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Essai Toyota GT86: it’s gone 86

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Premier contact avec la Toyota GT86 sur les routes de Catalogne et sur piste. 

Quelques semaines auparavant, au moment où j’apprends que je vais avoir la chance de couvrir le lancement suisse de LA voiture que j’attends le plus en cette année 2012, me revient en tête l’entrainante chanson de Pet Shop Boys – New York City Boy – dans laquelle figure l’expression. Exclusivement américaine et propre au jargon de la restauration, « it’s gone 86 » signifie que tel ou tel plat n’est plus disponible au menu. Suite aux consécutives disparitions de la Supra, puis de la Celica, puis de la MR2, le catalogue sportif de Toyota s’était petit à petit amenuisé jusqu’à devenir inexistant. Regrettable, compte tenu des qualités respectives des modèles concernés, qualités qui avaient été sublimées au travers du temps par les diverses maisons de tuning, comme le veut la tradition japonaise. Il y a presque trente ans, c’est cette même culture du tuning qui fit arriver à pleine maturation celle qui allait devenir emblématique d’un sport alors illégal et qui allait révéler le jeune et inconnu Keiichi Tsuchiya : la Corolla AE86.

Le bien-nommé « drift king » est à cette époque plus un street racer qu’un professional driver. Comme nombre d’autres amateurs, en journée il bichonne sa voiture et perfectionne sa technique de base ; le soir, c’est la compétition. Elle se déroule de façon informelle sur les désormais célèbres « touge » (à prononcer tôô-gué), routes de montagne en japonais. Il s’agit la plupart du temps d’un duel, avec des règles qui peuvent varier de façon infime, mais qui vont habituellement dans ce sens :
– Départ en roulant, voiture l’une derrière l’autre, la course débute lorsque la voiture leader entre dans la première courbe.
– A la sortie de la dernière courbe, si le conducteur qui avait démarré devant finit avec une avance de plus d’une voiture et demie, il gagne.
– A la sortie de la dernière courbe, si le conducteur qui avait démarré derrière finit devant, il gagne.
– A la sortie de la dernière courbe, si le conducteur qui avait démarré derrière finit dans une marge d’une voiture et demie, une autre course doit déterminer le vainqueur.

Symptomatique de l’esprit régnant sur les lieux, on attribue à Tsuchiya cette phrase marquante : « Les vrais hommes font la course en descente ». Certes, rien n’empêche de concourir dans la montée, mais lorsque l’adversaire est valeureux et qu’on veut lui faire honneur, la course doit se dérouler en descente. Doubler dans ces conditions relève dès lors de la prouesse et comporte bien entendu énormément de risques, avec notamment la possibilité de finir en bas, beaucoup plus bas, ou sculpturalement encastré dans un arbre ou une glissière, à choix.

S’inspirant des techniques des pilotes professionnels, les amateurs découvrent qu’il y a moyen de conserver une haute vitesse dans les courbes si l’on maîtrise la voiture en glissade. C’est dans ce contexte que le drift en tant que sport à part entière prend ses racines et ici-même que l’AE86 fera merveille. Légère (sous la tonne), propulsion, avec un rapport poids-puissance favorable (moteur entre 115 et 140 chevaux), c’est surtout son équilibre qui fera et fait encore d’elle une voiture extrêmement recherchée.

Effectuons une avance rapide de vingt ans et nous nous retrouvons au milieu des années 2000 où l’obsession du “green” a sonné le glas du véhicule de plaisir sur l’archipel nippon ; des icônes du drift telles que les 200SX, RX7, Soarer ou même Skyline GTS (préférées aux GTR car propulsion au lieu de 4×4), il ne reste rien. Si l’on veut être bien vu, il faut désormais communiquer non plus sur la sportivité mais sur la propreté, la réduction des émissions devient le maître-mot. Enfin, pas tout à fait…

2006, dans les cerveaux d’ingénieurs de Toyota et de Subaru (qui ont formé une alliance un an auparavant) germe une idée : collaborer sur une réalisation qui comblera le vide laissé par les défuntes voitures de sport simples et accessibles. Deux ans plus tard, le projet FT-86 est bien en route. Le cahier des charges est précis :
1) Moteur avant avec transmission aux roues arrière.
2) Pas de turbo.
3) Centre de gravité extrêmement bas.
La voiture doit être légère (cible à 1’200kg) et communicative aussi bien sur route que sur piste, mais par-dessus tout, le leitmotiv qui gouverne en dictateur impérieux l’ensemble du projet s’inscrit en trois lettres : FUN !

Ce sont ces trente années d’histoire de l’automobile japonaise que je me remémore sous l’éclat de ce brillant soleil levant du 25 mai, alors que mon regard se pose enfin sur celle à qui incombe le fardeau de se montrer la digne héritière d’une lignée quasi éteinte. La GT86 mérite-t-elle de reprendre le flambeau de la « drift car » accessible ? Peut-elle raviver la flamme du sport au sein de Toyota ?

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Quelques minutes plus tôt, à mon arrivée à l’aéroport de Barcelone, j’ai été pris en charge, ainsi qu’un autre confrère, par une assistante de chez Toyota qui nous a expliqué le planning de notre journée après nous avoir offert un petit déjeuner. Notre but premier est de rallier le mystérieux (je n’avais alors rien trouvé sur Internet) Park Motor Racing Track avant midi. Des trois itinéraires qui nous sont proposés, nous choisissons évidemment le plus long, ce qui nous vaudra une charmante balade d’un peu plus de 150 kilomètres au travers de paysages variés rappelant beaucoup le sud de la Provence.

Quittant l’aéroport, alors que mon confrère est au volant, un premier constat s’impose rapidement sur l’autoroute : la suspension est relativement souple. Pour l’instant, je ne sais si je dois être déçu ou non, mais avant de vouloir du sport à tout prix, je reconsidère le fait que la voiture a été conçue afin d’être utilisable aussi bien en tant que voiture plaisir qu’en tant que voiture quotidienne – son habitabilité et ses dimensions compactes, ainsi que sa relative frugalité (l’ordinateur affichera un 9.6 L/100km au terme d’une journée bien sportive) l’autorisent à porter cette étiquette.

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