Essai Nissan GT-R : La Supercar pour tous
S’il est une nouveauté qui était attendue au tournant, tant par les ados que les amateurs de supercars, c’est bien la Nissan GT-R. A la rédaction d’Asphalte.ch, nous attendions aussi avec impatience notre véhicule d’essai. Cela n’a pas pu être possible via l’importateur, mais grâce à la grande générosité et la confiance d’un heureux propriétaire ainsi que l’aimable concours du « Nissan GT-R High Performance Center » de Meyrin pour les photos, nous sommes en mesure de vous livrer nos premières impressions.
Rendues immensément populaires à travers le monde par le biais notamment des jeux vidéo, les générations précédentes de Skyline GT-R surpuissantes étaient jusqu’alors réservées au marché japonais. Avec la petite dernière de la lignée, Nissan s’attaque au reste du monde en pointant la Porsche 911 Turbo et la Corvette Z06 dans sa ligne de mire, s’arrogeant même le culot de venir les titiller sur leur terrain d’exploits favori, la Nordschleife. Je ne vais point m’attarder sur les chronos réalisés sur cette piste mythique, certes impressionnants et attestant de la valeur de l’auto, mais qui m’apparaissent toutefois d’une importance toute relative lorsque la bête se retrouve entre les mains de Monsieur Tout-le-Monde.
Bien qu’un peu tristounette, la planche de bord se veut sans surprise, sobre et fonctionnelle. La console centrale, massive et orientée vers le conducteur, accueille les réglages de la radio et de la climatisation ainsi que certainement les 3 plus importants interrupteurs de la voiture : ceux commandant la gestion de la boîte de vitesse, le mode d’amortissement et le contrôle de trajectoire. Au sommet trône l’énorme écran multifonctions conçu en collaboration avec Sony Polyphony Digital, le créateur du jeu « GranTurismo », vous permettant de suivre en temps réel toute une kyrielle de paramètres vitaux du véhicule ainsi que d’autres, relevant plus du gadget mais qui raviront les geeks automobiles adeptes de la télémétrie, comme les accéléromètres latéraux ou longitudinaux et les capteurs de pression sur les pédales. La finition est de bon niveau mais l’utilisation de certains plastiques de second choix détonne dans cet environnement qui se veut plutôt luxueux.
Le pilote retrouve face à lui un combiné tachymètre/compte-tours au style clair et original. La lecture du compteur de vitesse nécessite toutefois un petit temps d’adaptation : placé à la gauche du compte-tours, sa graduation débute en position « 4 heures ». Dès lors, la limite de vitesse légale sur autoroute se situe dans le tiers austral du cadran… un vrai piège à permis ! L’assemblage général est de bonne facture et le sommet de la planche est recouvert de cuir. Détail intéressant, la casquette abritant les cadrans analogiques est solidaire de la colonne de direction, assurant ainsi une parfaite lisibilité des informations quel que soit le réglage de la position du volant. Finement pensé, ce d’autant que la jante épaisse du volant aurait vite fait d’entraver la lecture des données.
Annoncée en 2+2, il faut bien avouer que les grands gabarits seront à l’étroit à l’arrière, tant au niveau des jambes que, et surtout, en hauteur en raison de la faible garde au toit. Il est dès lors difficilement envisageable d’utiliser les sièges arrière pour les plus de 15 ans sur de longs parcours. Ils seront par contre de parfaits compléments au coffre de 315 litres à la découpe du couvercle contraignante pour de grosses valises. Encore une fois pour une GT, le but n’est pas de jouer les bétaillères ! Nissan offre dans sa gamme suffisamment d’alternatives pour cet usage…
Mais il est temps d’appuyer sur le gros bouton rouge trônant au milieu du tunnel central.
Un râle grave et étouffé traverse l’échappement. D’une cylindrée de 3.8 l., ce V6 auquel on a greffé deux turbos délivre 485 CV et 588 Nm de couple à 3200 t/min. Accouplé à une boîte robotisée 6 rapports à double embrayage développée par Borg-Warner, il délivre sa puissance soit avec la douceur d’une geisha ou la rage d’un samouraï, selon que vous aurez préféré le mode automatique tout confort ou les fameux mode « R » des réglages que je citais plus haut. Bien que disposant d’une transmission intégrale, le couple est transmis par défaut entièrement sur les roues arrières et passe jusqu’à 50% sur l’essieu avant lorsque les capteurs détectent des pertes d’adhérence.
D’emblée, la facilité de prise en main est déconcertante. Certes l’engin est (très) large et nécessite une attention de tous les instants lorsque l’on emprunte les petites ruelles tortueuses des villages provençaux. Mais malgré son encombrement et son poids (1822 kg) la GT-R est agile et se déplace sur un filet de gaz en toute quiétude. Toutefois le rayon de braquage important limitera les aptitudes de Godzilla – c’est le petit nom de la GT-R au Japon – aux manœuvres de parcage. La boîte en mode automatique gère les rapports avec douceur, distillant la puissance du moteur avec progressivité. Le silence de fonctionnement est impérial et l’amortissement, certes plus ferme que celui d’une berline, gomme parfaitement les aspérités de la route et contiendra les mouvements de caisse sans mettre à mal vos lombaires. A noter également que les pneus Dunlop « run-flat » se montrent très avenants en termes de confort alors qu’habituellement ce type de gomme est réputé plutôt sévère en raison des flancs rigides permettant le roulage à plat.
Pour découvrir les réelles aptitudes sportives de la GT-R il faut se dégager des zones urbaines et c’est avec une délectation non dissimulée que je me dirige vers les virolets de l’arrière-pays niçois, royaume de la négociation de courbes où la japonaise devrait démontrer toutes ses qualités. Petit stop au bord de la route, histoire de paramétrer les réglages comme un pilote d’avion passe en revue sa check-list avant le décollage. Gestion de la boîte de vitesses en « manuel », sur mode « R » réduisant les temps de passage. Amortissement en mode « R », le plus ferme. Je laisse l’ESP en mode « normal », histoire de ne pas tenter le diable non plus et l’utilisation du mode « OFF » annule la garantie du constructeur sur la transmission en cas de panne voire casse.
Bien engoncé dans le baquet je balance la sauce. Tel un boulet de canon la GT-R détale sèchement sans sourciller. Grâce aux palettes sur la colonne de direction, les rapports de boîte se succèdent à une vitesse supersonique sans perte de charge. La première épingle approche. J’écrase la pédale des freins et rétrograde à mesure, l’auto mord sans ménagement ses disques Brembo de 380 mm, ne bronche pas et garde son cap. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire je décélère de quelques dizaines de km/h sentant seulement augmenter la pression de la ceinture de sécurité sur ma poitrine. Braquage : la GT-R attaque le virage et touche la corde pilepoil où mes yeux l’ont indiqué, sans aucun mouvement de caisse parasite ou prise de roulis. La direction est parfaite, communiquant clairement toutes les informations et ne se montrant pas démesurément assistée, comme on peut le constater trop souvent sur les voitures actuelles. Je redresse le volant, relance avec le pied droit soudé au plancher, toute la puissance passe au sol sans souci en répartissant le couple entre l’avant et l’arrière pour éviter tout patinage. Le châssis parfaitement équilibré est lui aussi redoutable. A aucun moment je n’ai constaté un quelconque flottement dans la tenue de cap, en appui ou à la relance. Les réactions sont saines et franches, comme si les roues étaient montées sur des rails. Même l’ESP, laissé en mode « normal », ne se montre pas trop intrusif et agit uniquement en dernier recours. L’amortissement est bien entendu très dur mais offre malgré tout une « zone de confort » évitant ainsi à l’auto de se transformer en shaker pour les occupants. Pfiou !! Impressionnant ! Et dire que la bête pèse autant qu’une grosse berline, a un gabarit maousse, une puissance de feu et se comporte quasi comme une Lotus. Débile !
Côté consommation, il est bien clair que de telles prestations se paient au prix fort. Selon l’ordinateur de bord, la consommation moyenne lors de notre essai dynamique s’est située aux alentours de 20 l./100 km. En utilisation quotidienne, Godzilla ne demandera qu’un peu plus d’une dizaine de litres pour vous mener sur 100 km. Ce qui reste malgré tout raisonnable. A noter en outre que le programme d’entretien Nissan exige de fréquents passages à l’atelier, ce qui pèsera également sur le budget, mais « there is no such thing as a free lunch » !
Je vais être très clair : en termes d’efficacité, plaisir et facilité de conduite, polyvalence ainsi que prix (à partir de CHF 119’000.-), aucune auto ne m’a jusqu’ici autant convaincu. Il m’est même difficile de lui trouver une concurrente qui la rejoindrait et ferait un quasi sans faute dans chacun de ces domaines. Certes, certains diront qu’elle est trop efficace voire aseptisée en comparaison avec une Corvette ou une Porsche. D’autres seront immanquablement rebutés par le blason Nissan qu’elle arbore, pas assez hype et prestigieux. Mais n’oublions pas que la lignée GT-R a pris naissance il y a 40 ans, et qu’aux côtés de l’américaine et l’allemande la GT-R peut elle aussi justifier d’une certaine tradition.
En définitive, le buzz créé autour de la GT-R est amplement justifié, tant cet extra-terrestre vient ébranler sur nos terres l’hégémonie des GT habituelles. Nissan a réussi à nous proposer certainement la GT la plus abordable, dans tous les sens du terme, et la plus polyvalente en regard des performances offertes. Reste à voir comment va se comporter sa valeur de revente.
Quant aux sceptiques, je ne peux que leur conseiller une chose : glissez-vous derrière son volant pour quelques kilomètres !
Face à la concurrence
Nissan GT-R 2009 | BMW M3 Drivelogic | Porsche 911 Turbo PDK | Chevrolet Corvette Z06 | |
Moteur | 6 cyl. en V, 3799 cm3, biturbo | 8 cyl. en V, 3999 cm3 | 6 cyl. à plat, 3800 cm3, biturbo | 8 cyl. en V, 7011 cm3 |
Transmission | Intégrale | Propulsion | Intégrale | Propulsion |
Boite de vitesse | 6, double embrayage robotisée | 7, double embrayage robotisée | 7, double embrayage robotisée | 6, manuelle |
RPP (kg/ch) | 3.76 | 3.99 | 3.19 | 2.77 |
Poids à vide (constr.) | (1822 kg) | (1675 kg) | (1595 kg) | (1418 kg) |
Puissance (ch/régime) | 485 / 6400 | 420 / 8300 | 500 / 6000 | 512 / 6300 |
Couple max (Nm/régime) | 588 / 3200 | 400 / 3900 | 700 / 2100 (overboost) | 637 / 4800 |
0-100 km/h | 3.5 sec | 4.6 sec | 3.4 sec | 3.9 sec |
Vitesse max. | 310 km/h | 250 km/h | 312 km/h | 320 km/h |
Conso. mixte (constr.) | (12.4) | (11.9) | (11.4) | (14.7) |
Pneumatique | AV 255/40 ZRF 20 AR 285/35 ZRF 20 |
AV 245/40 ZR 18 AR 265/40 ZR 18 |
AV 235/35 ZR 19 AR 305/30 ZR 19 |
AV 275/35 ZR 18 AR 325/30 ZR 19 |
Prix de base (CHF) | 119’000.- | 111’120.- | 228’317.- | 125’790.- |
Prix de base (EUR) env. | 82’550.- | 79’150.- | 151’559.- | 82’450.- |
Nos chaleureux remerciements à l’heureux propriétaire pour la confiance témoignée en nous confiant sa belle japonaise pour la réalisation de cet essai, ainsi qu’au garage Promocar – Nissan Genève pour la mise à disposition de leur GT-R pour la séance photos.
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