Essai BMW X6 ActiveHybrid: politiquement correct ?


BMW dote son coupé SUV d’un système de propulsion hybride.

Lorsque Toyota commence la vente de son premier modèle à propulsion hybride en 1997 au Japon, puis en 2001 dans le reste du monde, le moins que l’on puisse dire est que les constructeurs européens ne se sont pas précipités sur leurs planches à dessin pour venir à leur tour avec des solutions similaires. Une certaine condescendance était de mise chez les décideurs des grandes marques du vieux continent, et probablement aussi auprès de leur clientèle. Le changement d’attitude des constructeurs sur cette technologie est matérialisé au salon de l’automobile IAA 2007 de Francfort par les annonces des allemands BMW, Mercedes, Audi et Porsche de futurs modèles hybrides. Les promesses de l’automne 2007 sont maintenant devenues réalité, ce BMW X6 ActiveHybrid en est une belle illustration.

Le système de propulsion hybride installé dans cette BMW est le fruit du « Global Hybrid Cooperation » composé de General Motors, Daimler, Chrysler et BMW. Ce groupe basé chez GM à Troy dans le Michigan a conçu une transmission sophistiquée composée de deux moteurs électriques, trois trains épicycloïdaux et quatre embrayages, le tout étant intégré à la boite de vitesse automatique. Ces moteurs sont alimentés par une batterie NiMH de 2.4 kWh. Le concept global est un “full hybrid”, donc permettant de faire avancer la voiture en tout électrique, tout essence ou une combinaison des deux. A noter que la BMW série 7 ActiveHybrid ne possède qu’un système “mild hybrid” où l’unique moteur électrique ne sert qu’à augmenter le couple sans pouvoir faire avancer la voiture à lui tout seul.

Revenons au X6. BMW se démarque complètement par rapport à Toyota / Lexus, dont les modèles hybrides sont optimisés pour une faible consommation de carburant, au détriment de la performance et du plaisir de conduite. Pour commencer, histoire d’avoir une bonne base de travail, BMW a choisi le moteur V8 à double turbocompresseur de 4.4l développant 407 ch et 600 Nm, auquel s’ajoutent les deux moteurs électrique de 86 ch et 91 ch respectivement, pour une puissance combinée de 485 ch et un couple de 780 Nm. Passablement de modifications sur le V8 ont été nécessaire pour assurer le fonctionnement complet de la voiture en tout électrique. Parmi elles, les compresseurs de climatisation, la direction assistée et les pompes à eau ne sont plus entrainés par une courroie sur le vilebrequin mais par des moteurs électriques spécifiques. Le démarreur et l’alternateur sont également passés à la trappe, leur fonction étant assurée par les moteurs/générateurs du système hybride.

 

La transmission possède deux modes de fonctionnement bien distincts, totalement transparents et imperceptibles par les occupants du véhicule. Le premier intervient au démarrage et à faible vitesse, en mode électrique ou essence. Le second mode s’enclenche à plus haute vitesse ou lors de forte charge, la configuration de la transmission est changée grâce au 4 embrayages. Dans ce mode, le moteur essence tourne continuellement et les moteurs électriques sont utilisés en mode générateur ou propulseur en fonction des circonstances de la conduite. Il est possible de rouler jusqu’à 60 km/h en tout électrique, dans la pratique à partir d’une vitesse de 40 km/h environ le moteur essence s’enclenche. En ayant le pied très léger, une batterie pleine fournit suffisamment d’énergie pour parcourir quelques kilomètres sans émission de CO2.

Le freinage est lui aussi passablement différent des systèmes conventionnels. Nous avons ici une implémentation “brake-by-wire”, la pédale n’a pas de lien direct avec le circuit hydraulique de la commande des freins. Des capteurs enregistrent la position de la pédale, et un simulateur de force de freinage a été installé de manière a reconstituer la sensation normale du freinage. Plus intéressant encore, les moteurs électriques fonctionnent en mode générateur lorsque la pédale de frein est activée, et vu la puissance de ceux-ci, une décélération de 0.3g est atteinte sans que les disques de freins ne soient sollicités. Lors d’un freinage d’urgence on obtient une décélération d’environ 1g, ça donne une idée de la capacité de freinage du système de charge des batteries. A l’usage, la reconstitution de la sensation à la pédale est remarquable avec toutefois un manque de progressivité notable, surtout perceptible lors de freinage pour arrêter le véhicule. Dans cette situation, j’ai parfois observé quelques à-coups, certes peu prononcés.

Il est temps de monter à bord (au sens littéral) et de voir ce que toute cette technologie apporte. Une bonne surprise pour commencer, la finition intérieure est en progrès, la qualité du cuir des sièges (dans sa configuration d’origine) est de très bon niveau, le cuir structuré installé sur les modèles BMW depuis plusieurs années à cédé sa place à une variété lisse et douce. Encore un petit effort et on aura également le volant recouvert avec un matériau de cette qualité. Certes les plastiques installés près du sol restent de piètre qualité, mais un habitué des standards Audi peut enfin envisager un passage à la concurrence avec cette X6.

Peu d’éléments différencient ce modèle du reste de la gamme. La modification la plus importante concerne le capot moteur plus proéminent, et des jantes spécifiques dont l’aérodynamique a été améliorée. Quelques discrètes inscriptions sur les côtés et l’arrière trahissent son mode de propulsion. Au tableau de bord, un nouvel élément apparait au bas du compte-tour pour indiquer l’état de la partie électrique de la transmission. On y trouve le mode de transmission indiqué par l’aiguille du compte-tours elle-même, l’état de charge de la batterie, enfin des petites LEDs bleues renseignent sur le fait que la batterie est en cours de charge ou décharge. Il est également possible de sélectionner sur l’écran principal une page indiquant sous forme graphique les différents flux d’énergie entre les moteurs thermique & électrique, la batterie et les roues. A noter aussi la possibilité de prendre les moulures de décoration intérieure spécifiques à ce modèle en Aluminium noir bouchonné à l’esthétique discutable. Heureusement, le choix du modèle classique est également disponible.

 

Au volant, après avoir appréhendé les dimensions du véhicule, la conduite s’avère très facile et douce. En ville, j’observe le fonctionnement de tous ces systèmes, et force est de constater que tout se passe dans la sérénité : les arrêts et démarrages du moteur essence sont imperceptibles. Dès l’entrée d’autoroute, j’accélère plein gaz, ça pousse remarquablement bien ! Pas de miracle, 780Nm ça cause, et dans le cas de cette X6, ça chante bien aussi, en effet un superbe bruit de V8 accompagne une accélération bien présente. Un excellent pousse au crime, la conjonction du couple bien présent accompagné d’une bande son suggestive. Les rapports de boîte s’enchainent sans histoire. A chaque levé de pied le frein moteur (dans ce cas plutôt frein alternateur) s’avère bien plus marqué que sur une voiture conventionnelle, très pratique en descente, jusqu’à ce que la batterie soit complètement chargée. Le freinage manque un peu de progressivité comme décrit plus haut, mais il reste efficace en cas de sollicitations répétées. Je note toutefois que les artifices d’économie d’énergie comme le start-stop sont désactivés lorsque la commande de boite est positionnée dans les modes Sport ou Manuel. Clairement, la philosophie de ce modèle est de maintenir un niveau de prestation en terme de performance, même s’il est au détriment de l’économie de carburant.

Techniquement, BMW a donc réalisé une prouesse en terme d’intégration des différents systèmes pour fournir un excellent niveau de prestation en terme de confort d’utilisation. Voyons maintenant comment tout ceci se traduit à la pompe. Lors de notre premier test de la BMW X6 en version xDrive35i essence nous avions obtenu une consommation moyenne de 17.4 l/100 km, pour une voiture de 306 ch et un poids de 2232 kg. A la pesée, notre ActiveHybrid de test affiche pas moins de 2580 kg, soit prêt de 350 kg de plus ! Sur l’ensemble de l’essai nous avons réalisé une consommation de 12.79 l/100 km, c’est donc un bond remarquable. Il faut toutefois nuancer un tout petit peu. Mon collègue reviendra sur son parcours dans la seconde opinion. Pour ma part, sur un trajet très similaire à celui parcouru lors de notre premier test, et en roulant la plupart du temps sans arrière pensée, j’ai obtenu 15.06 l/100 km pour environ 30% d’autoroute, 40% de route de montagne, le reste en ville et en plaine. En comparaison, c’est remarquable, les prestations en terme de performance sont meilleures, pour une économie de carburant de plus de 13%. BMW revendique 20% de gain par rapport au xDrive50i.

Concernant le comportement routier, j’ai trouvé cette version plutôt moins confortable que la première, le surcroit de poids a probablement nécessité des ajustements sur les suspensions qui ont détérioré cet aspect. Malgré tous les artifices actuels – BMW a démontré être à la pointe dans ce domaine avec ses barres anti-roulis actives – la voiture masque très mal son inertie. L’inscription en virage est particulièrement laborieuse, ce n’est qu’une fois le châssis stabilisé et la voiture bien calée sur sa trajectoire qu’on peut remettre les gaz pour une sortie plus sereine. Les enchainements ou virages courts ne sont pas le terrain de prédilection de ce modèle de la gamme, avec de plus une assise haute qui accentue l’effet du roulis. Le comportement est donc en recul par rapport à un X6 conventionnel ou un X5. Ce genre de voiture n’est pas fait pour essayer de faire un temps sur route sinueuse, mais il procure un incontestable plaisir en roulant sur le couple, et en appréciant les accélérations toniques.

BMW facture malheureusement toute cette technologie fort cher. Affichée à CHF 159’000.-, c’est CHF 45’000.- de plus que le modèle xDrive50i, et pratiquement le prix du très exclusif X6 M. C’est cher, mais au moins on a la satisfaction de constater que la liste d’option est très courte, et ne comprend que des détails d’aménagement pas trop couteux. En effet ce modèle est fort bien équipé d’origine, avec notamment un système de navigation “professionnal”, le head-up display, et l’intérieur cuir pour n’en citer que quelques uns. Au final, est-ce qu’un SUV peut être politiquement correct ? ce n’est probablement pas le cas, mais BMW avec sa technologie hybride fait un pas dans la bonne direction, avec une consommation optimisée, démontrée par notre test. Si je compare également à la Lexus RX 450h essayée récemment, la philosophie est radicalement différente, et donne un bon espoir pour un futur tout aussi appréciable d’un point de vue agrément, en étant plus respectueux de l’environnement.

 

Ensuite, BMW facture sa technologie fort cher sur le X6. Comment expliquer un écart de 45’000 CHF sur ce modèle alors que la série 7 Hybride ne coûte « que » 18200 CHF de plus qu’une 750 Li ? En comparaison, Mercedes demande une rallonge de 11’200 CHF pour apposer le logo « Hybrid » sur la malle de sa classe S. Chez Porsche, un Cayenne Hybride ne coûte que 8700 CHF en sus de son homologue de puissance comparable.

Essai BMW X6 ActiveHybrid. deuxième opinion

L’éco-drive est une discipline monastique : elle demande abnégation et sacrifice, ses fondamentaux sont aux antipodes des technique de pilotage sportives. Accélérer frugalement, anticiper les ralentissements, conserver le plus d’énergie cinétique possible, un véritable purgatoire pour les enragés de zone rouge. Au terme de 751km, le résultat est probant : 10.76 L/100km à 82.4 km/h de moyenne, plus qu’honorable pour un SUV de 485 chevaux, plus de 2.5 tonnes et au SCx pantagruélien. Le chiffre reste à distance respectable des 9.9 L/100km revendiqués en cycle mixte par BMW, mais illustre bien trois points significatifs.

 

Premièrement, la technologie hybride co-développée par BMW, Mercedes et GM est au point. A de rares à–coups près, elle est transparente, bi-modale et offre suffisamment de couple et de puissance pour évoluer électriquement à plat en ville si on a le pied léger. Silence, absence de vibration, la touche de luxe apportée par la propulsion électrique est indéniable, un contraste saisissant avec les accélérations et le bruit du V8 biturbo lorsque le pied droit le sollicite. L’énergie contenue dans les batteries permet selon notre test de déplacer le X6 ActiveHybrid à plat sur environ 3.5 km à des vitesses de 40 à 50 km/h, mais l’exercice demande une extrême délicatesse pour éviter de réveiller l’ogre assoiffé d’hydrocarbures qui sommeille sous le capot. BMW revendique 2.5 km à 60 km/h, la vitesse maximale permise en propulsion électrique, ce qui parait plausible.

Ensuite, BMW facture sa technologie fort cher sur le X6. Comment expliquer un écart de 45’000 CHF sur ce modèle alors que la série 7 Hybride ne coûte « que » 18200 CHF de plus qu’une 750 Li ? En comparaison, Mercedes demande une rallonge de 11’200 CHF pour apposer le logo « Hybrid » sur la malle de sa classe S. Chez Porsche, un Cayenne Hybride ne coûte que 8700 CHF en sus de son homologue de puissance comparable. Enfin, la discipline nécessaire à l’exploitation de cette technologie pour atteindre de faibles consommations est hors d’atteinte et probablement hors d’intérêt de la clientèle cible. Un déploiement de technologie pour parvenir à un gain énergétique marginal sur un véhicule dont le poids de 2.5 tonnes est l’ennemi numéro un. Si la consommation est réellement une préoccupation, un break luxueux à transmission intégrale est une alternative incontournable. L’application de cette technologie à un véhicule tel que le X6 oscille entre paradoxe et hypocrisie.

Un paradoxe à l’image du X6, véhicule désirable qui a les défauts de ses qualités, soit une ligne agressive qui péjore l’habitabilité arrière (mes passagères s’en sont plaint spontanément) et un amortissement ferme qui le rend trépidant sur les petites inégalités. A un tarif pareil, l’absence d’une suspension pneumatique réglable est surprenante, tout comme une finition intérieure que je trouve encore largement perfectible dans la qualité de ses matériaux, exception faite du cuir nappa soyeux livré de série. Question équipement, l’interface USB ne supporte pas un baladeur iPod, un comble !

Le BMW X6 ActiveHybrid, un véhicule aussi attractif et agréable à la conduite qu’incohérent. Le véritable test pour BMW sera de franchir le gouffre qui sépare les démonstrateurs de niche d’une application sur des modèles à fort volume, à l’image des gammes que Toyota et Honda ont développé.

Prix des principales options (CHF)

Prix de base 159’000.-
Système DVD arrière 2’930.-
Tuner DAB 680.-
Audiosystem individual 1’220.-
TV 1’550.-
Volant chauffant 380.-
Vitre teintées et pare-soleil 630.-
Chauffage des sièges arrière 570.-
Marche pied alu 500.-
Aération active des sièges avant 1’780.-
Tableau de bord recouvert de cuir 3’020.-
Barres de toit 410.

 

Face à la concurrence

BMW ActiveHybrid X6 Porsche Cayenne S Hybrid Lexus RX 450h VW Touareg Hybrid
Moteur thermique

V8, 4395 cm3

double turbo compresseur

V6, 2995 cm3

compresseur mécanique

V6, 3456 cm3

VVTi – Atkinson

V6, 2995 cm3

compresseur mécanique

Moteur électrique 91 + 86 ch 46 ch 167 + 68 ch 46 ch
Puissance combinée 485 ch 380 ch 299 ch 380 ch
Couple combiné 780 Nm 580 Nm 317 + 335 + 139 Nm 580 Nm
Transmission 4×4 4×4 4×4 (non permanent) 4×4
Boite à vitesse CVT 7 rapports virtuels Automatique 8 rapports CVT Automatique 8 rapports
RPP (kg/ch) 5.32 (5.21) (6.09) 7.31 (6.09)
Poids à vide (constr.) 2580 (2525) (2315) 2186 (2190) (2315)
0-100 km/h 5.6 6.5 7.8 6.5
Vitesse max. 250 242 200 240
Conso. Mixte (constr.) 12.79 (9.9) (8.2) 9.3 (6.3) (8.2)
Longueur 4877 4846 4770 4795
Largeur 1706 1939 1885 1940
Hauteur 1983 1705 1685 1709
Empattement 2933 2895 2740 2893
Pneumatique AV

275/40/20

255/55/18

235/60/18

255/55/18
Pneumatique AR

315/35/20

255/55/18

235/60/18

255/55/18
Prix de base (CHF) 159’000 116’700 85’600 (Executive) 109’400
Prix de base (EUR) 113’600 80’080 58’900 (pack luxe) 84’550

Nos remerciements à BMW Suisse pour le prêt de cette X6.

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Liens

Le sujet du forum – les articles BMW – la liste des essais – à lire également:

        

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