter l’obstacle, j’opte d’aller avaler mon petit-déjeuner à la station ChaDeMo de la concession Renault la plus proche. La borne fabriquée par ABB est libre, exhibant trois cables de charge dont la prise 360V AC libératrice. Je branche le câble dans la prise située dans l’aile avant de la V60 puis m’en vais pianoter sur l’écran de la borne. Manque de pot, si les recharges Chademo sont offertes gratuitement (tout comme les charges AC ou DC dans le réseau EVite), la borne Chademo me réclame un badge pour activer la charge AC. Aucun moyen de payer par carte de crédit, c’est un abonnement ou rien. Frustrant. La troisième tentative est également un échec.
Ces trois mésaventures sont aussi fortuites que symboliques des obstacles infrastructurels. La disponibilité et l’adéquation de prises électriques des garages privés aux exigences d’une voiture électrique sont aléatoires. La jungle des différents standards de charge et les adaptateurs nécessaires est une illustration pénible de l’incapacité de l’industrie automobile à se rassembler derrière un standard unique. Enfin, le modèle de déploiement des réseaux propriétaires sur la base de la gratuité de l’énergie est une fausse bonne idée. L’obstacle à surmonter n’est pas le coût de l’électricité, mais bien la maigreur de l’offre de points de recharge et l’absence d’inter-opérabilité. Imaginez le casse-tête si le plein de carburant de votre voiture n’était possible que dans les stations A, mais pas B ou C, et que les stations D requéraient un abonnement spécifique. Imaginez la prise de tête. En comparaison avec l’état de développement des réseaux de charge indépendants en Californie, payants mais fonctionnels, la Suisse est à l’âge de pierre.
Fort heureusement, je trouve ma planche de salut dans un autre garage privé, récent, équipé d’une alimentation électrique moderne et, ce qui ne gâche rien pour les relations de bon voisinage, d’un compteur dédié par place de parque. Ici, la charge démarre gaillardement, mais s’interrompt moins de deux heures plus tard, faute d’avoir sélectionné manuellement un courant suffisamment faible. En la matière, Volvo fait moins bien que la concurrence. En plus de l’absence de câble triphasé, le chargeur est archaïque. Après moult péripéties, je parviens donc à effectuer ma première charge: 10.35 kWh consommés du secteur pour gaver le batterie de 8 kWh utilisables, le reste étant perdu dans le cuivre et l’électronique de charge. Les instruments m’indiquent une autonomie électrique de 50 km alors que je parts sur mon parcours d’essai de plaine, avec quelques gradients modestes, des villages, des zones limitées à 60 km/h, quelques tronçons à 80 km/h et un court segment de semi-autoroute à 100 km/h. Le train arrière électrique de la Volvo fonctionne à satisfaction, sans à-coup ni bruit particulier, mais le couple et la puissance typique modérés sont perceptibles.