Essai Jaguar E-Pace D180 AWD: nouveau challenger

Un design accrocheur, un moteur qui l’est moins.

Nous vous présentions au printemps 2017 le premier SUV de la marque anglaise dénommé F-Pace. Moins d’une année plus tard, la famille Pace s’agrandi avec la venue de l’E-Pace, plus compact, mais bénéficiant des mêmes ingrédients que son ainé. Pour le même résultat ? C’est à voir.

Indéniablement porté par le succès, dans cette gamme, du Range Rover Evoque ainsi que par l’apparition de plus en plus fréquente du F-Pace sur nos routes, la firme de Coventry agrandit la famille “Pace” en nous proposant sa vision du crossover compact de 4.40m. Alliant standing, design et finition Jaguar, notre modèle se pose en tant que nouveau challenger dans un segment dominé jusqu’ici par les marques allemandes. BMW a renouvelé son X1 en 2016, VW fait très fort avec son nouveau Tiguan alors qu’Audi va riposter avec un Q3 de deuxième génération attendu en 2019 et Mercedes devrait logiquement remplacer sous peu le GLA par un dérivé de la nouvelle Classe A. Pour s’imposer dans un segment aussi compétitif, il est impératif que la cohérence soit au rendez-vous.

Si cinq niveaux de puissance sont disponibles dès le lancement de l’E-Pace, il n’existe que deux bloc différents, un essence et un diesel. Le moteur “P” de 1’998cm3, essence donc, se décline en P250 développant 249 ch à 5’500 tr/min et 365 Nm de 1’200 à 4’500 t/min et en P300 pour un bonus de 51ch et 35Nm dans les mêmes plages. Les déclinaisons diesel de 1’999 cm3 vont du D150 de 150 ch à 3’500 t/min et 380 Nm à 1’750 tr/min jusqu’au D240 arrivant à 240 ch à 4’000 t/min pour 500 Nm dès 1’500 t/min. Notre modèle d’essai est équipé du D180 qui affiche 180 ch à 4’000 t/min pour 430 Nm à 1’750 t/min, couplé à une transmission intégrale et une boite automatique à neuf rapports, avec la finition “First Edition”, la plus prestigieuse.

La couleur “Firenze Red” amène une sportivité toute italienne et le design dans son ensemble est très dynamique. Enormes prises d’air à l’avant en nid d’abeille, projecteurs avants en amande étirés vers des lignes très pures et sobres pour se couper nettes sur un hayon quasiment identique au F-Pace, c’est magnifique. Ajoutez à cela des phares arrières au design proche d’une F-Type et une double sortie d’échappement, le style de manque pas de caractère. Si les jantes de 19 pouces ne remplissent pas les critères visuels de sportivité, je peux vous rassurer en vous signalant qu’il s’agit de la monte hiver en 235/55 R19. En été, des 245/45 R20 feront mieux l’affaire.

Enfin, ce sont les portes-à-faux très courts tant devant que derrière qui étonnent le plus sur cet E-Pace, ainsi que cet aspect coupé à l’arrière très strict, alors que le reste est très fluide. Ces aspects ont évidemment une incidence sur le comportement routier mais c’est aussi l’habitabilité intérieure qui est la grande gagnante.

De grandes portes s’ouvrant généreusement pour s’installer devant mais également une bonne hauteur sous plafond pour s’asseoir derrière, cet habitacle transporte sans soucis quatre adultes pour un long trajet. Si les places avant sont bien délimitées par un tunnel central très haut, transmission intégrale oblige, les deux places extérieures arrières sont bien creusées pour permettre d’y être confortable ou d’installer un système ISOFIX pour les enfants. Le coffre est remarquable tant dans son volume de 577 L que dans sa surface de pose. Seule petite remarque, la hauteur disponible peut faire défaut, incidence directe du design coupé du hayon.

Si la disposition des instruments est assez bien pensée lorsque nous sommes derrière le volant, le bouton de mise en marche du moteur est bien caché par la jante du volant. Le sélecteur à impulsion de la boite automatique à neuf rapports est facile à prendre en main et les différentes manipulations aisées. Le grand écran tactile central profite d’une résolution vraiment convaincante alors que mon coup de coeur se situe au niveau des boutons de réglage de la ventilation, avec écran incrusté au centre, donnant vraiment un rendu exclusif à cet intérieur. Les matériaux utilisés sont excellents et bien finis alors que les sièges, encore beaux neufs, glissent un peu, laissant apparaître un certain manque de maintien.

A la mise en marche du bloc D180, la déception est immédiate. Un bruit horrible, typique d’un diesel, arrive dans l’habitacle qui manque, pour moi, cruellement d’insonorisation. Premiers tours de roues et l’évolution à basse vitesse est aisée mais toujours péjorée par cette sonorité caverneuse qui avait déjà été remarquée sur le F-Pace. Mode de conduite “normal”, c’est sur un tapis volant que nous nous trouvons tant les passages de rapports, pourtant fréquents, sont peu perceptibles. Les dimensions extérieures de la bête sont faciles à se mettre dans l’oeil et le rayon de braquage de 11.46 m permet de se faufiler partout. C’est simple, entre nos mains, l’E-Pace ne fait pas ses 4’395 mm de long pour 2’088 mm de large aux rétroviseurs.

En évolution urbaine, c’est avec surprise que je découvre très vite les limites du package moteur-boîte. Lent pour se décider à rétrograder, poussif dans ses montées en régime et un manque d’allonge typique de la plupart des turbodiesels, certaines évolutions sont un peu laborieuses. Le rapport poids/puissance est également le plus élevé des modèles comparés en fin d’article, une illustration de l’embonpoint de l’E-Pace, plus lourd que la concurrence d’au moins 110 kg, ce qui semble être une mauvaise habitude chez Jaguar.

Combinez à ceci une boite qui doit composer avec l’inertie du bloc diesel, d’un turbo lag bien présent et des changements de rapport fréquents liés à l’étagement de la boîte à neuf rapports, et l’impression d’un manque de dynamisme dérangeant devient tenace. La boîte n’est pas la seule cause car elle est agréable dans l’exécution des changements de rapport. C’est plutôt la lenteur de sa gestion qui est décevante et les palettes solidaires du volant n’apportent pas grand chose, tant la sélection du bon rapport sur les neuf disponibles devient vite astreignante. Agir ou subir, telle est la question.

Ne pensez pas que tout s’arrange dès que nous quittons la ville car le moteur s’avère tout aussi poussif en montagne. Si le tangage est bien maîtrisé, l’impression de roulis est tenace. Reste à savoir si il faut l’associer au poids, à la hauteur du centre de gravité, ou encore aux pneus d’hiver de taille plus haute ? Les relances en sortie de courbe sont toujours aussi anémiques, buttant à nouveau dans les carrences du moteur et la gestion de la boîte. Il n’y a qu’en mode “Dynamic” couplé au sélecteur en mode “Sport” qui peut, ça et là, donner quelques satisfactions mais tout ceci reste bien limité et amène à une consommation plus élevée. Les 9.3s revendiqués sur le 0-100 km/h sont largement derrière les 7.8-7.9s affichés par le trio X1, Q3 et Tiguan, et ça se ressent au volant.

Mais tout n’est pas à jeter pour autant ! L’autoroute est un régal tant au niveau de l’insonorisation des bruits d’air que de la suspension. Le régime moteur tombant aux alentours de 1’800 t/min, le bruit du bloc est couvert et les autres bruits parasites bien mieux maîtrisés. L’amortissement est prévenant,  la direction précise et la position de conduite haute est vraiment agréable pour dominer son sujet.

Et que dire du comportement “off-road” ? Si vous avez évité les chutes de neige de début mars 2018, ce n’est pas mon cas mais c’est bien la première fois que je n’ai même pas eu une goutte de sueur pour slalomer entre les inévitables citadins équipés de pneus été. Une motricité de tous les instants, un comportement sûr et rassurant, un mode “Snow” ayant une incidence plus que bénéfique sur la boite à vitesse, la prestation est convaince. Quid d’une chaussée laissant place aux cailloux plutôt qu’à l’asphalte? Si mes expériences ne sont pas comparables au Camel Trophy, les chemins empruntés ont été avalées avec brio et dans un confort au-dessus de ce que j’attendais. Jaguar a réussi à donner des gênes de Land Rover dans son E-Pace.

Ce modèle amène donc de la nouveauté dans ce segment tant par son design distinctif que par une finition dépassant, selon moi, celle des concurrentes. La sécurité recherchée par l’adoption d’une transmission intégrale est plus que convaincante, alors que l’équipement embarqué (affichage tête-haute, régulateur adaptatif, assistant de ligne, etc.) sont équivalant à la gamme dans la finition à disposition, soit “First Edition”. Une consommation de 10.0 L/100kms durant l’essai est clairement au-dessus des chiffres NEDC annoncés de 5.6L, différence qu’il faut remettre dans le contexte d’un climat très froid durant l’essai, d’un moteur accusant à peine plus de 1’000 kms et de divers essais “poussés” pour accrocher les limites d’un package moteur-boite décidément bien décevant. Heureusement que les alternatives P250 et P300 vous tendent les bras !

Côté tarifs, si le prix d’appel est convaincant, le pack “First Edition” vous coûtera CHF 23’000. Toutefois, il n’y a plus rien à ajouter et le prix final de CHF 72’700 est aligné sur la concurrence lorsque vous vous lâchez sur les options. Si ce premier SUV compact n’est pas parfait, force est de constater que Jaguar ose bien plus depuis le rachat du groupe par Tata Motors. Si je devais tirer un parallèle avec un autre segment archi-dominé par les marques allemandes, ce Jaguar E-Pace est peut-être aux crossovers compacts ce que l’Alfa Romeo Giulia Veloce est aux berlines du segment D: un challenger amenant une fraîcheur bienvenue mais dont les défauts de jeunesse devront être corrigés lors d’une deuxième génération.

Prix et configuration du modèle testé

Jaguar E-Pace D180 AWD CHF 47’000 EUR 42’800
Boite automatique CHF 2’700 de série
Pack “First Edition” CHF 23’000 EUR 20’900
Total CHF 72’700 EUR 63’700

Face à la concurrence

Jaguar E-Pace
D180 AWD
Volkswagen Tiguan
TDI SCR
BMW X1 xDrive20d Audi Q3 2.0 TDi Quattro
Moteur L4 1999 cm3 L4 1968 cm3 L4 1995 cm3 L4 1968 cm3
Puissance (ch / t/min) 180 / 4000 190 / 3500-4000 190 / 4000 184 / 3500-4000
Couple (Nm / tr/min) 430 / 1750 400 / 1900-3300 350 / 1750-3000 380 / 1750-3250
Transmission AWD 4MOTION xDrive Quattro
Boite à vitesses  man. 6 / aut. 9 DSG 7 Steptronic 8 S-tronic 7
RPP (kg/ch) 10.17 / 10.24 9.06 8.73 9.23
Poids DIN (constr.) 1831 / 1843 (1723) (1660) (1700)
0-100 km/h (sec.) 9.3 7.9 7.8 7.9
Vitesse max. (km/h) 205 212 205 219
Consommation mixte (constr.) 10.0 (5.6) (5.7) (5.8) (5.5)
Réservoir (l) 56 58 61 64
Emissions CO2 (g/km) 147 149 153 156
Longueur (mm) 4395 4486 4454 4388
Largeur (mm) 1984 / 2088 1839 / 2099 1798 / 2006 1831 / 2019
Hauteur (mm) 1649 1643 1545 1608
Empattement (mm) 2681 2682 2760 2603
Coffre 577 615 420 460
Pneumatiques 245/45 R20 235/55 R18 225/50 R17 235/55 R17
Prix de base (CHF) 47’000 49’650 (Highline) 49’100 50’050 (Design)
Prix de base (EUR) 42’800 49’150 (Carat Excl.) 43’600 48’110 (Ambition)

Nos remerciements à Jaguar Suisse pour le prêt de ce E-Pace.

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