Notre essai de la sensationnelle Bentley Continental GT Speed.
Bentley. Voilà près de 90 ans que ces sept lettres associent sportivité au luxe extrême, saupoudré du légendaire flegme britannique. Nos grands-parents étaient tout juste nés que le « B » ailé survolait la mythique course des 24 heures du Mans en 1924 puis quatre fois de rang entre 1927 et 1930, grâce notamment aux « 3 litres », « 4 ½ litres » et les fameuses « Speed Six ». Dès la fin de la seconde guerre mondiale, le destin de Bentley est étroitement lié à celui de Rolls-Royce. Les deux marques se partageant les chaînes de production de Crewe dans le Cheshire, la gamme Bentley consista majoritairement en des clones des modèles du Spirit of Ecstasy auxquels on aura atténué un tant soit peu le côté « bling-bling ». Depuis 2002 et après une âpre bataille opposant les Bavarois de BMW aux Bas-Saxons de VW, Bentley passe sous le giron de la « voiture du peuple ». Shocking ! Est-ce le signe de la décadence de l’aristocratie ?
L’habitabilité de notre coupé n’a rien du sulky, bien au contraire. Quatre adultes peuvent y prendre place, pour autant qu’ils arborent le profil jockey. En effet, à l’arrière la garde au toit s’avère limitée,
la germaine CL 65 AMG et la transalpine 612 Scaglietti, la Bentley, fidèle à l’exclusivité liée à son patronyme, s’habille d’une robe sobre et élégante tout en dévoilant sa personnalité dans l’habitacle, où règnent en maîtres luxe et bon goût.Qu’en est-il sous le capot ? Avec l’arrivée de la Continental, le valeureux et increvable V8 6 ¾ litres de Crewe a laissé place au joyau technologique made in Wolfsburg : le 6.0 W12 (issu de deux VR6 de… Golf) que l’on retrouve sur l’A8 ou la confidentielle Phaeton, gavé pour l’occasion de deux turbos. En version « de base » chez Bentley, ce bloc développe 560 CV à 6000 t/min pour 650 Nm de couple maxi à 1600 t/min. Mais ce n’est pas assez pour justifier l’appellation « Speed »… Ainsi, les ingénieurs redessinent les pistons, bielles et vilebrequin afin d’alléger l’ensemble et revoient la gestion électronique. Le carter a également subi un lifting de même que la ligne d’échappement. Résultat des courses, la puissance augmente de 9% à 610 CV à 6100 t/min et le couple culmine à 750 Nm à 1750 t/min, soit 15% de hausse… Oh my God !La première chose qui frappe lorsque nous soulevons le capot est la compacticité du moteur. Certes la baie est bien remplie, et les caches de protection finissent de tout calfeutrer. Mais en y regardant de plus près, le propulseur se trouve totalement en porte-à-faux avant. L’on pourrait supposer qu’ainsi monté, le moteur nuit à la répartition du poids à l’instar des gros cubes équipant certaines américaines. Que nenni ! L’équilibre est quasi parfait avec 53% sur l’avant et 47% sur l’arrière. Grâce à son architecture en « W », ce bloc a un encombrement en profondeur sensiblement similaire à celui d’un gros V8.Clé en poche, j’appuie sur le starter… un grondement sourd traverse l’échappement, les 610 cocos se placent dans leurs stalles. Je lâche doucement les freins, mon destrier s’ébranle. D’emblée, la direction ultra légère en manœuvres fait oublier les quelques 2392 kg (sans conducteur) de l’ensemble. Je m’élance sur la route et le W12 distille ses vocalises de baryton. Indéniablement, un merveilleux travail de mise au point acoustique a été réalisé sur l’échappement. A tous les régimes, même en pleine charge les turbos expirant de tout leur souffle, les borborygmes se font entendre dans d’enivrantes harmoniques, avec en prime de magnifiques retours au lâcher de gaz ou lors des changements de rapport. A noter qu’à aucun moment cette bande-son n’agace ou vous incite à augmenter le volume de la radio. Tel un gamin, je me surprends même à rouler toutes fenêtres ouvertes pour en profiter encore plus.
Pour distiller sa puissance aux quatre roues, le W12 est couplé à une excellente boîte automatique à convertisseur ZF à 6 rapports. Ces derniers se succèdent sans à-coups, catapultant avec flegme notre coupé à des vitesses inavouables. Le kick-down ultra-sensible de la pédale d’accélérateur intervient toujours à bon escient et en douceur, à tel point que j’en oublie les palettes, placées, il est vrai, quelques millimètres trop loin du volant. Il existe également un mode « S » sur le sélectionneur, permettant simplement de grappiller quelques tours/minutes supplémentaires avant le changement de rapport et n’utilisant quasi jamais le 6e pignon afin d’obtenir une réponse encore plus franche en relance, par exemple. Superflu, mais la poussée sans fin du W12 vous collant dans le siège est tellement envoûtante !Sur route, la direction se révèle précise et permet de guider notre mastodonte au millimètre près. Impressionnant ! L’assistance variable est un modèle de progressivité et à haute vitesse la stabilité est impériale. Un petit bémol toutefois, quant à l’ergonomie du volant : les arêtes présentes au niveau des branches se trouvant sous les paumes sont certes douces, mais s’avèrent peu confortables au bout d’un certain temps, obligeant à souvent changer la position des mains.
Question tenue de route, aucun reproche. Avec son arme de guerre sous le capot, on pourrait légitimement croire que le moindre coup de cravache se traduit par une ruade du train arrière. Mais pensez-donc ! Avec ses 4 roues motrices chaussées en PZero spécifiques de 275 au grip exemplaire et sa direction incisive, la Continental GT Speed a un comportement on ne peut plus rigoureux et ultra-sécurisant en toutes circonstances. L’amortissement a également été revu par rapport à la GT classique : l’utilisation de pièces en aluminium réduisant les masses non-suspendues et les ressorts pneumatiques associés aux grosses barres antiroulis plus raides, le tout piloté en mode « Dynamic » par la gestion d’amortissement, permettent à notre coupé d’adopter un comportement sportif, stable et neutre, prenant peu de roulis et ménageant les lombaires des passagers et le confort à bord. Bluffant ! Cependant, l’agilité est quelque peu mise à mal compte tenu de l’embonpoint de notre engin. En conduite normale, nul besoin de préciser que Bentley n’a strictement rien à prouver à qui que ce soit en termes de confort. Le filtrage des aspérités de l’asphalte est tellement excellent qu’il faut bien lire sur le flanc des pneus pour constater que ce sont des « taille basse » qui ont habituellement comme principal défaut de péjorer le bien-être des des passagers à bord. A noter enfin que pour assurer un maximum de stabilité à haute vitesse, un petit aileron placé au bas de la vitre arrière s’extrait à partir de 110 km/h.
Stopper une masse de près de 2.5 tonnes capable d’atteindre plus de 320 km/h n’est pas une mince affaire. Preuve en est, la Continental GT possède les plus grands disques de freins jamais montés sur une voiture de série : 40,5 cm de diamètre… Notre madone est équipée de disques acier répondant malgré tout à toutes les exigences en termes de performances. Pincés par des étriers 8 pistons, le mordant est franc et constant et ce même en répétant quelques freinages bien appuyés. En conduite sportive sur les tracés sinueux du relief romand, un très léger fading apparaît, se traduisant par une course de la pédale légèrement plus longue qu’à l’accoutumée. Rien de bien préoccupant au demeurant. En option il est toutefois possible de monter des disques en carbone céramique (diamètre 42 cm) qui répondront sans faillir aux sollicitations d’une conduite sportive.
Notre gymkhana étant terminé nous rentrons au haras. Il est temps de ravitailler notre étalon… Dotée d’un réservoir d’environ 90 litres, la Continental GT Speed dispose d’une autonomie d’environ 400 km. Notre moyenne de consommation à la pompe sur environ 1’200 km se situe à 21 litres/100 km, avec un minimum de 17.3 en conduite coulée (autoroute) et un maximum à 29.4 en conduite sportive. Encore une fois la maîtrise allemande de
Sous la houlette de VW et son ancien Président fourmillant d’idées, Bentley confirme sa résurrection en signant un chef d’œuvre tant dans le style que par son homogénéité. Malgré une ligne moins exubérante et sportive qu’une Ferrari 612 Scaglietti ou une Aston Martin DB9, la Continental GT Speed met à disposition de ses passagers un cocon au confort et à la présentation hors normes, sans pour autant renier la part sportive des gènes de la marque en leur proposant de cruiser jusqu’à 326 km/h en toute quiétude.Astonishing !Reste maintenant à convaincre mon banquier…
Prix & Principales options : | |
Bentley Continental GT Speed | CHF 334’800.- |
Jantes alliage 20’’ « teintées » | CHF 1’980.- |
Freins carbone céramique | CHF 23’970.- |
Tempomat avec radar de distance | CHF 4’490.- |
Chauffage auxiliaire programmable | CHF 5’310.- |
Télévision | CHF 2’055.- |
Pack confort (camera de recul, fermeture automatique du coffre, sièges avant avec massage lombaire, combiné de téléphone, clef pour voiturier, interface iPod) |
CHF 5’455.- |
Système audio NAIM 1100 W | CHF 10’790.- |
Moquette double épaisseur AV | CHF 630.- |
Tapis haute laine AV | CHF 880.- |
Capuchon du réservoir en alliage | CHF 385.- |
Face à la concurrence :
Bentley Continental GT Speed | Aston Martin DB9 Touchtronic 2 | Ferrari 612 Scaglietti F1 | Mercedes-Benz CL 65 AMG | |
Moteur | 12 cyl en W, 5998 cm3, biturbo | 12 cyl en V, 5935 cm3 | 12 cyl en V, 5748 cm3 | 12 cyl en V, 5980 cm3, biturbo |
Transmission | Intégrale | Propulsion | Propulsion | Propulsion |
Boite de vitesse | 6, automatique | 6, robotisée | 6, robotisée | 5, automatique (Speedshift AMG) |
RPP (kg/ch) | 3.92 | 3.69 | 3.41 | 3.66 |
Poids à vide (constr.) | 2392 kg | (1760 kg) | (1840 kg) | (2240 kg) |
Puissance (ch/régime) | 610 / 6000 | 477 / 6000 | 540 / 7250 | 612 / 4800 |
Couple (Nm/régime) | 750 / 1750 | 600 / 5000 | 588 / 5250 | 1000 / 2000 |
0-100 km/h | 4.5 sec | 4.8 sec | 4.2 sec | 4.4 sec |
Vitesse max. | 326 km/h | 306 km/h | 320 km/h | 250 km/h (bridage électronique) |
Conso. Mixte (constr.) | 21 (16.6) | (18.2) | (20.7) | (14.8) |
Pneumatique | 275/35 ZR 20 | AV 235/40 ZR 19 AR 275/35 ZR 19 |
AV 245/45 ZR 18 AR 285/40 ZR 19 | AV 255/35 R 20 AR 275/35 R 20 |
Prix de base (CHF) | 334’800.- | 251’000.- | 336’000.- | 342’600.- |
Prix de base (EUR) env. | 211’780.- | 152’900.- | 226’000.- | 229’000.- |
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