Essai Opel Ampera – Rencontre du 3ème type
Conséquence de nos mésaventures électriques, nous avons donc eu recours au moteur thermique sur une part significative de nos déplacements, la voiture utilisant alors comme source d’énergie le carburant de son réservoir et les kWh d’énergie cinétique récupérés en décélération. Bilan : 5.3 L/100km de carburant (en sus des 28.4 kWh provenant du secteur), une valeur à peine en ligne avec la consommation d’une Toyota Prius II ou Prius III sur le même types de trajet. La capacité de recharge supérieure offerte par les batteries, utile lors de très longues descentes, compense à peine le surcroît de poids liée au réservoir à électrons. L’Ampera n’est pas légère, nous l’avons mesurée à 1664kg avec le plein, dont 61.6% sur le train avant, une répartition surprenante en regard de la position reculée du pack Lithium Ion.
Il est difficile de placer ces valeurs dans le contexte d’un rythme de conduite. Point commun pour le moins singulier à la plupart des voitures très orientées conso (Prius et Leaf par exemple), l’absence d’une indication de la moyenne horaire sur les instruments de bord. Nous avons certes fait plusieurs trajets autoroutiers sur 1500km d’essai, dont quelques pointes sur autobahn à la vitesse maximale bridée (169 km/h indiqués). Nous avons également emmené l’Ampera sur des itinéraires montagneux en toute confiance et aisance, l’angoisse de l’autonomie qui nous tenaillait dans la Leaf n’ayant pas lieu d’être avec les 35L d’essence embarqués et la possibilité de refaire le plein en 3 minutes au sein du réseau ubiquitaire de stations-service. L’hybride rechargeable rassemble le meilleur des deux mondes, l’agrément et l’économie de la conduite électrique combiné à la polyvalence et praticité du thermique. Reste qu’une valeur de plus de 5L/100km en mode hybride n’a rien de spectaculaire et représente plus une issue logique qu’une véritable déception.
Le rituel de conduite est immuable. Même batteries vides, l’Ampera ne démarre jamais son moteur en manœuvres, conservant un minimum d’énergie pour satisfaire les attentes du quidam observateur : la magie et l’élégance du silence. La logique des algorithmes de charge est difficile à déceler mais il semble que la Volt maintient un flux tendu d’énergie entre son moteur thermique et son moteur électrique, le but étant de garder un maximum de capacité à disposition pour une recharge sur le secteur. Après la commutation en mode thermique, l’Ampera égrène alors les décilitres de super sans plomb extraits du réservoir, et la consommation d’essence moyenne augmente inexorablement. Avec le bruit de roulement et à vitesse stabilisée sur autoroute, le 1.4L est presque inaudible, mais en ralentissant ou en accélérant, le bourdonnement du quatre cylindres est perceptible, passant d’un ralenti accéléré à de lentes évolutions vers des régimes plus élevés, mais qui n’apparaissent jamais excessifs (régime maxi de 4800 t/min). Il n’y a pas de relation immédiate entre la pédale d’accélérateur et le régime moteur, l’effet est un peu déroutant mais on s’y habitue sans difficulté.
Comme sur le système Hybrid Synergy Drive de Toyota ou le mode Eco de la Nissan Leaf, Opel offre un mode de régénération accru (mode L sur l’échelle de sélection PRNDL), mais sa sélection n’est pas aussi ergonomique et bloquée dans nombre de cas qu’on peut corréler avec la vitesse et/ou la température des batteries. Le frein moteur devient alors prononcé, permettant à la fois de ralentir la voiture sur de fortes déclivités et d’en récupérer un maximum d’énergie. En conduite rapide, l’Ampera est étonnamment à ses aises, encaissant grandes courbes et changement d’appuis avec composition, autre indice de la faible hauteur du centre de gravité de l’auto. Les descentes de cols sont toutefois à préférer aux ascensions. Si le couple conséquent et la constance de la poussée permettent de sprinter d’un feu rouge à l’autre en laissant sur place le reste du trafic, le rapport poids/puissance dépasse les 11 kg/ch (11.09 pour être précis) et donne une bonne mesure des performances de l’auto : suffisantes, mais pas sportives.
L’habitabilité offerte aux passagers avant est bonne, plus comptée à l’arrière et le coffre n’offre que 310L de volume de charge et, comme c’est trop souvent le cas avec les autos américaines, le seuil de chargement est élevé. La sellerie surpiquée fait bonne impression, mais les grandes surfaces peintes en couleur anthracite nous ramènent à la difficile réalité économique des hybrides et électriques : la technologie est très chère, et tant finition qu’équipement et performances sont difficiles à réconcilier avec le tarif de l’auto. Si l’hybride d’appoint s’est démocratisé en devenant ubiquitaire dans les catalogues des grands constructeurs, l’électrique rechargeable est à ses balbutiements en terme de pénétration du marché et se confronte à des obstacles économiques considérables. La voie choisie par Chevrolet (et par conséquent Opel) avec cette Volt/Ampera a le mérite de déboucher sur une auto polyvalente et cohérente, à ce titre plus convaincante que la Nissan Leaf. Les clients ne s’y trompent d’ailleurs pas. Au premier semestre 2012, Opel a vendu 7x plus d’Ampera sur le marché suisse que Nissan de Leaf (159 contre 26), mais dans des volumes qui restent faibles. Reste l’inconnue Toyota avec le lancement à l’automne de la Prius Plug In à un tarif qui n’était pas encore divulgué. Dans l’intervalle, si le luxe de l’électrique vous tente et que les 129’900 CHF d’une Fisker Karma vous effrayent, l’Ampera est le meilleur produit du marché.