Essai Maserati Levante: nécessaire

Maserati Levante: un SUV nécessaire mais pas suffisant.

Le premier SUV de Maserati a longtemps été une arlésienne. Les plans plus ou moins solides de lancer un crossover Maserati datent en effet de 2003. Un concept refait son apparition en 2011 au salon de Francfort, toujours sous l’appellation Kubang, avant que la dénomination finale soit annoncée à l’automne 2012: Levante. Le SUV est un des piliers supportant un plan de croissance extrêmement ambitieux. De 7195 unités en 2011, Maserati doit croître à 40’000 unités en 2014 grâce à la nouvelle Quattroporte et surtout à la Ghibli, puis atteindre entre 55’000 à 60’000 en 2015 après le lancement du Levante à l’automne 2015. Décupler en 4 ans, l’objectif est ambitieux.

La version de production du Levante est présentée avec six mois de retard en février 2016, et est incontestablement une des vedettes au salon de Genève 2016. Si l’on reconnaît certains traits de style avec les premiers concept, beaucoup a changé, que ce soit la face avant ou la découpe du bouclier arrière. Autre changement d’importance, l’assemblage, initialement envisagé à Detroit, se fera dans l’usine de Mirafiori, près de Turin. Le plan de croissance n’a pas été atteints (les 31500 unités vendues en 2015 sont presque inférieures de moitié aux objectifs), mais Maserati dispose désormais d’un produit pour compléter sa gamme GranTurismo vieillissante et ses nouvelles berlines.

Esthétiquement, le Levante fait forte impression. Une calandre béante, formidable, encadrée d’optiques fines donnent un regard sévère au SUV qui se marie à ses dimensions imposantes: 5 mètres en longueur, 1.97m en largeur. Et cette perception d’un gabarit massif ne s’estompe pas lorsqu’on s’installe au volant. Les arêtes du capot soulignent l’empreinte au sol conséquente et me font immédiatement regretter l’absence de caméra périphérique (CHF 1209 en option) dans la configuration.

L’habitacle est par ailleurs plaisant, baigné de lumière par le toit panoramique. La sellerie en cuir étendu à deux tons est de belle facture, le ciel de toit en Alcantara donne une touche premium bienvenue. La disposition des divers équipement a des similarités avec la Ghibli, mais a évolué dans de nombreux détails: le tableau de commande de la climatisation est nouveau, les boutons de commande du système multimédia ont migré sur la console centrale. J’éprouve un peu de peine à trouver une position de conduite adaptée, la jante du volant venant entraver ma vision sur les coins du combiné d’instruments.

Le Levante est disponible avec trois motorisations: deux versions du V6 biturbo de 2979 cm3 (500 Nm/350 ch et 580 Nm/430 ch) et un turbodiesel de 600 Nm/275ch. Un cafouillage logistique a voulu qu’en lieu et place du Levante S requis, je me retrouve au volant du turbodiesel. Cette unité de VM Motori est une évolution de l’A630 DOHC qui officie dans le groupe Fiat Chrysler Automobiles, nous l’avions testée sur la Lancia Thema en 2012 dans sa version 239 ch/550 Nm. Et sans trop de (bonne) surprise, les prestations de ce V6 n’ont guère évolué, malgré le gain de 50 Nm et 36 chevaux.

 

En quelques hectomètres, le 3.0 litres turbodiesel confirme mes craintes. Rugueux à froid comme la plupart de ses congénères, c’est surtout une impression de pesanteur qui domine. Les turbodiesels donnent souvent l’impression de mouliner sur les premiers intermédiaires, mais cette sensation est ici amplifiée par la mollesse des accélérations et la gestion spongieuse de la boîte ZF à 8 rapports. Le poids conséquent (2346 kg vérifiés) ne facilite en rien la tâche du binôme moteur-boîte.

Maserati annonce le Levante S 96 kg plus léger que le Levante Diesel, une différence à mettre au passif du V6 de VM Motori. La seule qualité qu’on peut lui reconnaître est une relative sobriété, j’ai relevé 8.26 L/100km, en ligne (ce qui est rare) avec les 8.3 L/100 km revendiqués par l’ordinateur de bord. Autant l’affirmer d’emblée, le choix de cette motorisation ne peut se justifier que pour un très gros rouleur qui ne quitte guère l’autoroute. Et si la facture de carburant justifie de tels sacrifices, le choix d’un gabarit plus économe en carburant relève de la simple logique.

 

 

Une fois lancé à vitesse de croisière, le Levante offre un confort très décent. L’isolation phonique est bonne, assistée par le double vitrage latéral. Maserati fait grand cas de sa suspension pneumatique à hauteur de caisse réglable, le point principal étant qu’elle s’abaisse de 20mm au-dessus de 130 km/h. Le confort n’en souffre pas pour autant, et même en mode sport, l’amortissement reste typé confort et ne paraît jamais vraiment ferme. Les sièges sont trop larges, rendant leur rembourrages latéraux inopérants (à moins d’avoir une carrure bien enrobée) et donnent l’impression d’être perché sur un rembourrage central assez proéminent.

La vue de profil trahit les choix de packaging faits par Maserati. Le compartiment moteur est long et, capot soulevé, montre que le moteur a été reculé le plus possible pour diminuer le porte-à-faux. L’habitacle est donc reculé par rapport à l’empattement, ce qui impose quelques compromis sur la répartition des volumes. Les places avant sont bien dotées de ce point de vue, mais l’espace dévolu aux places arrière est un peu plus chichement compté. Il reste confortable dans l’absolu, mais est nettement plus compté que dans un Q7 par exemple: il y a beaucoup moins de place aux genoux, l’assise pourrait être plus profonde et la garde au toit juste suffisante du fait d’un renflement sans doute lié au mécanisme de toit panoramique ouvrant. Le même constat peut être fait au sujet du coffre dont les 580 litres paraissent bien chiches: un X5 offre 650 litres, et le Q7 pas moins de 805 litres. Le Levante est un SUV full size à l’extérieur, mais ses dimensions ne bénéficient pas à l’habitabilité intérieure.

Par acquis de conscience, je me suis aventuré sur un chemin pentu en sélectionnant le mode off-road. Le Levante s’est acquis de la tâche avec une relative diligence, mais l’aisance palpable d’un Land Rover Discovery dans ce type d’exercice n’est pas flagrante. Le diamètre de braquage et la gestion de la traction sont les indicateurs de capacités sans doute largement suffisants pour la plupart des acheteurs, mais plus limités que certains concurrents.

Je confesse avoir moins exploré les recoins du comportement sportif de ce crossover Maserati. La nature et les prestations de la motorisation et de la transmission en font un exercice contre-nature. L’équilibre à la limite d’adhérence des Pirelli Scorpion parait sain, nettement plus sain que les contraintes ressenties par mes muscles dorsaux, faute de maintien adéquat des sièges. J’ai trouvé le châssis serein sur autoroute déformée, en nette amélioration par rapport à la Ghibli. Les pneus en série 40 y contribuent peut-être. Le système multimédia m’a généralement donné satisfaction, malgré sa fâcheuse tendance à sélectionner la radio comme source par défaut à la mise du contact plutôt que mon smartphone via bluetooth.

Impossible de conclure ce compte rendu d’essai sans mentionner quelques aspects qui font tache. La climatisation de cet exemplaire semblait souffrir d’une sonde de température mal calibrée, situant une température agréable (normalement 22-23 degrés selon mon habitude) à 19 degrés celsius, avec des courants un peu erratiques d’air chaud ou d’air froid.

La transmission souffrait également d’un jeu perceptible occasionnant des à-coups en roulant sur un filet de gaz. Ce sont des défauts singuliers sur un véhicule aussi peu kilométré. J’ai également pesté contre le sélecteur de marche à impulsion. Ce genre de mécanisme me donne pleine satisfaction chez BMW, Audi ou Jaguar, mais cette exécution est désagréable et imprécise. L’unique commodo est d’une ergonomie très discutable, rendant par exemple le commutateur d’essuie-glace arrière inaccessible. Des détails, me direz-vous, mais qui constituent une entrave parfois irritante au quotidien.

 

Pour atteindre des objectifs de croissance ambitieux, Maserati ne peut pas se contenter d’être présent dans les segments de marché en vogue. Face à une concurrence tenace, il faut à la fois exceller et se différencier. Ce dernier élément est présent dans le Levante, tant dans le design intérieur et extérieur qui changent de l’austérité allemande et peuvent séduire les amateurs du style.

L’excellence est une conclusion plus difficile à atteindre. Il est possible que le Levante délivre une prestation dynamique plus convaincante en version S essence, mais l’équation pondérale reste problématique, même avec les 96 kg d’allègement promis. Si le prospect attend de la Levante le croisement idéal entre une rigueur allemande un peu ennuyeuse et un chic transalpin charmeur, la déception risque d’être au rendez-vous.

Prix et options du véhicule essayé

Maserati Levante Diesel CHF 77’150 € 73’200
Pack Luxury CHF 5’189 N.D.
Jantes 21″ Anteo CHF 5’105 € 4’840
Système audio Bowers & Wilkins CHF 4’725 € 2’760
Intérieur tout cuir CHF 3’812
Pack Business Plus CHF 2’836 € 3’731
Pavillon en alcantara CHF 2’117 € 1’527
Pack assistant conducteur plus CHF 1’950 € 2’823
Toit panoramique CHF 1’688 € 1’512
Peinture Mica CHF 1’502  –
Finitions Ebano CHF 1’485 € 1’321
Ventilation de siège avant CHF 1’080 € 957
Système d’alerte d’angles-morts CHF 700 € 705
Pack Accès Facile CHF 655 € 655
Caméra de recul CHF 484 € 484
Colonne de direction réglable CHF 454 € 403
Chauffage de siège arrière CHF 403  –
Palettes «Active Shifting» CHF 341 € 302
Prix catalogue du véhicule de test CHF 111’676 € 97’903

 

Face à la concurrence – caractéristiques techniques

Maserati Levante Diesel Audi Q7 TDI  BMW X5 xDrive30d
Moteur V6 turbodiesel 2987 cm3 V6 turbodiesel 2967 cm3  L6 turbodiesel 2993 cm3
Puissance (ch / t/min) 275 / 4000 272 / 3250-4250  258 / 4000
Couple (Nm / tr/min) 600 / 2000-2600  600 / 1500-3000 560 / 1500-3000
Transmission Q4 Quattro xDrive
Boite à vitesses ZF 8 Tiptronic 8 Steptronic 8
RPP (kg/ch)  8.5  (7.33)  ()
Poids DIN (constr.) 2346 (2205)
52.4% AV 47.6% AR
 (1995) (2070)
0-100 km/h (sec.) 6.9 6.3 6.8
Vitesse max. (km/h) 230 234 230
Conso. Mixte (constr.) 8.26 (7.2)  (6.4) (5.9)
CO2 (g/km) 189 168 156
Réservoir (l) 80 85 85
Longueur (mm) 5003 5052  4886
Largeur (mm) 1968/2158 1968/2212 1938/2184
Hauteur (mm) 1679 1741 1762
Empattement (mm) 3004 2994 2933
Coffre (L)  580 805/1990 650/1870
Pneus 255/60R18 255/60 R18 255/55R18
Prix de base (CHF) 77’150 80’200 78’300
Prix de base (EUR) 73’200 66’380 70’050

Nos remerciements à Maserati Suisse pour le prêt de ce Levante.

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