La Porsche 991.2 Targa 4S, ou l’expression ultime de l’art de vivre en 911 ?
Après mon périple autobahnesque en Carrera 4S, je m’étais promis de tester la Porsche 991.2 dans un terrain plus sélectif en termes de châssis et de motorisation que les grands axes allemands. Chose promise, chose dûe, c’est dans nos alpes bien helvétiques que nous nous retrouvons pour quelques jours avec une autre 991 phase 2. Au menu, la vocation première d’une 911, le Grand Tourisme, l’évasion, ce compromis si ambitieux entre l’évasion, le confort la praticité, et les sensations de conduite. Le pratique et l’agréable, la docilité et la sportivité, le grand écart.
Et c’est cette fois en configuration Targa 4S que nous allons réaliser cet essai. Troisième carrosserie après le coupé et le cabriolet, la Targa se positionne en alternative directe à ce dernier. Elle s’affiche d’ailleurs à un tarif rigoureusement identique à la version avec capote en toile semi-rigide. Elle reprend d’ailleurs la conception, avec un hardtop en toile recouvrant un squelette en magnésium, hardtop qui vient prendre place sous la verrière, derrière les deux strapontins arrière. Le mécanisme est élégant, mais a un point faible de taille: il ne fonctionne qu’à l’arrêt, alors que la plupart des cabriolets modernes, et la 911 Carrera Cabriolet en particulier, autorisent une ouverture/fermeture jusqu’à 50 km/h.
Notre Targa 4S est en livrée bleu graphite, une somptueuse couleur qui sied à ravir au modèle. Chatoyant au soleil, plat à l’ombre, ce bleu de lac alpin rappelle les teintes des années 60. Je trouve la ligne très réussie, l’intégration de la capote en verre très élégante, harmonieusement mariée avec la ligne de la 991.
Avant de pouvoir nous mettre en route vers l’Engadine, la première étape, cruciale, est le chargement des bagages: deux petites valises, un sac photo, un sac à dos pour aller se dégourdir les mollets et deux paires de chaussures de marche. La 911 démontre une fois de plus sa polyvalence avec un coffre avant utilisable, et un espace très appréciable si l’on rabat les deux dossiers des sièges arrière et sécurise la charge avec les ceintures de sécurité. Le bonus Targa est l’espace dévolu au rangement du toit … si on ne l’ouvre pas. L’accès à ces deux volumes est facilité par l’ouverture du toit, un avantage face au coupé (accès et volume) et face au cabriolet (volume). Examen réussi, peu de GTs offrent plus de capacité et de modularité de chargement de bagages.
Cap sur Andermatt par l’A2 pour quelques courtes dizaines de kilomètres d’autoroute. La Targa est silencieuse, avec un confort qu’il serait difficile de discerner d’une Carrera coupé. Je ne peux m’empêcher de regretter que le nouveau mécanisme de la 991 Targa n’est pas compatible avec un toit en verre, ingrédient central sur les 993 et 997 Targa. C’est la cerise qu’il manque sur ce gâteau: la luminosité et la vision panoramique qu’un toit vitré procure. Le col de l’Oberalp est la première opportunité de se réacclimater au comportement dynamique de la 991, avec la retenue qu’imposent les bagages embarqués.
Malgré ses 22’000 CHF d’équipements, notre Targa 4S est en configuration de base. Elle n’est pas équipée des deux options susceptibles d’affecter son comportement dynamique: le système d’anti-roulis actif PDCC (CHF 3920) et le système de roues arrières directrices (CHF 2’750). Sur la base de notre expérience avec la 991.2 GT3 qui incorpore les 4 roues directrices de série, d’essais officieux de 991.2 Carrera avec roues directrices, et de nos essais de 991.1 équipées du PDCC, nous avons une prédisposition plutôt (voire très) favorable à l’égard de ces technologies, mais elles sont inexplicablement rares en flotte de presse.
C’est donc avec un châssis complètement standard que nous réalisons ce test, juste équipé de la suspension réglable de série PASM. Dans son réglage normal, elle me surprend par sa souplesse. Des pompages longitudinaux ou diagonaux sont perceptibles sur certaines compressions et le mode Sport paraît moins ferme que sur une Carrera. L’échappement sport optionnel est également assez discret. La différence de volume entre les deux modes est perceptible, et quelques borborygmes sont induits si l’on sélectionne les modes Sport ou Sport Plus par la molette placée sur le volant.
La première impression qui se dégage est d’une définition en légère retenue, comme si Porsche avait voulu signer un produit plus orienté lifestyle, plus prévenant. Il est difficile d’être catégorique sans une comparaison directe, mais nous avons emmené sur cet essai une 991.1 Carrera S Cabriolet, équipée – elle – du PDCC, des supports moteur actifs: Targa contre Cabriolet, 3.0L biturbo contre 3.8L atmo, et le somptueux col de la Bernina comme juge de paix.
La série 991.2 a vu le centre névralgique du portefeuille Porsche, la 911, passer à la suralimentation. Le 6 cylindres à plat a perdu 900 cm3 de cylindrée pour passer sous la barre des 3 litres (2981 cm3) et est gavé par deux turbocompresseurs. Le couple maxi est de 500 Nm de 1700 à 5000 t/min, et la puissance atteint 420 ch à 6500 t/min. La déclinaison GTS, disponible sur les trois carrosseries, ajoute 50 Nm et 30 ch à ces valeurs.
J’ai beaucoup de plaisir à remonter à bord de la 991 “atmo” pour reprendre quelques références. L’expérience de conduite est dominée par le charisme du PSE (Porsche Sports Exhaust), en l’occurrence bien libéré avec les kilomètres. Une symphonie pour pistons et soupapes, une ode à la joie de la conduite au grand air. La sonorité en charge est rauque, ample, et les pétarades en retenue ont un côté aléatoire charmant. En comparaison, le nouveau biturbo offre un rendu sonore plus synthétique, qui s’agrémente en retenue d’un ploum ploum ploum lorsque les modes Sport/Plus sont activés, un peu machinal et convenu.
Le 3.8 atmo a de bien beaux restes. Il ne peut faire concurrence à son alter ego suralimenté en couple maxi, mais il est souple, bien rempli, ses montées en régime sont toujours aussi enthousiasmante et sa réponse à la pédale de gaz crystalline. En comparaison, le 3.0 biturbo impose un mode d’emploi adapté. En sortie d’épingle à bas régime, le temps de réponse est perceptible et on gagne beaucoup à remettre un filet de gaz dès le point de braquage pour que la plomberie soit sous pression dès la corde. Si ces conditions sont remplies, la disponibilité de couple en abondance catapulte la Targa 4S avec une vigueur que l’atmo peu rarement égaler, faute de pouvoir toujours trouver le rapport adéquat pour ressortir entre 4 et 5000 t/min.
C’est indéniable, le 3.0L biturbo a perdu un peu en spontanéité, et plus significativement en musicalité par rapport à son prédécesseur, mais ses performances sont étincelantes dès l’instant où l’on applique les recettes adéquates. Sur un terrain comme les amples lacets du versant sud de la Bernina, la 991.2 distille des sensations de haut niveau, accélérant avec mordant alors que le pied droit module le débit d’air frais gavant les six cylindres.
La motricité est naturellement sans reproche, les grosses gommes de 305 passent le couple au sol sans la moindre difficulté. C’est la situation sous les 245/45ZR20 qui chaussent les jantes avant qui annonce les limites de grip en premier, que ce soit en entrée de courbe sous gros freinage, ou en sortie alors que l’arrière se charge et l’avant se déleste. Les bienfaits de l’empattement long adopté depuis la 991 restent marqués, mais j’ai parfois senti l’avant se faire léger sous grosse accélération.
Quel est l’effet de la transmission intégrale dans ces conditions ? Difficile à dire. La question est académique pour une Targa uniquement disponible en configuration 4 roues motrices. Sur le reste de la gamme 911, j’aurais tendance à articuler la réponse autour de considérations esthétiques: les 44 mm de largeur aux hanches et le joli bandeau lumineux qui orne la poupe contre 50 kg et 9000 CHF. Personnellement, j’investirais la somme dans le PDCC et les roues directrices. Un mot sur la boîte PDK: parfaite. Fidèle à sa réputation, il n’y a pas de meilleur système à double embrayage sur le marché, que ce soit en performance ou en docilité. Les conducteurs en quête de brutalité trouveront dans le mode Sport+ réponse à leurs souhaits, avec un feedback positif très marqué à la montée des rapports. J’ai préféré pour ma part le mode Sport, moins caricatural dans son action.
L’agilité dans les changements d’appui est naturellement excellente dans l’absolu, mais la Targa 4S conserve ce soupçon de souplesse. Sans même tenter de construire un parallèle avec la rigueur d’une GT3, la Targa 4S confirme au fil des kilomètres les impressions initiales de ce fin coussin de souplesse dans ses liaisons au sol. Si Porsche a volontairement induit cette différence, elle est cohérente avec la définition de la Targa: un peu moins hardcore que le cabriolet, un peu plus cajoleuse, même si vitres baissées, les reflux d’air sur la nuque sont paradoxalement un peu plus importants que sur le cabriolet.
Targa ou Cabriolet ? Tarif identique, aucune différence perceptible de rigidité, mais des nuances qui font de la Targa le choix confort – de conduite, de chargement – et du Cabriolet le choix plus sport, plus pur dans son approche. Plus léger aussi, 40kg selon Porsche, face à une Targa 4S qui pointe à 1654 kg sur nos balances.
Le 3.0L biturbo n’est pas la panacée. Il a de gros avantages, à commencer par son couple abondant, sa sobriété aussi (le 3.8L atmo a une conso plancher plus élevée), mais il a un peu perdu de la pureté qui caractérise la génération précédente. Il est capable de procurer des sensations et des performances de premier plan, mais il faut contourner son temps de réponse et se résigner à des vocalises un peu moins démonstratives. L’ensemble demeure de très haut niveau, unique par sa définition, ses aptitudes et sa polyvalence.
Prix et options du véhicule essayé
Porsche 991.2 Targa 4S | CHF 160’100 | € 135’215 |
Boîte PDK | CHF 4’280 | € 3’540 |
Intérieur tout cuir noir | CHF 4’120 | € 3’408 |
Echappement sport | CHF 3’180 | € 2’628 |
Pack Sport Chrono | CHF 2’720 | € 2’244 |
Jantes 911 Turbo 20″ | CHF 2’620 | € 2’160 |
Bleu graphite métallisé | CHF 1’440 | € 1’188 |
Assistance angles morts | CHF 850 | € 696 |
Rétroviseurs extérieurs Sport Design | CHF 660 | € 540 |
Pack design éclairage | CHF 540 | € 444 |
Affichage limitations de vitesse | CHF 510 | € 420 |
HomeLink | CHF 350 | € 288 |
Volant Sport GT | CHF 340 | € 276 |
Power Steering Plus | CHF 320 | € 264 |
Gicleurs de lave phare en couleur extérieure | CHF 250 | € 204 |
Enjoliveurs de roue colorés | CHF 200 | € 162 |
Garantie 2+2 | CHF 0 | – |
Porsche Swiss Package | CHF 0 | € 4’920 |
Prix catalogue du véhicule de test | CHF 182’480 | € 158’597 |
Face à la concurrence – caractéristiques techniques
Porsche 991.2 Targa 4S |
Aston Martin V8 Vantage S Roadster | Jaguar F-Type Convertible R AWD | Corvette Stingray Cabriolet | |
Moteur | B6 biturbo 2981 cm3 | V8 4735 cm3 | V8 compr. 5000 cm3 | V8 6162 cm3 |
Puissance (ch / t/min) | 420 / 6500 | 430 / 7300 | 550 / 6500 | 466 / 6000 |
Couple (Nm / tr/min) | 500 / 1700-5000 | 490 / 5000 | 680 / 3500 | 630 / 4600 |
Transmission | 4RM | Propulsion | 4RM | Propulsion |
Boite à vitesses | PDK 7 | Sportshift 7 | Automatique 8 | Automatique 8 |
RPP (kg/ch) | 3.94 | (3.93) | (3.17) | (3.56) |
Poids DIN (constr.) | (1600) 1654 38.4% AV/ 61.6% AR |
(1690) | (1745) | (1659) |
0-100 km/h (sec.) | 4.0 | 4.8 | 4.1 | 4.2 |
Vitesse max. (km/h) | 301 | 405 | 300 | 280 |
Conso. Mixte (constr.) | 11.65 (10.4) | (12.8) | (11.3) | (12.3) |
CO2 (g/km) | 184 | 299 | 269 | 282 |
Réservoir (l) | 68 | 80 | 70 | 70 |
Longueur (mm) | 4499 | 4385 | 4482 | 4492 |
Largeur (mm) | 1852/1978 | 1865 / 2022 | 1855/2042 | 1872 |
Hauteur (mm) | 1293 | 1270 | 1308 | 1243 |
Empattement (mm) | 2450 | 2600 | 2622 | 2710 |
Coffre (L) | 125 | 144 | 207 | 171 / 242 |
Pneus | 245/35 ZR 20 305/30 ZR 20 |
245/40 ZR 19 285/35 ZR 19 |
255 / 35 R20 295 / 30 R20 |
245/35 R19 285/30 R20 |
Prix de base (CHF) | 160’100 | 143’300 | 131’300 | 107’215 |
Prix de base (EUR) | 135’215 | 142’097 | 124’240 | 92’720 |
Nos remerciements à Porsche Suisse pour le prêt de cette 911 Targa 4S.
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