Deux petites semaines après notre première prise en main en terres catalanes, c’est en Alsace que nous nous retrouvons pour un nouvel essai piste de la Toyota GT86.
A mon arrivée matinale sur le circuit de l’anneau du Rhin, les GT86 s’alignent en épi. Rapide coup d’œil à la monte pneumatique, les Michelin Primacy des voitures du lancement ont été troqués pour des Dunlop Sport Maxx, à priori plus dans leur élément dans le paddock d’un circuit.
Les présentations et la genèse de l’auto ont déjà été faites, je note juste pour la bonne bouche les valeurs de centre de gravité des étalons de la concurrence, une caractéristique cruciale sur laquelle les constructeurs communiquent peu. Comme évoqué dans notre précédent article, les 460mm de la GT86 la situent avantageusement par rapport aux 482mm d’une Porsche Cayman, et sont assez proches d’une Lexus LFA (445mm), Ferrari 360 Modena (447mm) ou d’une Porsche 911 GT3 (446mm), une Nissan GT-R pointant à 495mm et une Subaru Impreza STI à 534mm. Toyota a mis les petits plats dans les grands. Outre une ribambelle de GT86 et une Lexus LFA en guise de hors d’œuvre, on retrouve une des GT86 ayant participé aux 24H du Nürburgring, une splendide 2000GT et une AE86, auto culte pour les initiés. Attrayant, mais il serait dommage de s’attarder alors que le couvert est mis et le plat principal servi.
Sortie du cadre clinique des stands de salons automobiles, la GT86 conserve une apparence gracile. Pneus étroits, caisse relativement haute, dimensions contenues, la voiture n’a pas la présence agressive et ramassée qu’on retrouve dans d’autres autos du segment. A l’image des jantes, le registre donne plutôt dans l’élégance discrète. La position de conduite est très bonne, avec des baquets qui remontent agréablement sur les épaules. Contact, bouton start, la discrétion du boxer surprend, tout comme la relative mollesse du moteur dans les régimes usuels. Les premiers tours sont consacrés à l’apprentissage du tracé et la familiarisation avec les interfaces. La commande de boîte est très bonne, rapide et précise sur tous les exemplaires testés sauf un, plus rétif, mais c’est surtout la commande d’embrayage qui est perturbante, son point d’attaque prématuré demandant passablement d’adaptation. Dommage car le pédalier est par ailleurs très bien disposé pour le talon pointe.
J’ai un peu galéré avec le contrôle de traction et de stabilité avant de trouver le réglage idéal en enfreignant les aimables consignes de Toyota et débranchant tous les systèmes d’assistance, ce qui ne peut semble-t-il être fait qu’à l’arrêt. Si le mode VSC sport permet quelques amorces de glissades, les assistances électroniques interviennent de manière assez perceptible en freinant indépendamment les roues arrières pour réinscrire la voiture dans une trajectoire orthodoxe. Délivrée du joug de l’ESP, la GT86 dévoile son plus bel atout : un équilibre résolument polisson. Que ce soit en grande courbe rapide ou dans des épingles plus lentes, le train arrière répond à la moindre invitation. A la limite du grip limité offert par des gommes étroites (215/45/17 aux quatres coins), il suffit d’être dans la plage de régime propice pour que la voiture prenne progressivement un angle de lacet modulable à souhait. Le manque relatif de couple devient ici un atout, il n’est pas nécessaire d’être un drift king pour parvenir à contrôler l’angle au volant et au pied droit. Aborder le point de braquage sur les freins amplifierait le phénomène, avec pour résultat des figures de style qui auraient encore moins plu à nos G.O. d’un jour.
Si l’exercice se fait au détriment des temps au tour, il est accessible, suprêmement ludique et devient rapidement le moment culminant de chaque tour. Il est nécessaire – vital – de jouer de la boîte pour maintenir le boxer dans sa plage utilisable, soit entre 5 et 7000 tours, et il n’est pas rare de buter contre le rupteur à 7500 t/min si on ne prend garde au clignotement de la LED qui intervient juste avant. Sans complaisance, le 2 litres boxer est une déception. Il est creux et pointu, sa sonorité indiscernable d’un 4 cylindres en ligne, ses montées en régime dénuées de temps forts, et la puissance spécifique de 100 chevaux au litre n’a rien de renversant. La conduite sur piste a certes tendance à diluer la sensation de performances, mais le manque de couple devrait se faire cruellement sentir en conduite routière. Si Toyota a voulu inciter les acheteurs au recours à des préparations « aftermarket », le but est (malheureusement) atteint. La pertinence de la démarche dans un marché helvétique extrêmement strict reste cependant à prouver, à fortiori sur un groupe atmosphérique où la latitude de modification est plus limitée que sur un moteur suralimenté.
Le freinage est une bonne surprise, l’assistance de la pédale n’est pas dérangeante et l’endurance bonne. En alignant tour sur tour, de légères amorces de fading peuvent apparaître, mais à un stade où la grande majorité des autos de route auront déjà demandé grâce et rejoint le paddock. La direction ne mérite pas autant de louanges, j’ai aimé son tarage et son rapport, mais je goûte moins la relative absence de feeling, surtout lorsqu’on taquine les limites d’adhérence. La voiture communique plus par l’assise du siège que par le volant.
Avec la Toyota GT86, les amateurs de pilotage seront à bonne école, celle d’une propulsion qui enseignera la douceur et la précision nécessaires à la maîtrise de GTs plus puissantes et plus pointues. Du fun ? Sans nul doute ! Facile d’approche, engageante, le comportement joueur est un véritable plaisir sur piste et la voiture semble avoir été signée pour procurer ce genre de sensations. Mais en étant un peu sévère, c’est la seule qualité de série sur la GT86. Présence visuelle ? Option Aeropack (2200 CHF) ou after market. Sonorité et caractère moteur ? After market. Hauteur de caisse ? After market. Jantes ? After market. Cela fait peut-être partie du concept, mais l’addition sera lourde, en sus des 41’900 CHF demandé ce qui place la GT86 en compagnie d’autos plus performantes. Un produit hautement personnalisable, mais qui demande impérativement à être personnalisé, ou du moins pimenté. A défaut il ne reste une auto au comportement routier assez déluré, sympathique, mais qui pourrait cruellement manquer de saveur en dehors d’épisodiques escapades sur piste.
Face à la concurrence
Toyota GT86 | Hyundai Genesis Coupe V6 | Megane Renault Sport Trophy | Mazda MX-5 | |
Moteur | 4 cyl. boxer 1998 cm3 | V6 3778 cm3 | 4 cyl. 1998cm3 turbo | 4 cyl. 1998 cm3 |
Puissance (ch / t/min) | 200 / 7000 | 303 / 6300 | <265 / 5500 | 160 / 7000 |
Couple (Nm / tr/min) | 205 / 6400-6600 | 361 / 4700 | 360 / 3000-5000 | 188 / 5000 |
Transmission | Roues AR | Roues AR | Roues AV | Roues AR |
Boite à vitesses | 6 rapports – manuelle | 6 rapports – manuelle | 6 rapports – manuelle | 6 rapports – manuelle |
RPP (kg/ch) | (6.2) | (5.24) | 5.39 | 7.66 |
Poids DIN (constr.) | (1239) (53% AV/47% AR) |
(1587) | 1430 (1462) 63.1% AV/36.9% AR |
1225kg (1165 kg) |
0-100 km/h (sec.) | 7.6 | 6.4 | 6.0 | 7.6 |
Vitesse max. (km/h) | 226 | 240 | 254 | 213 km/h |
Conso. Mixte (constr.) | (7.8) | (10.3) | 10.8 (8.2) | (7.8) |
Réservoir (l) | 50 | 65 | 60 | 50 |
Emissions CO2 (g/km) | 181 | 246 | 190 | 181 |
Longueur (mm) | 4240 | 4630 | 4299 | 4020 |
Largeur (mm) | 1775 | 1865 | 1848 | 1720 |
Hauteur (mm) | 1285 | 1385 | 1435 | 1245 |
Empattement (mm) | 2570 | 2820 | 2636 | 2330 |
Coffre (L) | 243 | 332 | 377/1024 | 150 |
Pneumatique AV | 215/45/17 | 225/40/19 | 235/35/19 | 205/45/17 |
Pneumatique AR | 215/45/17 | 245/40/19 | 235/35/19 | 205/45/17 |
Prix de base (CHF) | 41’900 CHF | 40’890 CHF | 41’400 CHF | 41’150 CHF |
Prix de base (EUR) | 29’900 € | 37’900 € | 29’850 € | 30’600€ |
Nos remerciements à Toyota Suisse AG pour l’orgnisation de cet événement.
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