Un circuit demain en Suisse ?
Les projets de construction de circuits en Suisse, et le contexte politique.
Faute d’infrastructures, la Suisse continue à exporter ses sports motorisés dans les pays limitrophes. Les divers championnats suisses comme la pratique des loisirs motorisés requièrent le déplacement vers les circuits français, allemands, italiens, belges ou autrichiens. Un éloignement au bilan écologique suspect et qui n’incite pas les passionnés de sport automobile à compléter leur formation et pratiquer leur hobby dans des conditions de sécurité optimales.
Les circuits automobiles interdits en Suisse ?
L’article 52 de la Loi sur la Circulation Routière (LCR) interdit depuis 1958 les courses automobiles sur circuit ayant un caractère public. Cette mesure fut prise en réaction au terrible accident survenu au Mans le 11 juin 1955 où l’explosion d’une Mercedes-Benz tua 77 spectateurs. Depuis, les courses en public sur circuit fermé sont interdites par la loi, mais cela n’empêche ni la tenue de courses automobiles à parcours unique (spéciales de rallye), ni les activités sur circuit fermé tant qu’elles ne revêtent pas un aspect compétitif.
Le 21 mars 2003, le député Ulrich Giezendanner (UDC Argovie) dépose devant la Commission des Transports et Télécommunications (CTT) du Conseil National – la chambre basse de l’organe législatif suisse – une initiative parlementaire qui propose l’abrogation de l’article 52 sous le libellé « Lever l’interdiction des courses de formule 1 ». L’initiative finit par passer le cap de la Commission et est approuvée par le Conseil National le 5 Juin 2007 par 97 voix contre 77 et 7 abstentions. Le plus dur semble être fait, mais le 4 Octobre 2007, surprise, le Conseil des Etats refuse l’entrée en matière par 22 voix contre 21. Il est rarissime que la chambre haute refuse de débattre d’un objet qui a passé la rampe de la chambre basse. Retour à la case de départ, la CTT doit donc revoir l’objet et le soumettre à nouveau au Conseil National. La procédure pourrait s’étendre sur plusieurs années.
L’enjeu légal n’est ainsi pas l’autorisation de construire un circuit, mais d’y organiser des courses en public. La loi actuelle n’a donc d’impact sur la viabilité économique d’un projet de circuit que si son plan financier table sur l’apport de compétitions. Rien n’est joué, ni sur la nature du texte final soumis aux chambres, ni sur le délai pour obtenir un vote, ni sur son issue. Peu importe, les enjeux réels sont ailleurs : aucun des projets à l’étude ne tablent sur la compétition pour voir le jour.
Du nouveau dans le Jura
Vendlincourt, à 10km de Porrentruy, à l’extrême nord de la Suisse. C’est sur cette commune de 600 habitants que Florian Lachat a choisi de développer le projet Safetycar Jura. Planifié sur 15ha de terrain agricole, l’objectif est d’offrir un tracé de 3 km environ pour satisfaire des besoins allant de la formation au pilotage récréatif.
Le projet de tracé, conçu pour tourner dans le sens anti-horaire.
Le projet dépend désormais des habitants de Vendlincourt qui devront se prononcer le 3 février 2008 pour le changement d’affectation des parcelles concernées. Si le projet est accepté par la population locale, le dossier sera soumis à l’aval final des services compétents du Canton du Jura, approbation qui ne devrait pas poser problème, le projet ayant déjà été examiné au printemps 2007. Dans le meilleur des cas, le permis de construire est obtenu en Août 2008, les travaux démarrent à l’automne et la piste ouvre 14 mois plus tard, début 2010.
A la rédaction de cet article, les oppositions sont au nombre de quatorze, dont des habitants du village, Helvetia Nostra de Franz Weber et la Fondation pour la protection et l’aménagement du territoire (site).
Le financement du projet n’est pas encore bouclé, mais les fonds recherchés – situés dans une fourchette allant de 12 à 15 millions de francs suisses – semblent raisonnables pour un projet de cette envergure. Le devenir de l’initiative Giezendanner n’a aucun impact sur le projet Safety Car Jura : la configuration géologique des sols et les impératifs de protection des eaux sous-terraines rend toute compétition impossible.
Un projet qui mérite de voir le jour, même si sa situation (156km de Lausanne, 208km de Genève) pourrait largement bénéficier de l’achèvement de la Transjurane afin de le rendre plus accessible depuis le plateau romand. Pour mémoire, le circuit de Bresse n’est qu’à 149km de Genève, le circuit du Laquais à 162km.
Lien sur le sujet du forum: Nouveau projet de circuit dans le Jura
Des nouvelles du Valais
Sis à Chamoson, à mi-chemin entre Martigny et Sion dans le Valais central, le Centre Technologique Alternatif a pour vocation principale le développement des énergies renouvelables et non polluantes. Les promoteurs mettent en avant l’opportunité de développer un tissus de PME gravitant autour de nouvelles technologies permettant des modes de propulsion écologiques : piles à combustibles, solaire, etc …
Pour ces industries, une piste d’essai est un outil indispensable à la conduite d’essais de prototypes. Dans ce but, un tracé modulaire comptant 10 variantes possibles a été développé, avec une longueur de 4.7km dans cette configuration:
Cliquer sur l’image pour voir les 10 tracés du complexe de Chamoson
La préoccupation écologique est centrale: le dossier du projet est truffé du terme (33 citations sur 35 pages), et reflète tant l’objectif premier des infrastructures que la prise en compte des impacts sur l’environnement dans le cahier des charges.
Les objectifs annexes sont la sécurité routière, des aspects culturels et touristiques. Un « usage sportif ne représenterait que 2 à 3% », mais il n’est pas clair si une ouverture pour essais libres non chronométrés tomberait dans la catégorie « formation » ou serait considéré comme activité sportive. Le projet a reçu le soutien enthousiaste des Chamosards avec une acceptation de 75% des votants le 10 mai 2004.
Le financement est estimé à environ 240 millions de francs suisses, une somme rondelette résultant de l’envergure du project. En plus de la piste et de ses locaux, le projet inclut une zone industrielle de 100’000 m2 et un hôtel. Le projet étant au point mort depuis près de 18 mois faute de financement, une réalisation par étapes semble être inévitable. Si cette option est choisie par les promoteurs et le capital rassemblé, M. Salamin, secrétaire général du projet, n’entrevoit pas une mise en service avant l’horizon 2012-2013.