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Essai Jaguar F-Type V8 S: démesure

Sur le versant bernois du Susten, la F-Type révèle de belles qualités. L’auto camoufle très bien son poids, la disponibilité d’un couple abondant permet de ressortir de façon très musclée de chaque virage et efface le moindre rectiligne d’une respiration du V8. La suralimentation est très discrète, dépourvue du lag ou de la stridence des compresseurs d’antan, procurant une poussée considérable dès les plus bas régimes, se poursuivant de manière linéaire jusqu’à la zone rouge à 6500 tours. La direction n’est pas particulièrement communicative, mais sa démultiplication très directe – la plus directe jamais montée sur une Jaguar – est un atout dans ces conditions. Je reste un peu sur mes gardes car le tracé offre peu de marge d’erreur, mais le plaisir de piloter une voiture aussi belle et aussi performante sur cette route fantastique serait réel s’il n’était noyé par le vacarme qui accompagne le roadster orange.

Jaguar F-Type V8-S Firesand

C’est quasiment une règle, la réverbération contre les parois rocheuses magnifie le plaisir auditif de l’automobile sportive. Dans la V8-S, le staccato caractéristique du V8 au vilebrequin à plans croisé est très agressif, sec, sans chaleur ni modulation. Le gros V8 ne distille pas le grondement velouté usuellement associé à ce genre de motorisation, mais une sorte de caquètement incongru et suprêmement irritant. Les ralentissements s’accompagnent de pétarades et claquement secs, sans nul doute volontaires, mais complètement exagérés. Sans même oser une comparaison avec la diva F12, le Porsche Sports Exhaust optionnel d’une 991 Carrera est la démonstration de l’équilibre que Jaguar n’a su ou voulu donner à la F-Type. Métaphore culinaire : autant un risotto truffes peut être un délice gustatif, autant forcer la dose sur le précieux champignon en devient écœurant.

Il n’y a malheureusement pas de stratégie pour contourner le problème. Même en désactivant l’échappement actif par le bouton sur la console centrale, le vacarme reprend dès la mi-régime. Il n’y a que capote fermée que le système est supportable, ce qui est un comble pour un cabriolet. Je rentre de ma balade abasourdi, au premier sens du terme, le tympan droit légèrement endolori. Le constructeur dit être passé par 85 itérations pour calibrer l’Active Exhaust System, un chiffre qui en lui-même peut paraître suspect et indicatif de fourvoiement. Le résultat sur la V8-S est à mon avis un ratage regrettable, comme si Jaguar s’était forcé à explorer de nouveaux territoires en termes de définition de produit, et s’était égaré dans la caricature. C’est d’autant plus dommage qu’entre 2 et 3500 t/min, le V8 peut distiller un feulement plus discret et plus riche. Peut-être que certains équipementiers sauront exploiter ce potentiel pour donner une voix à la F-Type V8-S.

Ces constatations faîtes, je me suis enquis d’explorer le comportement du châssis de la F-Type lorsqu’il est poussé à ses limites, rien de tel qu’une large et longue piste pour ce genre d’exercice de hooliganisme scientifique. Alors que la V6-S est équipée d’un différentiel à glissement limité classique, celui de la V8-S adopte en plus un système de verrouillage actif. Un moteur électrique agit sur un embrayage multidisque, le système permettant de moduler le couple entre les roues arrière en cas de patinage, voire un blocage instantané selon les conditions.

La F-Type offre un contrôle de stabilité à 4 niveaux. Comme relevé précédemment, le mode normal surprend par son côté baladeur, autorisant facilement de légères dérobades, qu’il reprend assez rapidement mais aussi brutalement. Le mode Dynamique étend un peu plus le terrain de jeu, mais les dérives sont, là-aussi, coupées assez brutalement. J’ai ensuite un peu pesté pour parvenir à complètement déconnecter toute assistance. En roulant, une pression sur le bouton de déconnection de l’ESP appelle un mode dit « DSC Track ». L’enveloppe de jeu est dès lors plus ample, mais il n’est pas possible d’entretenir une dérive, le couple moteur s’effondrant progressivement jusqu’à ce que le train arrière se remette en ligne. L’intervention est cependant plus mesurée que dans les deux premiers cas. Je suis ensuite parvenu à la conclusion qu’il faut maintenir le bouton de l’ESP enfoncé deux secondes à l’arrêt pour totalement le déconnecter, avec une double quittance sonore.

Jaguar F-Type V8-S Firesand Jaguar F-Type V8-S Firesand Jaguar F-Type V8-S Firesand

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