Hyundai inaugure la griffe N sur la compacte i30.
L’automobile n’est pas un bien de consommation rationnel. Vecteur historique d’émancipation par la mobilité individuelle, objet de fascination pour la vitesse et la beauté, rien ou si peu dans notre consommation de l’automobile n’est entièrement rationnel. Certains constructeurs l’ont toujours su, certains ont été jusqu’à l’oublier, à leur dépens, avant de faire machine arrière. Et certains l’ont compris, et appris et appliqué. Hyundai fait partie de cette troisième catégorie. Après avoir conquis des parts de marché avec des voitures au rapport prix/équipement redoutablement attractif, Hyundai devait s’occuper de l’hémisphère droit du cerveau. Hyundai devait amener de l’émotion à son image et à sa gamme. Ainsi naquit N.
Le label N a trois racines. La première est Namyang, le siège de la recherche et développement de Hyundai en Corée, au sud de Seoul. La seconde est l’incontournable Nürburgring, où la marque a ouvert un centre de mise au point en 2013. Puis il y a une symbolique plus torturée où Hyundai voit dans le N le dessin d’une chicane sur circuit, le juge de paix de l’équilibre d’une voiture de sport. N s’accompagne d’un investissement en compétition avec un retour au championnat WRC en 2014 après un hiatus de dix ans.
Pour sa première N, Hyundai a choisi le segment ultra-compétitif des compactes sportives en partant de la placide i30 comme base. Son 4 cylindres en ligne aux cotes carrées (86×86 mm) a une parenté relativement proche avec le moteur de la Mitsubishi Lancer Evolution X, parenté qui trouve ses racines dans le consortium Global Engine Manufacturing Alliance qui unit éphémèrement Chrysler, Hyundai et Mitsubishi. Ce groupe de la famille Theta n’est pas nouveau puisqu’il a déjà officié comme option raisonnable dans le défunt coupé Genesis. Il développe 353 Nm entre 1450 et 4700 t/min, avec un pic à 378 Nm en overboost entre 1750 et 4200 t/min. La puissance culmine à 275 chevaux à 6000 t/min. Une variante à 250 chevaux est disponible sur certains marchés comme l’Allemagne par exemple, mais ni en Suisse ni en France.
Une boîte manuelle à 6 rapports canalise le couple vers les seules roues avant, s’appuyant sur un différentiel piloté dénommé E-LSD, soit un système à embrayage multidisque piloté analogue au système VAQ qu équipe dans le groupe Volkswagen les Golf GTI ou Leon Cupra par exemple. Le composant est conçu par la filiale Wia du groupe Hyundai. En principe, ce type de différentiel piloté est capable d’anticiper les situations où le différentiel doit être fermé, par exemple avant même que le couple déboule en forte accélération, ou lorsqu’une forte accélération latérale est détectée. Hyundai en dit (trop) peu sur les éléments pris en compte dans la logique de gestion.
Et ce différentiel a fort à faire sur nos bases d’essai alpines, avec un festival de courbes et épingles de tous rayons, un terrain qui pardonne peu à une traction sportive coupleuse. Et les premières impressions sont plutôt encourageantes. La position de conduite est tributaire des gènes de l’i30, plutôt assise qu’allongée, et l’ambiance intérieure plutôt austère n’a pas le cachet résolument racing d’une Civic Type R, mais l’i30N se rachète avec une sonorité moteur flatteuse dès que le 4 cylindres tourne.
Hyundai a pris l’option d’une i30N hyper configurable, lui donnant même le nom de N Grin Control System (Système de contrôle du sourire N, traduit littéralement). L’énumération des possibilités serait longuette, nous allons donc résumer ainsi: tout ou presque est configurable sur trois niveaux. En plus de pouvoir modifier les paramètres en roulant, deux touches bleu lavande (le Performance Blue de Hyundai) sur le volant multifonctions permettent d’appeler d’un doigt 1) le mode N avec tous les paramètres au plus sportif ou 2) un mode individuel configurable. Il n’est donc pas indispensable d’aller fourrager dans les sous-menus pour attaquer votre série de virolets favoris.
Et attaquer, l’i30N y est tout-à-fait disposée. Les sièges offrent un très bon maintien du dos et des épaules à défaut d’être particulièrement théâtraux dans leur dessin, ce qui permet de reporter son attention sur les gestes et interfaces. La commande de boîte est de bonne qualité, les débattements courts et précis et les verrouillages doux, même si celui du troisième rapport m’est apparu un peu lent. La disposition du pédalier force une gymnastique extrême des chevilles pour réaliser le talon pointe, ce qui rend la présence du mécanisme de rev matching – lui aussi configurable – bienvenue pour les flemmards. L’égalisation du régime est adéquate, mais elle arrive forcément avec un temps de retard, lorsque le rapport est engagé, et non pas au point mort. Techniquement logique – l’unité de contrôle ne sait pas quel rapport sera engagé jusqu’à ce qu’il le soit, mais déconcertant à l’usage.
Le 4 cylindres Theta n’est peut-être pas le dernier mot en termes de puissance spécifique, mais ses prestations sont très bonnes. Le couple est omniprésent, le lag bien contenu, l’allonge appréciable pour un moteur suralimenté et, ce qui ne gâche certainement rien, la sonorité émanant de la ligne d’échappement est assez réussie: rauque, elle prend du volume en mode Sport+, et s’agrémente de quelques retours à chaque lever de pied. Pas de “prout” ou “pop” maniéré à la montée des rapports, l’artifice est réservé aux boîtes automatiques, mais j’ai trouvé la signature sonore attrayante.
Les performances en tant que telles sont de bon niveau, mais ne font pas de l’i30N une bombe pour autant. Les 6.1s revendiqués sur le 0-100 km/h sont une issue favorable pour une auto pesée à 1483 kg, ce qui paraît élevé. Volant en main toutefois, les reprises sont franches, et la santé de ce moteur est une invitation à la conduite sportive, ce qui nous ramène – enfin – au différentiel piloté.
Et le résultat est très satisfaisant. Le couple passe bien au sol (sec, fut-il utile de le préciser), même en sortie d’épingle à pleine charge sur le deuxième rapport, la tâche se répartissant bien entre la paire de Pirelli PZero en 235/35R19. L’assistance de direction est assez virile dans son réglage le plus agressif, mais je n’ai pas été gêné par des renvois de couple dans la direction. Pourchassé par quelques motards téméraires dans la montée du col du Grimsel au petit matin, j’ai trouvé le cocktail rigoureux et efficace, que ce soit dans les lacets serrés ou les enfilades plus rapides. Dans les gros appuis, le train arrière s’inscrit de manière volontaire, mais sans devenir léger et scabreux.
En conduite calme, la voiture est très capable et s’acquittera des obligations routinières de semaine sans poser de difficulté. Le niveau de confort est bon grâce à l’amortissement réglable, et l’équipement est par ailleurs très complet. La seule réelle fausse note pratique se situe au niveau de la barre anti-rapprochement arrière qui entame le volume du coffre et entrave les possibilités de chargement une fois les dossiers arrière rabattus.
Avec l’i30N Hyundai réussit indéniablement son entrée dans le segment des compactes sportives. Difficile de dire dans quelle mesure le débauchage d’Albert Biermann de la division Motorsport de BMW y a contribué, mais le résultat est probant. Hyundai a eu la sagesse de ne pas aller chercher une définition trop extrême ou typée, et le résultat couvre avec bonheur un large spectre d’utilisation qui va du pendulage quotidien à la virée plaisir, avec la clef d’une expérience de conduite de très bon niveau. Proposée à un prix très attractif face à la concurrence, le rapport aux prestations délivrées est excellent, d’autant plus que la qualité de l’intérieur est aux standards Hyundai, soit de bonne facture.
L’absence de boîte automatique à convertisseur ou double embrayage constituera un obstacle pour certain(e)s et est un peu incohérent avec la définition polyvalente de l’i30N, mais si le maniement d’un embrayage et d’une boîte manuelle dans les encombrements quotidiens ne vous rebute pas, cette Hyundai est une très sérieuse compétitrice dans la catégorie.
Prix et options du véhicule essayé
Hyundai i30N | CHF 36’990 | € 34’800 |
Pack N-Exclusive | CHF 4’910 | – |
Peinture Performance Blue | CHF 800 | € 200 |
Total | CHF 42’700 | € 35’000 |
Face à la concurrence – caractéristiques techniques
Hyundai i30N | Honda Civic Type-R GT | Peugeot 308 GTI | Renault Megane IV RS |
|
Moteur | L4 turbo 1998 cm3 | L4 VTEC turbo 1996cm3 | L4 turbo 1598 cm3 | L4 turbo 1798 cm3 |
Puissance (ch / t/min) | 275 / 6000 | 320 / 6500 | 270 / 6000 | 280 / 6000 |
Couple (Nm / tr/min) | 353 / 1450–4700 378 / 1750-4200 |
400 / 2500-4500 | 330 / 1900-5500 | 390 / 2400 |
Transmission | traction | traction | traction | traction |
Boite à vitesses | manuelle 6 | manuelle 6 | manuelle 6 | EDC 6 / manuelle 6 |
RPP (kg/ch) | 5.39 | (4.31) | (4.46) | (4.84/4.76) |
Poids DIN (constr.) | 1483 (1509) 61.4%AV 38.6%AR |
(1380) | (1205) | (1355/1332) |
0-100 km/h (sec.) | 6.1 | 5.8 | 6.0 | 6.0 |
Vitesse max. (km/h) | 250 | 272 | 250 | 250 |
Conso. Mixte (constr.) | 10.46 (7.1) | 10.4 (7.7) | 7.2 (6.0) | (7.0/7.2) |
Réservoir (l) | 50 | 46 | 53 | 50 |
Emissions CO2 (g/km) | 163 | 176 | 139 | N.C. |
Longueur (mm) | 4335 | 4557 | 4253 | 4359 |
Largeur (mm) | 1795 | 1877 / 2076 | 1863/2043 | 1814/2058 |
Hauteur (mm) | 1447 | 1434 | 1446 | 1447 |
Empattement (mm) | 2650 | 2699 | 2617 | 2669 |
Coffre (L) | 381/1287 | 420 / 786 | 420 | 380 / 1270 |
Pneumatiques | 235/35 R19 | 245/30 R20 | 235/35 R19 | 235/40 R18 |
Prix de base (CHF) | 36’990 | 42’800 | 42’500 | 39’900/38’200 |
Prix de base (EUR) | 34’800 | 39’880 | 37’700 | 39’400/37’600 |
Nos remerciements à Hyundai Suisse pour le prêt de cette i30N.
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