RedBull a vaincu sur ses terres.
Dietrich Mateschitz pouvait savourer, et arborer son plus beau sourire. Dimanche soir, une monoplace portant le nom de RedBull, pilotée par un pilote issu de la filière RedBull, venait de l’emporter dans son Autriche natale sur le RedBull Ring. Pour ce gourou des coups marketing, il ne pouvait y avoir de plus beau cadeau que cette exposition maximale en mondovision de sa marque de boisson. Bien plus expansive encore, la marée de supporters orange qui s’était déplacée pour encourager Max Verstappen est repartie avec l’immense satisfaction de voir son champion empocher une magnifique victoire au terme d’une course à embuches & rebondissements.
Autogoal argenté
Car il faut reconnaitre que ce succès n’était pas attendu à la vue des différents essais, où les Mercedes se montraient totalement dominatrices et sans partage, au point de verrouiller totalement la première ligne, Vattieri Bottas s’offrant le luxe de devancer son leader au terme d’un tour magnifique. Avec un Sebastian Vettel partant du 6ème rang, on pensait que la solidité affichée par Mercedes au Castellet allait trouver son écho parfait une semaine plus tard.
Et de fait, le premier tour de piste permettait de croire à ce scénario idéal après que Kimi Raikkonen, pourtant auteur d’un superbe envol en pneus ultra soft (les autres autour de lui partaient en super soft), commette quelques erreurs de pilotages, dont une bien provoquée par le futur vainqueur, pour chuter à la 4ème place. Parti devant, Lewis Hamilton commençait à dérouler sur un rythme qu’aucun autre pilote n’était capable de reproduire. Victoire assurée, fermez le ban.
L’abandon de Bottas au 14ème tour sur perte de pression hydraulique allait tout chambouler, d’autant que pour ajouter à son malheur Mercedes se prenait les pieds dans le tapis en ne faisant pas rentrer Hamilton aux stands dès le 1er tour de la virtual safety car qui suivait. N’ayant pas eu de 2ème chance et alors que tous les autres leaders s’étaient, eux, Hamilton se retrouvait piégé à repartir 4ème de son arrêt ultérieur, et ses espoirs de victoire venaient de s’envoler.
Les espoirs de points allaient eux-même s’envoler un peu plus loin après qu’il fut également contraint à l’abandon, lui aussi sur problème mécanique. Fin de série pour lui après 33 courses dans les points, et plutôt inédit pour Mercedes depuis 2014.
Verstappen, l’opportuniste
Auteur d’une course intelligente, qui l’a vu saisir et profiter de chaque occasion, Max Verstappen signe donc son premier succès de la saison. Clairement sur la pente ascendante depuis 3 courses, voici revenu sur le devant de la scène le fils prodigue. Tout aurait pu s’arrêter dès le 6ème virage suite au contact sus-mentionné avec Kimi Raikkonen, mais il semble écrit qu’il ne peut plus rien arriver à ce Max Verstappen retrouvé.
Même des pneus cloqués et en bout de vie mais parfaitement gérés n’auront pas raison de sa victoire quand son coéquipier Ricciardo, un peu plus tard contraint à l’abandon, avait lui été obligé de repasser à son stand. En bref, un grand week-end du hollandais qui se replace de ce fait dans les roues de Raikkonen et surtout Ricciardo au championnat.
La suite promet d’être savoureuse, puisque RedBull, à raison, n’abdique absolument pas aux championnats, quand bien même lui faudra t’il composer très prochainement avec des pénalités moteur.
Vettel et Ferrari, les autres gagnants du jour
Initialement qualifié 3ème derrière les Mercedes (il se disait incapable de viser mieux) Vettel était rétrogradé de 3 place pour avoir gêné Carlos Sainz en Q1. En s’élançant donc depuis la 6ème place et avec un Hamilton en tête au 1er tour, on imaginait l’écart au championnat se creuser un peu plus. Mais, profitant des faits de courses et abandons, ainsi que d’une belle agressivité en piste (le dépassement sur Hamilton était une superbe manœuvre), Sebastian Vettel repars finalement d’Autriche en retrouvant la tête du championnat pilotes, pour un point !
Cela aurait même pu être un peu mieux si Ferrari avait imposé une consigne de course et interverti les positions de ses deux pilotes en vue de l’arrivée, quand il était joué que Raikkonen ne reviendrait pas sur Verstappen pour la victoire. Il n’en fut rien, tant mieux pour le sport, et espérons simplement pour Vettel que ces 3 points ne fassent pas basculer la décision de fin de saison.
La 2ème place de Raikkonen conjuguée à l’abandon des deux Mercedes permet également à Ferrari de prendre la tête au championnat constructeur. Il faut par ailleurs noter que la Ferrari géra mieux ses gommes que ses homologues, échappant au bullage collectif. Possiblement de bon augure.
Enfin, et une bonne nouvelle n’arrivant jamais seule, Ferrari était le seul motoriste à voir l’arrivé avec l’ensemble des monoplaces qu’il équipe, qui plus est toutes dans les points puisque même les deux Sauber y figurent aux 9ème et 10ème rang. Il faut louer la très bonne performance de Marcus Ericsson, au niveau de son équipier Charles Leclerc en course. Ce dernier poursuit lui sa série d’arrivée dans les points, continue d’impressionner, et la rumeur enfle sacrément autour d’une arrivée chez Ferrari dès 2019 en remplacement de Kimi Raikkonen.
Sorties de purgatoire
Décidément course de la rédemption, dans le sillage des deux premiers du jour, un autre pilote a profité de ce grand-prix d’Autriche pour se remettre en selle. Il s’agit de Romain Grosjean, enfin auteur d’une très belle performance durant tout le week-end, ponctuée par une 4ème place à l’arrivée. Peut-être pas de quoi lever tous les doutes instillés par un début de saison totalement raté, mais certainement du baume au cœur avec ses premiers gros points.
C’est bien entendu toute l’écurie Haas qui en bénéficie, d’autant que Kevin Magnussen termine lui à la 5ème place. D’un coup d’un seul, Haas remonte ainsi à la 5ème place au classement général constructeur, bien plus conforme avec les aspirations du début de saison et le niveau de performance intrinsèque.
Force India peut aussi s’estimer heureuse du résultat. L’écurie indienne place ses deux pilotes dans les points aux 6ème et 7ème rang. Cela devient une habitude et une tendance claire cette année, Esteban Ocon devance son coéquipier Sergio Perez, et, conséquence ou pas, les deux arrivent maintenant à s’entendre sur des stratégies d’équipe. Beau progrès en comparaison de 2017 ! Le rose se fait donc un peu moins pale et participe à un resserrement généralisé autour de la 5ème place du championnat constructeur avec Haas et McLaren.
Alonso n’évite pas la crise chez McLaren
McLaren justement. L’écurie peut s’estimer heureuse de la 8ème place obtenue de haute lutte par Fernando Alonso, à mettre sur le compte du talent de l’espagnol, parti dernier depuis la pit lane. Si, comme à son habitude, il s’épanchait dans sa radio en début de course en se demandant en substance ce qu’il faisait là, sa grinta parlait et était donc récompensée de quelques points, toujours bons à prendre en ces temps de lourde disette.
Au-delà des résultats catastrophiques des dernières courses, c’est en coulisses que se joue la partition ratée d’une écurie secouée comme rarement. La presse anglaise bruissait de rumeurs d’un insider faisant état d’une rébellion du personnel face à un management (Boullier et Brown en tête) jugé totalement dépassé. Peut-être s’agit-il là d’une attaque fomentée par certains ex-dirigeants historiques et revanchards de l’équipe, il n’empêche qu’Eric Boullier, jusque-là Directeur de la compétition, vient de remettre sa démission avec effet immédiat. Le chemin de la reconstruction est encore long.
Yellow tea pot et performances en berne
Mauvais week-end pour l’écurie Renault. Suffisamment rare cette saison pour être souligné, aucune monoplace jaune ne figure dans les points à l’arrivée de la course. Carlos Sainz termine 12ème quand Nico Hulkenberg a lui été contraint à l’abandon suite à une mémorable casse moteur, dégageant un panache de fumée que n’aurait pas renié la RS 01 de 1977.
Espérons un accident de parcours, mais il est possible que, comme d’ailleurs pour l’écurie RedBull, les pénalités commencent à tomber très prochainement, ce qui aura pour mérite d’offrir une chance aux poursuivants immédiats de l’écurie française de la rattraper au championnat.
Ni Toro Rosso, avec un Pierre Gasly qui termine à la porte des points quand son coéquipier Brendon Hartley a été contraint à l’abandon, ni Williams, qui fermait la marche une nouvelle fois, ne sortiront bien heureuses de ce week-end Autrichien.
Si la petite sœur de RedBull est parfois en mesure de produire de belles performances, c’est toujours aussi compliqué du coté de Grove. Robert Kubica, qui a roulé lors de la 1ère séance libre du vendredi matin laissait peu de place au doute en déclarant que rien n’allait sur la monoplace.
Après ce grand-prix d’Autriche, les dés sont donc à nouveau jetés et tout est relancé. Avec l’esprit mal placé, on en viendrait presque à croire qu’un scénario a été parfaitement écrit à l’avance, tant tout est parfait pour relancer l’intérêt du championnat après chaque épreuve. Nous voici donc avec trois écuries de tête capable de l’emporter, et 4 écuries en lutte pour la 4ème place.
Certes ces deux groupes sont séparés par un écart abyssal, mais au moins assistons-nous à de la bagarre à tous les étages et ne pouvons que nous en réjouir. Un Max Verstappen retrouvé est aussi n’en doutons pas l’assurance de futures passes d’armes acharnées, comme devrait l’être celle entre Lewis Hamilton et Sebastian Vettel. Ce grand-prix nous a enfin offert une belle confrontation roues contres roues, gageons que ce ne soit pas dernière à mesure que l’intensité du championnat va augmenter.
Ferrari, Mercedes, RedBull, il est bien hasardeux de dégager un grand favori, et c’est très bien ainsi. Pas le temps de souffler et tout ce petit monde se retrouve dès ce week-end sur le magnifique en hautement spectaculaire tracé britannique de Silverstone. On est souvent déçu quand les attentes sont élevées, mais il est compliqué de ne pas être impatient dans le cas présent !
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