Chamboulement du paysage industriel automobile.
Les groupes BMW et Daimler ont annoncé ce matin avant l’ouverture des marchés financiers leur intention de fusionner. DeuMo, la nouvelle entité ainsi formée, devient le premier groupe de mobilité mondial par son chiffre d’affaire, devant les groupes Toyota et VW.
Les grands groupes généralistes conservent une avance confortable en termes de volumes mais dans des catégories à la rentabilité moindre.
DeuMo, l’acronyme de Deutsche Mobilität, ne sera ni basé à Stuttgart, siège de Daimler, ni à Münich, siège de BMW, mais à Berlin. Dieter Zetsche a déclaré à Reuters: “DeuMo n’est pas un groupe automobile, c’est un groupe de mobilité, dont l’automobile est un des secteurs forts, mais pas le seul”. Echaudé par la catastrophique fusion entre Daimler et Chrysler, conclue en 1998 et démantelée par Zetsche en 2007, un soin particulier semble être porté à l’intégration culturelle des deux entreprises.
Le choix de Berlin n’est pas un hasard dans la mesure où le car sharing y est fortement développé. Harald Krüger a déclaré: “Notre industrie fait face à des défis sans précédent: les coûts de l’électrification, la baisse de l’intérêt des jeunes pour l’automobile, les sanctions CO2 pour n’en citer que quelques uns. L’ère du business-as-usual appartient au passé”.
Si la fusion est approuvée par les actionnaires et les autorités anti-cartellaires, Zetsche devrait hériter de la Présidence du Conseil d’Administration et Krüger du poste de CEO.
Un rapprochement inéluctable
Les signes d’un rapprochement étaient déjà tangibles: partenariat sur des services de car sharing le 22 Février, accord de collaboration technologique sur la conduite autonome le 28 Février. Un mois plus tard, c’est la fusion des deux groupes qui est la suite logique.
Les deux géants allemands ont également vu leurs marges opérationnelles chuter violemment en 2018 (-18% pour Mercedes, -21.6% pour BMW), un phénomène également constaté chez Audi (-24.4%). Les leaders du marché de luxe n’ont plus qu’une année de répit relatif avant que les nouvelles cibles CO2 à 95 g/km n’entrent en vigueur en 2020. Des cibles qui pourraient coûter des milliards aux constructeurs premium et sérieusement rogner les marges sur les voitures à propulsion classique.
S’ajoutent à ces pressions les effets de l’électrification. Des coûts de développement et d’industrialisation redoutables, et des marges encore plus faibles, surtout dans berlines compactes et de taille moyenne sur lesquelles Daimler et BMW font le gros de leurs volumes. Les économies d’échelle sur les investissements de R&D, d’industrialisation et d’achat sont une question de survie. BMW a investi tôt des sommes faramineuses dans les BMW i et se retrouve désormais à la traîne dans son offre de SUVs et berlines électriques, loin derrière Jaguar (i-Pace), Audi (e-tron) et Mercedes (EQC).
BMW et Daimler font également face à des concurrents formidables. Le groupe VW et le groupe Toyota sont bien plus grands en volume et peuvent amortir leurs développements sur d’énormes volumes. Ceci est valable pour l’électrification, mais aussi la conduite autonome, dont la maîtrise effective pourrait, à long terme, être cruciale.
Le groupe Deumo fonctionnera comme une holding. Les différentes marques du portefeuille comme Mercedes et BMW vont subsister avec leur identité propre, un peu à la manière de Porsche et Audi, Mercedes prenant une orientation plus lifestyle et BMW renforçant son positionnement sportif. MINI et Rolls Royce subsisteront également, mais Smart est clairement sur la sellette et pourrait être revendu à Geely, tel que déjà esquissé avec le repositionnement de la marque sur la Chine. L’avenir de Maybach n’a pas été évoqué, les analystes s’attendent à une disparition à terme.
Et maintenant ?
Cette fusion intervient dans un contexte de grandes manoeuvres. Le groupe PSA cherche à diminuer sa dépendance au continent européen en relançant Peugeot en Amérique du Nord, une tâche herculéenne sur laquelle le groupe Fiat Chrysler s’est cassé les dents avec des produits Alfa Romeo pourtant plus adaptés aux attentes des consommateurs américains. Un FCA qui cherche également un partenariat pour l’aider à porter le fardeau constitué par les besoins de développement pour Alfa Romeo et Maserati.
Côté produits, il faudra un cycle soit 5 à 7 ans pour déterminer si DeuMo délivre les avantages compétitifs attendus. D’ici là, l’élimination de doublons entre Münich et Stuttgart pourrait être douloureux en matière d’emploi. Douloureux mais sans doute nécessaire.
Cet article est un poisson d’Avril. Les données quantitatives sont correctes mais nous n’avons aucune connaissance de plans de fusion entre Daimler et BMW.
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