Essai longue durée Porsche 997 GT3: verdict sur 30’000km

La pistarde à l’épreuve de la route et de la piste.

La Porsche 997 GT3 est reconnue comme l’une des meilleures GT à vocation pistarde, mais quid de la fiabilité et des coûts d’utilisation et entretien réels d’une telle voiture ?

La reine des sorties club se révèle-t-elle docile ou capricieuse sur la durée ? Des éléments de réponse dans notre essai longue durée, chiffres à l’appui. Cet article est construit comme un journal, celui de l’acheteur d’une 997 GT3 neuve en Décembre 2007, sa découverte et son utilisation sur la durée, sur route et sur circuit.

Samedi 15 Décembre 2007 – 248km – Préliminaires

Trouver une 997 GT3 au crépuscule de la production du modèle relevait de la gageure. En trouver une à un tarif raisonnable dans un marché où la surenchère est institutionnalisée par les concessionnaires sous l’ombrelle des lois anti-cartels était illusoire, mais un petit coup de pouce du destin m’a permis de trouver l’oiseau rare et de faire de brefs adieux à ma 996 Turbo. Dans ces conditions, pas moyen de faire la fine bouche au niveau des options : cuir complet (un abus de langage, l’habitacle est truffé d’alcantara), sièges adaptatifs et chauffants, sound package « plus », ceintures de sécurités jaunes, couvre moyeux en couleur et tapis de sol. Ni navigation, ni PCCB, ni Xénon. Une GT3 presque ascétique, ainsi soit-il.

Sur les premiers kilomètres, l’embrayage frappe par sa dureté, un énorme contraste avec la Turbo et une réminiscence inquiétante de ma 996 Carrera, mais après une après-midi, la pédale s’est adoucie et mon jarret gauche s’est musclé. La boîte est virile mais évite la dureté ridicule du sport shift kit de la 996 Turbo, avec des débattements courts et une sensation de friction mécanique qui se démarque d’une 997 Carrera. Les sièges adaptatifs offrent un très bon maintien – enfin ! – et permettent d’ajuster le soutien du torse et des jambes à ma morphologie de phasme. La direction est réglable en hauteur, mais pas en profondeur : c’est une option !

En dehors de la photogénie de la GT3 dans sa livrée Speed Yellow, la révélation de cette journée est  sans doute le « toucher de roues » remarquable de l’auto, le meilleur qu’il m’a été donné de ressentir. La GT3 apparaît immédiatement gracile, légère mais incisive, dénuée d’inertie et de roulis. Dans les enchaînements de courbes de la route 84 menant de la baie de San Francisco à l’océan pacifique, le soleil de décembre perce avec peine les forêts de conifères, et la 997 s’effeuille un peu plus à chaque changement d’appui. Suggestive mais encore pudique, charmante sans être aguicheuse.

En mode normal, la suspension PASM est dure mais pas sèche, et offre un excellent compromis entre confort routier et atténuation des mouvements de la caisse. Des amorces de pompage diagonal sont cependant perceptibles sur des compressions en milieu de courbe, invitant à passer en mode sport. La consigne de rodage (3000 km sous 4200 t/min selon le manuel) sera scrupuleusement respectée, je n’ai pas encore dépassé 3500 tours, mais les harmoniques apparaissant dès 3000 t/min sont la promesse d’une symphonie pour flat-6 sur les 5000 tours restant jusqu’à la zone rouge. La réponse sur un filet de gaz semble cristalline et volontaire.

Avec un moteur, des freins et des Pirelli PZero Corsa à rôder, il est encore bien trop tôt pour aller explorer sur circuit une enveloppe de comportement qui doit être aussi riche de contenu que l’Iliade, l’Odyssée et l’Encyclopedia Universalis réunis, mais cette mise en bouche place la 997 GT3 avec aise à la hauteur de sa réputation élogieuse.

Mercredi 2 Janvier 2008 – 2092 km – Bye bye rodage

Le rodage touche à sa fin, j’ai graduellement augmenté les régimes sur les intermédiaires à 4, puis 5 puis maintenant 6-7000 tours en interpolant les 8500 t/min de la zone rouge à 3000 km, toujours en prenant soin à ce que l’huile soit toujours en température. Ce pèlerinage initiatique m’a permis de découvrir une spécificité de la GT3 : son échappement.

A l’instar de l’option Porsche Sport Exhaust (PSE) sur les Carrera, la GT3 dispose d’un échappement actif avec des valves pneumatiques qui modifient l’acoustique des marmites. En conduite normale, les valves commutent brutalement vers 4100 tours, régime qui coïncide avec une accentuation de la courbe de couple et donne l’impression d’un coup de pied au popotin assez artificiel. En termes d’onomatopées, la note d’échappement passe du vuuuu au boooo, sans passer par le brrraaa sympathique des vieux moteurs à air et de la 996 Carrera. Appuyez sur la touche « Sport » et la tonalité au ralenti change, probablement pour faire une démo au passager, puis repasse en mode muet jusqu’à environ 3000 tours. De vuuuu boooo, on passe donc à boooo vuuuu boooo, avec des seuils de transition aussi secs que Laurence Boccolini un jour de migraine. La touche Sport influe également sur le contrôle de traction (voir plus bas) et – selon le manuel – la cartographie, mais je n’ai encore ressenti aucune différence. Un gadget de blaireau, Porsche ne déroge malheureusement pas à la règle.

L’alternative – radicale – est la déconnection pure et simple du circuit de commande du solénoïde, facilement accessible en ouvrant le capot moteur. Les valves s’en trouvent constamment ouvertes, avec une désagréable résonance entre 2000 et 2800 tours, un bourdonnement qui me rappelle les silencieux Tubi de ma 550 Maranello. Le mode Sport semble donc être le meilleur compromis, il est juste dommage que l’ouverture des papillons soit binaire, et non pas progressive.

Les freins se sont rapidement mis à couiner comme Alice Sapritch devant un four sale, spécifiquement à l’arrière (les freins, pas Sapritch). Irritant car systématique à chaque Stop, la seule alternative étant de piler net, recette imparable pour faire la connaissance postérieure d’un conducteur de SUV distrait par les formes sculpturales de l’aileron. Encore pire en manoeuvrant en marche arrière, la voiture fait un bruit de train de marchandises, il ne manque que le klaxon à vapeur. Selon le concessionnaire, l’ère des graisses au cuivre est révolue, il n’y a strictement aucun lubrifiant entre les plaquettes et les étriers sur les Porsche contemporaines. Reste à attendre de pouvoir soumettre le cas à la sagacité des techniciens de Porsche North America à Atlanta. La lecture de forums spécialisés indique que le problème n’est pas isolé, ce qui n’est en rien la garantie d’une résolution. Affaire à suivre.

 

J’aime beaucoup la route 9 entre Santa Cruz et Saratoga. Les premiers kilomètres sont souvent encombrés de trafic, mais après avoir traversé quelques villages oubliés et trailer parks pouilleux, la route devient déserte, serpentant dans la forêt pour rejoindre Skyline Boulevard. Le revêtement est excellent et certaines épingles se reserrent, mettant en relief le grip du train avant. Malgré la température fraîche, les Pirelli PZero Corsa offrent une adhérence considérable. Le volant requiert de la poigne pour tenir la voiture en appui, un effort facilité par le maintien offert par les sièges adaptatifs. Des sièges adaptés, c’est un peu la combinaison anti-G du gentleman driver : ça assure que le sang remonte de la région sub-abdominale au cerveau quand on roule vite.

J’aime encore plus la Pacific Coast Highway depuis Carmel vers le sud, une route somptueuse, des paysages magnifiques, une centaine de kilomètres de virolets sans la moindre intersection. Parfois lisse comme un billard, parfois fortement déformé par les incessants glissements de terrain. Une foultitude de points de vue sur les falaises plongeant à pic sur l’océan.Désert en semaine, bondé le week-end. Un terrain idéal pour ausculter les aptitudes routières de la patiente. Et quelles aptitudes ! Le grip est phénoménal si on prend la peine de rentrer fort sur les freins, l’agilité digne d’un lémurien sautant de liane en liane. Un décor de carte postale, un soleil radieux, un des sommets de la production automobile contemporaine, que demande le peuple ?

Comme prévu, la garde au sol au bouclier avant s’avère problématique. La moindre rampe d’accès requiert une approche diagonale et circonspecte, et malgré ces précautions, il est parfois impossible d’éviter le contact. Un réel handicap en utilisation de loisirs. Fort heureusement, la lèvre est en plastic souple et peut être considérée comme un consommable. L’instrumentation est assez complète, le voltmètre de la 996 étant avantageusement remplacé par une jauge de température d’huile. L’affichage multifonction inclut une mesure de la pression des pneus dont la précision reste à établir. Il ne s’agit cependant pas du système inepte de comparaison de la circonférence qu’a notamment utilisé BMW sur les M3 E46, mais bel et bien de capteurs de pression intégrés à chaque jante. La mesure se fait environ toutes les minutes.

La 996 GT3 était dépouillée de toute assistance au pilotage (à part l’ABS) ; la 997 hérite d’un contrôle de traction (TC) à deux niveaux : un mode normal, un mode plus permissif lorsque la touche ‘Sport’ est sélectionnée, et la déconnection totale. Celui-ci n’agit que sur le couple moteur et les freins arrière, il ne s’agit donc pas du Porsche Stability Management (PSM) équipant de série le reste de la gamme 911. Le rodage moteur est peu propice à l’exploration du comportement du bidule, mais l’intervention du TC en mode normal est très perceptible, aussi binaire qu’un ASR Ferrari pré-F430.

Côté finition, qualité de matériaux et assemblages, le progrès par rapport à la série 996 est considérable, même si la voiture a malgré tout quelques rossignols, un tsk tsk à l’arrière droite, particulièrement perceptible dans les appuis à gauche, et un dzz dzz à l’avant gauche sur mauvais revêtement. Difficile à comprendre pourquoi Porsche ne parvient pas, malgré ses progrès, à fabriquer des habitacles exempts de tous reproches. Tout aussi incompréhensible est la récurrence des problèmes de fuites d’huile au niveau du Rear Main Seal (RMS) sur les 997 GT3 et GT3 RS, les forums spécialisés comptent déjà de nombreuses anecdotes sur des voitures quasiment neuves qui perdent de l’huile. Je vais donc scrupuleusement observer le sol de mon garage.

6 juillet 2008 – 6114 km

 

La clémence de l’hiver nord californien m’a permis de placer la GT3 dans son habitat de prédilection : la piste. Première étape : Infineon Raceway, au nord de San Francisco, au pays du Cabernet Sauvignon et de la course automobile. Un circuit intéressant, technique, vallonné et varié, mais qui pardonne autant les erreurs que l’ascension de gratte-ciels à mains nues. Des dégagements nuls, des murs aussi blancs qu’un linceul qui invitent à la prudence. Certaines séances tourneront malheureusement au quasi pugilat avec des Mazda MX5 et Cooper S montées en slick, refaisant facilement leur déficit de puissance dans les portions sinueuses. Au terme de la journée, le potentiel est indéniablement présent, mais les conditions n’ont pas vraiment permis son exploration en toute quiétude.

A Thunderhill (vidéo), certains traits du comportement du sac-à-dos ont commencé à faire du sens, notamment cette capacité à ouvrir en grand dès la corde pour ressortir comme une balle du virage. La révélation fut telle que j’ai failli finir dans la pampa au droite suivant, faute d’avoir adapté mon point de freinage à la vitesse nettement supérieure atteinte dans le court intervalle. La motricité est sidérante, les gros boudins de 305/30/19 étant plaqués au sol par le moteur en porte-à-faux. Il serait inconcevable d’ouvrir aussi tôt et aussi fort sur une Ferrari 430 équipée de freins acier par exemple. Les freins acier sont – enfin – à la hauteur de la réputation de Porsche. Pas le moindre fading, la course de la pédale centrale s’allonge avec les tours, mais dans des proportions gérables. A noter que si les freins résistent, ils portent néanmoins les cicatrices de leur vécu et crissent à l’arrêt. Le problème de résonnance des plaquettes arrière constaté en rodage a disparu après montage – sous garantie – de plaquettes d’origine 997 Turbo dotées d’un feutre anti-vibration.

Vint le tour de Laguna Seca (vidéo) sur la péninsule de Monterey. Le contraste avec mon expérience précédente avec une 996 Turbo aussi balistique que pataude n’aurait pu être plus prononcé. La première session fut rapidement interrompue par un drapeau noir autoritaire. Verdict : limite des 95 db dépassée. Sortie dans le paddock et intervention mécanique obligatoire, intervention qui se résuma à l’ouverture et à la fermeture du capot moteur. La cause était entendue, passage en sous-régime devant la cabine du préposé à la quiétude des lieux, et limitation à 6500 tours partout ailleurs. Un gâche plaisir, mais la GT3 ne m’en a pas moins bluffé par ses prestations.

Peu de voitures passent de la route au circuit avec une telle homogénéité, sans la moindre modification. Moteur, freins, pneus, amortissement, maintien des sièges, pas la moindre ombre au tableau. En augmentant le rythme à la poursuite d’une Gallardo elle-aussi en délicatesse avec son échappement, j’ai même entrevu la lumière. Un freinage involontairement tardif jusqu’à la corde et, soudain, l’avant se fait plus incisif, l’arrière se place avec un soupçon de légèreté. Difficile car laissant peu de marge d’erreur, inorthodoxe pour l’école de pilotage Ferrari qui insiste sur le freinage en ligne, mais la maîtrise du trailbraking semble être la solution à la l’équation complexe du comportement d’une 911. La direction télépathiquement directe est une alliée précieuse dans le fameux corkscrew, mais je trouve la remontée d’informations décente, sans plus, notamment à la limite du sous-virage. La motricité est telle que le traction control n’intervient quasiment jamais sur le sec, même dans les crêtes et compressions de Laguna Seca qui causaient tant de tourments au PSM de mon ex 996 Turbo.

 

Après trois sorties sur circuit sans le moindre lavage intermédiaire, la voiture était non seulement glorieusement sale, mais constellée de traces de gomme sur toute la face avant, le capot, le toit (!) et les ailes arrière. Crasse, insectes et gomme nécessiteront de longues heures de nettoyage, couronnées par l’application un brin sceptique du polish / cire Zaino Z-AIO, avec un résultat qui dépassera de loin mes attentes. La voiture retrouve un brillant profond, mais la douceur de la peinture rend la voiture irrésistiblement soyeuse au toucher, et l’eau perle dessus comme sur des plumes de canard.

Suite au tapage diurne à Laguna Seca, je me promis qu’on ne m’y reprendrait plus. Deux options à choix : silencieux adaptables type Supertrapp ou le bidouillage du système électro-pneumatique commendant les valves d’échappement. Comme la plupart des constructeurs, Porsche contourne les normes de bruit en utilisant un système de dépression commandant des soupapes logées dans les marmites, modifiant le chemin de passage des gaz et donc l’acoustique sur commande. Sur la 997 GT3, celles-ci sont ouvertes au repos, et se ferment sous l’action d’une conduite de dépression. Un concessionnaire local a conçu une modification simple du système de commande, utilisant uniquement des pièces d’origine, permettant à choix :

–   de conserver le comportement d’origine et ses transitions brutales,
–   de garder les valves ouvertes en permanence,
–   de garder les valves fermées en permanence.

L’opération prend 15 minutes, les pièces sont de simples raccords et une valve anti-retour, mais je me vis malgré tout délesté de 100$.

Si la troisième option permet de rouler à fond sur circuit sans chatouiller les sonomètres de la mauvaise manière, la deuxième n’est supportable qu’à deux conditions : ne jamais rouler entre 2 et 3000 tours – guère viable sur route ouverte – ou avoir fenêtres et toit ouverts pour atténuer la résonnance. Les vocalises du flat 6 deviennent alors avantageuses, même si la tonalité ronde et sourde n’a pas la personnalité des anciens moteurs à air ou même d’une 996 Carrera. Traversant la baie de San Francisco par le Dumbarton bridge avec ma nouvelle plomberie fraichement installée, l’air frais atténuant la morsure du soleil, les pélicans dérivant dans la brise et le 3.6 hurlant à pleins poumons, un court moment d’euphorie qui aurait pu se terminer par une conversation aimable avec un officier de la California Highway Patrol. Un fantastique pousse-au-crime, avec ce moteur plein qui tracte étonnamment bien en bas et n’en finit pas de prendre des tours. La conservation de mon permis et de la virginité de mon casier judiciaire rendit une nouvelle sortie sur circuit rapidement nécessaire.

Ainsi vint le tour de Llihrednut (vidéo). Inutile d’aller scruter la carte de l’Islande à la recherche du lieu, il s’agit en fait du tracé de Thunderhill parcouru à l’envers. Une idée qui peut paraître farfelue mais qui, si les dégagements l’autorisent, permet de découvrir un tout nouveau tracé dans un lieu parfaitement connu. Une impression étrange car, si la séquence des virages est parfaitement prévisible, tous les points de freinage et de braquage sont à réapprendre. Première session annulée après un accident qui aurait pu être tragique, je me suis un peu battu le reste de la journée avec la boîte à vitesse dans certains enchaînements. Sa dureté ne facilite pas la rapidité des rétrogradages, et une boite séquentielle à commande au volant est tout simplement plus efficace selon les conditions. Un dilemme entre efficacité pure et le plaisir.

Côté consommables, je me déclare ravi de la prestation des Pirelli P Zéro Corsa System montés d’origine sur la voiture. S’ils n’ont certainement pas le grip de vrais semi-slicks, leur progressivité et leur constance en font une excellente monte. Difficile de suivre des voitures plus légères montées en gomme tendre dans le sinueux, et je dois avouer que la tentation de monter des Toyo 888 me hante parfois, mais l’endurance des Corsa System en font le choix de raison, me contraignant à peaufiner mon pilotage et mon apprentissage du comportement si particulier des 911. Après 6000 kilomètres dont 4 sorties sur circuit, le train montre une usure parfaitement régulière et encaissera avec bonheur une cinquième escapade. La consommation du précieux liquide s’est établi à 13.3 l/100km en moyenne, avec un mini à 9.17 et un maxi à 29.7 sur circuit. L’ODB indique un 12.3 l/100km aussi têtu que fantaisiste.

La lèvre du bouclier avant devra être considérée comme un consommable elle aussi, tant les frottements avec le bitume sont fréquents à la moindre rampe, même prise en diagonale.

L’intérieur n’est hélas pas exempt de couinements, en particulier un rossignol qui niche dans le coin arrière droit, intolérable sur une voiture de ce prix. L’intervention du concessionnaire a été aussi utile qu’une paire de palmes dans l’ascension du Mt Blanc. La suspension avant salue souvent mes premiers mètres d’un klonk retentissant, normal paraît-il, tout comme le ratellement sinistre et bref qui accompagne parfois la mise en marche du moteur : tendeurs de chaînes de distribution en attente de pression d’huile. Normal également selon la sagesse populaire. L’embrayage a tendance à brouter en cas d’usage urbain soutenu, et c’est aussi irritant que la fermeté de la pédale gauche peut être fatigante à la longue. Fermeté de la commande boîte également, précise certes, mais les verrouillages sont dignes d’une prison nord coréenne. Toujours au rayon des babioles irritantes, le volant me scie désagréablement les pouces sur long trajet.

Pas de soucis de fiabilité particulier à reporter, et on n’en attend certainement pas moins de Porsche. A noter que les 997 GT3 ne sont pas immunes aux problèmes de RMS (Rear Main Seal, joint d’arbre moteur entre bloc et boîte. Cet exemplaire en semble exempt, d’autres en souffrent chroniquement. La moindre trace d’huile sous le bloc est donc à prendre au sérieux. Aucun autre frais d’entretien à signaler. Consommation d’huile nulle, un quart de litre et une première vidange à venir, tous deux par acquis de conscience plus que par nécessité.

  

L’installation de mon adapteur iPod Dension Gateway 500 sur le bus optique MOST (Media Oriented System Transport) s’avéra plus difficile que prévue, nécessitant non seulement un changement du firmware du boîtier Dension, mais aussi une longue séance de reprogrammation de la voiture pour qu’elle daigne reconnaître la présence d’un émulateur de changeur CD. La voiture n’étant équipée que de l’autoradio CDR24 de base, la nouvelle interface utilisateur concoctée par Dension est grotesque, aussi malpratique qu’accidentogène.

Après 6 mois et autant de milliers de kilomètres, ma très jaune 997 GT3 a réussi l’examen du circuit avec brio, se montrant largement à la hauteur de mes attentes. La réciproque n’est probablement pas vraie, tant la voiture requiert des recettes de pilotage qui demandent expérience et précision. La récompense semble à la mesure des efforts à consentir pour parvenir à se battre « avec » plutôt que de se battre « contre ». Une prochaine sortie sur la Nordschleife est une perspective alléchante …

30’000 km en Porsche 997 GT3

Trente mille kilomètres sur route et piste. Presque autant sur mer, après un périple épique pour ramener ma voiture de Californie en Suisse, via Los Angeles, puis un détour imprévu par Shekou en Chine où le container fut transbordé sur un autre vaisseau à destination de Singapour puis le canal de Suez avant de toucher sol européeen à Rotterdam. Plus de détails sur cette épopée dans ce sujet. L’aventure m’aura coûté quelques cheveux blancs et une batterie. Après neuf mois sur les côtes californiennes, ma GT3 a pu s’ébattre sur ses terres d’origine : les circuits européens.

Je n’utilise cette auto sur route que pour me rendre sur circuit. Si les balades ont perdu beaucoup de leur intérêt avec la plupart des GTs contemporaines, la GT3 magnifie encore cet effet. Trop dure de suspension, la voiture se désunit sur revêtement dégradé. Sur du billard, le seuil cinématique d’intérêt se situe quelque part entre le retrait de permis à vie et le lynchage médiatique. Certes, la rigidité et l’immédiateté télépathique des réactions offre une expérience brute et riche de sensations, mais pour une utilisation exclusivement routière, je lui préfèrerais une Carrera S, moins pointue, mais au moteur plus coupleux et aux suspensions mieux adaptées à une plus large diversité de revêtements.

La 997 GT3 demeure toutefois une grande routière compétente, les trajets autoroutiers pour se rendre sur les pistes de Californie et d’Europe sont un réel plaisir. Sobre (jusqu’à moins de 9 L/100km à allure légale sur autoroute suisse, moins de 12 L/100km à allure soutenue sur Autobahn), assez reposante pour rouler à 220 km/h de croisière, logeable et pas trop bruyante, la voiture fait preuve d’une belle polyvalence, magnifiée par les aspects pratiques des 911. La reine des GTs orientées piste règne presque sans partage sur son positionnement : aucune autre auto ne présente de telles dispositions pistardes sans une opération de chirurgie élective couvrant un cocktail de freins, ressorts, amortisseurs, refroidissement ou pire encore.

Quoi qu’en disent certains de nos confrères, je trouve la commande de boite de la 997 GT3 largement perfectible. Désagréablement dure à froid ou à bas régime, elle devient plus limpide à l’attaque, mais sans jamais se transformer en alliée. Elle demande attention et précision, mais récompense son pilote lorsque les passages sont rapides et parfaitement exécutés, un exercice qui requiert plus d’attention qu’il ne le devrait. Un alternative contrastée aux boîtes robotisées, telles que celle des Ferrari 430 Scuderia ou 458 Italia où une pichenette de l’index maintient le bon rapport n’importe où, n’importe quand. Le rapport de pont est exagérément long, environ 125, 175, 220, 265 km/h en 2, 3, 4 et 5ème (vitesses réelles GPS), ce qui fait du montage d’un pont court une option pertinente.

L’équilibre de cette voiture demeure particulier, une adaptation qui, après trois 911, n’est pas encore entièrement assimilée. Dans les enfilades très rapides du Nürburgring, la voiture avale les inégalités et offre une bonne stabilité, fruit de tout le travail de développement de Porsche sur cette piste. Prudence toutefois, un lever de pied inopportun en courbe rapide peut provoquer une légère dérive de l’arrière et une forte décharge d’adrénaline. Dans les courbes plus lentes, la clé se situe dans la transition entre freinage et accélération par une exploitation presque caricaturale des transferts de masse entre l’avant et l’arrière. L’approche doit être agressive, avec des freinages tardifs qui se prolongent au-delà du point de braquage, suivis d’une réaccélération généreuse. Les pneus avant s’accrochent dans des rails virtuels, l’arrière motrice à la limite d’adhérence, le résultat est vraiment gratifiant. Faute de réussir cette transition, la voiture s’assoit et l’avant part inéluctablement en luge. Intéressant à pratiquer sur circuit, mais l’application d’une telle technique sur route – avec les marges de sécurité qui s’imposent – me semble hors d’atteinte. Ceci ne fait que renforcer mon désintérêt prononcé pour l’utilisation de ma GT3 sur route ouverte.

La note d’échappement n’y est pas totalement étrangère, le système de commutation par valves pneumatiques amenant des transitions artificielles à 3000 t/min (en mode sport, 4000 t/min en mode normal). Maintenir les valves ouvertes sur toute la plage de régime génère des résonnances assourdissantes vers 2500 t/min. Solution : maintenir une valve constamment ouverte et conserver la commutation sur l’autre. La modification est simple et le résultat donne un peu plus de caractère à bas régime. L’échappement d’origine est également trop bruyant pour les circuits au sonomètre chatouilleux tels que Laguna Seca ou le Laquais. Le montage d’une ligne de dépression permet de maintenir les valves closes et de diminuer considérablement le bruit à haut régime.

 

Hormis le changement sous-garantie du RMS (Rear Main Seal, le joint de sortie de vilebrequin vers la boîte), un problème qui semble plus affecter les voitures qui roulent peu, la voiture a jusqu’ici été d’une fiabilité sans reproche. L’embrayage a depuis le début tendance à légèrement brouter à chaud et les freins sont aussi discrets qu’un train de marchandises, pas d’autre soucis à signaler. Deux rossignols d’intérieur, un à l’avant droite et l’autre dans l’habillage du pilier C, font des apparitions occasionnelles. Inacceptable sur une voiture neuve de ce prix, tolérable après 30’000km. Le système de surveillance de la pression des pneus (Tire Pressure Monitor) a progressivement dérivé et retourne maintenant des valeurs 0.3 bars en-dessous de la réalité. Il demeure utile pour surveiller les variations différentielles, et m’a averti par deux fois d’un pneu plat que je n’aurais autrement détecté qu’à mes dépens.

Une bonne note à l’alcantara utilisé par Porsche sur le volant, placets de sièges et leviers de boîte et de frein à main, pas le moindre signe de vieillissement ou de peluchage. La consommation d’huile est négligeable, à peine un décilitre aux 1000km.

Le premier train de Pirelli PZero Corsa System a été remplacé après 12’000km et quatre sorties sur circuit à Infineon Raceway,Laguna Seca et Thunderhill. Le deuxième train de Corsa System verra son service interrompu par une crevaison à l’arrière à Hockenheim après 6800km, remplacé au pied levé par des Bridgestone RE050 miraculeusement trouvés sur place. Retour aux Corsa System après 7500 km en anticipation de la saison de circuit 2010. Je n’ai pas encore testé de gommes plus agressives (Pirelli Corsa, PZero Trofeo ou Michelin Pilot Sport Cup). J’ai payé les trains de Corsa System entre 2100 et 2400 CHF, somme raisonnable pour des pneus de ces dimensions et niveau de performance.

Les freins sont un poste d’usure à surveiller. Leur endurance est absolument irréprochable, on peut taper dedans du matin au soir sans qu’ils ne montrent le moindre signe d’échauffement, mais leur usure reflète les performances de l’auto. Si les disques ont tendance à rapidement développer des fissures autour de leurs perçages, celles-ci ne sont jamais devenues critiques. Les disques avant furent remplaces a 22’000km par des homologues de GT3 Cup (800 CHF hors TVA la paire – on pourrait craindre nettement pire), ils n’auraient guère supporté qu’une sortie sur circuit de plus. Les plaquettes avant furent remplacées à 20’000km par des Pagid, mais ce sont les arrière qu’il faut surveiller le plus, étonnamment. Epaisseur insuffisante, répartition de freinage importante sur l’arrière et interventions supposées du Traction Control lorsqu’il n’est pas déconnecté (il n’y a pas d’ESP sur les 997 GT3 mkI) dévorent les plaquettes arrière très rapidement 15000 km pour le premier jeu (origine type 997 Turbo), 6000km avec le deuxième jeu (Pagid). Remède partiel : déclencher le Traction Control sur piste sèche, il n’est de toute manière pas nécessaire.

La Porsche 997 GT3 est livrée d’origine avec une hauteur de caisse destinée à un usage routier et des réglages de trains assez conservateurs. Souvent dérangé par le sous-virage en sortie de courbe, j’ai demandé un avant plus incisif sans rendre la voiture trop nerveuse et l’arrière trop baladeur. Rabaissement de la hauteur de caisse, environ 2 degrés de carrossage à l’avant et 2.5 à l’arrière, avec les pinçages adéquats et des poids par roue correctement ajustés. La voiture étant entièrement réglable d’origine, le seul pré-requis est la solide expérience d’un spécialiste. Résultat : aucune idée. Sans comparaison avant/après directe et au gré d’un apprentissage progressif du comportement d’une 911 orientée piste, les réglages et mon éducation sont devenus difficilement dissociables. Seules certitudes : la voiture est règlée adéquatement pas des professionnels et la garde au sol sous la lame souple du bouclier avant est encore pire que l’origine.

Le coût d’utilisation kilométrique revient à 2.94 CHF/km tout compris, avec un kilomètre incrémental à 71 centimes. Premier poste : la décote. Un calcul virtuel dans mon cas, la voiture ayant été achetée alors que je résidais en Californie, soit 30% moins cher que le tarif européen. Une trentaine de pourcents qui correspond à la décote sur deux ans et demi. Prix de base neuf 2007 en Suisse : 171’400 CHF (hors options), prix de revente virtuel estimé, Août 2010, 30’000km : 115’000 CHF, un décote de 21’100 CHF par an.

Suivent les charges fixes (assurances et impôts) avec environ 3740 CHF par an, puis un budget essence conséquent du fait d’une consommation moyenne de 16.6 L/100km entre route et circuit, et surtout un prix du litre d’essence moyen de 1.95 CHF/litre du fait du prix du sans plomb 98 en Allemagne et en France. Freins, pneus et services d’entretien (hors réseau officiel, essentiellement des vidanges) sont loin derrière. Un budget conséquent pour des moments magiques sur la plus belle piste du monde. Quelques images sonores vallent des milliers de mots.

  

Fiche technique

Porsche 997 GT3 Porsche 997 Turbo
Moteur B6 – 3600 cm3 B6 – 3600 cm3 Turbo
Poids Kg (DIN, constructeur) 1395 1585
Rapport poids puissance 3.36 3.30
Puissance (ch / régime) 415 / 7600 480 / 6000
Couple (Nm / régime) 405 / 5500 620-680 / 1950
0-100 km/ h (constr.) 4.3 s 3.9 s
Vitesse max (constr.) 310 km/h 310 km/h
Conso mesurée (constr.) 11.3 (12.8) (12.8)
Pneumatiques avant 235/35 ZR 19 235/35 ZR 19
Pneumatiques arrière 305/30 ZR 19 305/30 ZR 19
Longueur 4445 4450
Largeur 1808 1852
Hauteur 1280 1300
Prix (CHF) 171400 CHF 213200 CHF
Prix (EUR) 114066 € 141813 €

 

Galerie de photos

Galerie de photos – Photoshoot à Alameda

Liens

Le sujet du forum – les articles Porsche – la liste des essais – les articles relatifs:

        

Tu pourrais aussi aimer