Nürburgring Nordschleife – Scuderia Hanseat 2006

J-C Etter


Compte rendu du cours de la Scuderia Hanseat 2006, session d’automne. 

Retour sur la Nordschleife après une première et prudente visite en 2005, au retour de Spa. La Nordschleife, ce n’est pas un circuit, c’est un voyage, une escalade, la via ferrata du bitume, l’Anapurna des sports mécaniques, le St-Jacques-de-Compostelle des damnés de la gomme. Vingt-et-un kilomètres de montagnes russes, d’enfilades rapides, de virages aveugles, de butes traîtres, de changements d’adhérence sournois. Rien à voir avec la monotonie clinique et répétitive des circuits modernes qui vous servent complaisamment les mêmes enchaînements prédictibles toutes les deux minutes ou moins.

A choix, deux solutions pour tourner sur la mythique boucle du Nord.

 

Premièrement, la joyeuse anarchie des Touristenfahrten où tout ce qui est immatriculé (autos, motos, autobus) peut tourner à son rythme pour 15€ par tour, ou une sortie avec location de la piste en exclusivité. Se mêler à la cohue bigarrée des premières est une expérience unique, mais le risque de rouler de concert avec des retraités néerlandais et des bikers suédois est considérable : alcool ou sports mécaniques, évitez les mélanges. La Nordschleife est un circuit aussi magnifique que difficile, traître et DANGEREUX. Les dégagements sont inexistants, surtout en regard des vitesses atteintes, les touchettes sont fréquentes et onéreuses, les accidents corporels graves (surtout, mais pas uniquement, pour les motards) pas rares. Un endroit à aborder avec raison et humilité.

Les sorties privées. La Scuderia Hanseat organise depuis des lustres deux cours annuels sur le Ring. Le but est d’apprendre aux participants une ligne idéale, et accessoirement quelques heures d’accès libre à la piste dans d’excellentes conditions. La piste de Grand Prix et la Nordschleife sont réservés en exclusivité, l’accès à la piste divisé en groupes d’un niveau relativement homogène. A noter que la Scuderia Hanseat n’est pas le seul organisme à louer la Nordschleife, mais c’est sans doute le plus reconnu.

Mercredi 6 Septembre 2006, 12h30, parc touriste, après le purgatoire du cours (désormais obligatoire pour les débutants) de sécurité routière au Fahr Sicherheit Zentrum. Pas inutile en soi, mais peu intéressant pour ceux qui ont déjà suivi un cours analogue. Le sésame est collé sur le pare-brise, il est temps d’aller affronter l’enfer vert. Premier tour prudent, 11’20″ BTG (“Bridge To Gantry”, mesuré du pont Billstein jusqu’à la passerelle à l’entame de la dernièe ligne droite). Deuxième tour, certains repères reviennent : 10’15″. Troisième tour : 9’40″. Ouf ! Jeremy Clarkson sur Jaguar Type S Diesel et Sabine Schmitz sur fourgon Ford Transit sont battus à plate couture par ma pomme sur … Ferrari 550 Maranello. Pas de quoi faire le paon : Auto, Motor & Sport a mesuré la 550 Maranello à 8’07’’ sur un tour complet (BTG plus une vingtaine de secondes). Plaisanterie mise-à-part, il est fortement conseillé d’avoir plus le “funomètre” que le chronomètre à l’esprit.

Jeudi 7 Septembre 2006, 7h40, ligne droite des stands de la piste de GP : un défilé ininterrompu de voitures vient se parquer en épi à leur emplacement désigné. Présence écrasante de Porsche, beaucoup d’Allemands et de Suisses, forte délégation Ferrariste suédoise, mais aussi beaucoup de BMW, Mercedes, Audi, quelques Lamborghini Gallardo. Curieusement, très peu de français. Près de 270 voitures, réparties en douze groupes d’une vingtaine de participants. L’organisation est d’une rigueur toute teutonique, extrêmement ponctuelle. Les groupes prennent un à un le départ pour le site de leur premier exercice. Le but: apprendre à piloter proprement selon ‘la’ ligne Hanseat.

Objectif prioritaire : freinage, point de braquage, point de corde, point de sortie. Propre, fluide, élégant. Plusieurs instructeurs respectent à l’envi que l’art du Nürbrugring, c’est de tourner le volant le moins possible. La vitesse est secondaire et vient naturellement dès que la trajectoire est comprise. La courbe Dunlop et neuf sections de la Nordschleife sont la base de notation pour l’examen du Samedi où 24 commissaires mettent chacun une note allant de 1 (idéal) à 9 (exécrable) en passant par 5 (satisfaisant). Les experts parviennent à une trentaine de points ; les pilotes chevronnés se situent dans une fourchette allant de 60 à 80 points ; un débutant peut s’estimer satisfait avec une petite centaine de points.

Vidéo

Guide pratique

Le matos

Même si le plateau regroupe beaucoup de très belles voitures, ne pas confondre ramage et plumage. Il n’est pas nécessaire d’avoir une Porsche GT3 pour prendre plaisir sur le Ring, ni pour réussir son examen. Pour preuve, les deux gagnants du cours d’été 2006 pilotaient respectivement une Opel Kadett GTE et une BMW 635CSi à boîte automatique ! Précautions habituelles: pneus, plaquettes et disques de frein en très bon état. Circuit de freinage purgé avec fluide racing de préférence. Casque obligatoire, jet ou intégral. Manomètre de pression de pneus. Livret ETI ou équivalent en cas de rapatriement.

Logement

Les possibilités sont multiples dans la région, avec de nombreux hôtels/pension à des tarifs divers. La Scuderia Hanseat propose un service de réservations au Novotel Dorint. Confortable (4 petites étoiles), cher (110€ pendant le cours, 145€ avant ou après), mais pratique car situé à 2-3 minutes du paddock et disposant d’un parking sous-terrain.

Itinéraire

Les sites de planification d’itinéraires (Viamichelin, Google) ou les systèmes de navigation GPS essayent d’être plus intelligents qu’ils n’en sont capables dans le but, théorique, de vous faire gagner quelques kilomètres ou minutes sur un trajet de plus de 600km. Depuis la Suisse, Bâle, A5, A6, A61, sortie Nürburg. Laissés de côté les conseils ‘bienveillants’ de prendre par Strasbourg ou couper par-dessus le Rhin à Karlsruhe : perte de temps. Plusieurs opportunités de rouler à de bonnes moyennes jusqu’à Mannheim, limitation implacable à 130 ensuite.

Les bons plans

Faire le trajet le mardi, retirer son dossier au bureau de la Scuderia dans le paddock avant 17 heures. Mercredi matin, le cours de conduite au Fahr Sicherheit Zentrum (FSZ) est désormais obligatoire pour obtenir son sésame d’accès à la piste, un purgatoire de 2h30, surtout pour ceux ayant déjà participé à un cours similaire avec le TCS ou autres. Ensuite, accès libre à la Nordschleife pour le reste de la journée, ouverte au Touristenfahrer, mais avec une affluence moindre par rapport à la méga-foule d’un week-end. Faire un arrêt par Spa: distant de 120km, trouver une solution pour rouler à Francorchamps est une opportunité à ne pas négliger.

Mai ou Septembre ?

Selon les vétérans, le cours de Septembre est un peu moins fréquenté, et la probabilité d’une météo clémente est supérieure. Selon les ancêtres, le temps peut être exécrable dans l’Eiffel. Pluie, froid, brouillard, neige voire grêle ne sont pas exceptionnels. Les variations de températures peuvent être considérables dans une journée, donc prévoir des habits chauds et imperméables.

Une seule trajectoire ?

Question pertinente d’un des participants : est-ce que les trajectoires enseignées conviennent à toutes les voitures ? Réponse évasive de l’organisation : la ligne enseignée est la plus sûre. A mon sens, la trajectoire est plus adaptée aux voitures puissantes, alors que d’autres gagneraient à adopter une ligne géométrique pour conserver plus de vitesse en courbe.

La Steilstrecke

Ce raccourci du Karrussell relie le virage de Klostertal et Hohe Acht, évitant le détour par le fameux Karrussell.

Emprunté aujourd’hui à la descente par la Scuderia Hanseat pour exercer les trajectoires en boucle sur le secteur Karrussell – Hohe Acht, on raconte qu’il fut une fois utilisé à la montée dans les années 30 par Hans Stuck Senior au volant d’une Auto Union pendant les qualifs d’un Grand Prix. On raconte qu’un commissaire de piste fut soudoyé pour ouvrir les barrières métalliques avant son passage, permettant à Stuck de gravir à toc la pente de 27%, battre le record du tour et dégoûter ses adversaires.

Budget

Douloureux. Compter :

Total : pas loin de 6000 CHF pour 4 journées.

Le budget peut considérablement s’alourdir en cas de rencontre avec les glissières de sécurité qui seront remplacées à vos frais : une centaine d’euros par mètre linéaire, à doubler ou tripler selon l’habillage de l’endroit. Sortir au Ring, c’est  au minimum 2000€ de glissières avant même de lancer un regard douloureux vers la carrosserie meurtrie de votre auto.

Liens

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