Premier contact avec la nouvelle berline coupé de Porsche.
D’esquisses en mules de test, Porsche aura mis la patience du microcosme automobile à l’épreuve jusqu’à présenter celle-ci au salon de Shanghai 2009. Des clients chinois que Porsche a d’ailleurs consultés aux côtés d’allemands et d’américains pour la validation du style. Le résultat est peu consensuel, presque cérébral. Si l’on retrouve l’ADN d’une 911 dans l’absence de calandre, la découpe du capot avant, la crête des ailes surélevée, la cabine qui se resserre vers l’arrière ou la lunette arrière en trapèze inversé, le résultat convainc rarement au premier coup d’oeil. L’élégance de cette ligne ne pourra se résumer à la simple somme de détails disparates.
La clientèle type ? Selon le chef de projet, elle se segmente par les voitures qu’elle possède, soit des limousines de luxe (Audi A8, BMW Série 7, classe S) en déficit de comportement sportif, des voitures de sport (911 et prétendantes) à l’habitabilité étriquée, et des SUVs à l’image péjorative. En d’autres termes, la Panamera cible une persona qui souhaite soit plus de sport, plus de place ou fuir l’opprobre populaire.
Si l’extérieur laisse dubitatif au premier et second regard, le style intérieur séduit immédiatement, avec cette console centrale qui court du tableau de bord aux sièges arrière, et une constellation de commutateurs délimités par des arêtes obliques chromées. L’inspiration est explicitement celle d’un cockpit de jet de ligne où toutes les fonctions sont accessibles d’un geste par un commutateur dédié. On s’y perd un peu au début, mais bien moins que dans la navigation d’une luxuriante arborescence de sous-menus, et c’est en plus très joli à regarder. Cuirs souples et fins, très beaux inserts en aluminium brossé, plaquages aux goûts du client, une grande réussite dans le dessin et la réalisation. Le combiné d’instruments intègre intelligemment un rappel de l’écran de navigation. Le coffre est exigu, avec un plancher très élevé. Si quatre valises Porsche y rentrent, n’espérez pas en faire de même avec vos Samsonites.
L’élégance de cette ligne ne pourra se résumer à la simple somme de détails disparates. En guise de mise en bouche, Porsche a concocté un parcours côné sur une piste de l’aéroport de Buochs. En mode Sport Plus, La Panamera S se sort remarquablement de l’exercice, se plaçant avec précision, réagissant avec finesse à la modulation du pied droit dans les appuis alternés. Le contrôle de stabilité PSM demeure permissif avant d’intervenir sur les freins pour gommer un excès de sous-virage, ou réguler le couple en cas de survirage. La tentation devenant irrésistible, je déconnecte distraitement le PSM. Virage à 90 degrés en 2ème, pied dedans, et la grande berline me gratifie d’un magnifique drift parfaitement contrôlable avec un demi-tour de contre-braquage. Encourageant !
Passage à la 4S et ses ouïes de bouclier avant couleur alu. Bonne surprise, le comportement semble peu altéré par la surcharge pondérale de la transmission intégrale (+90kg selon Porsche). A l’attaque du même parcours, je prends un réel plaisir à aller lécher les cônes avec les roues avant et, en bout de piste, une provocation polissonne met à nouveau la Panamera l’équerre, faisant sourciller notre chaperon. Si la direction n’est pas un parangon de communicativité, l’ensemble demeure rigoureux, ludique voire déluré à la demande, la démonstration sur ce terrain particulier est probante.
J’aborde ainsi la Panamera Turbo avec un appétit rabelaisien. Démarrage à toc, le gain de couple est certes appréciable, mais le souffle du V8 biturbo n’est pas impressionnant pour autant. Dans les premiers appuis, la voiture sous-vire très tôt, se vautrant sur un train avant à l’agonie. Surconduire ne fait qu’empirer le phénomène, il faut se résoudre à ralentir le rythme et sacrifier la précision de placement. Le PSM est également beaucoup plus castrateur que sur les versions atmosphériques, coupant brutalement le couple avant la moindre amorce de glissade. Les 110 kg supplémentaires que la Turbo emmène sous son capot en sus de la 4S péjorent son comportement. J’en espérais un souffle souverain et un châssis d’une rigueur irréprochable, j’ai été fort déçu.
Je profite de la première partie du parcours routier en binôme pour vivre l’expérience Panamera de l’arrière. Les courtes portes ne facilitent pas l’accès, mais une fois installé, la position est très correcte. L’espace aux jambes et la garde au toit suffisent. Alors que nous dévalons les lacets de Seelisberg, la visibilité me semble un peu limitée et les sièges arrière manquent un peu de maintien latéral, mais une fois calé à une vitesse presque raisonnable sur l’autoroute du Gothard, le confort est réel. Porsche n’a d’ailleurs pas cherché à sauver une cinquième place, considérée comme trop promiscuitaire. On ne voyage pas coude à coude en classe affaires. L’option sièges sport amène un peu plus de maintien latéral, perceptible à l’avant, mais anecdotique à l’arrière.
En usage routier, les reprises du V8 atmosphérique de 400 chevaux sont anémiques. Sur autoroute, à 120 km/h, il faut descendre 3 rapports jusqu’en 4ème pour retrouver un peu de grinta, et le moindre turbodiesel vous aura déjà pris 100 mètres. Largement suffisant en conduite coulée, il peine vraiment à convaincre à allure pressée sur autobahn ou en dépassement ; les 700 Nm (770 en overboost) de couple de la Turbo amèneraient peut-être un gain appréciable d’agrément. La ligne d’échappement laisse échapper un joli concert de baryton, avec un échappement sport commutable en option qui donne une touche grave supplémentaire, mais les performances déçoivent.
La boîte PDK offre une prestation prédictible à défaut d’être brillante, avec des changements de rapport lisses et son septième rapport exagérément long. Diminuer la consommation est un objectif louable, mais perd de son sens si chaque relance nécessite un triple rétrogradage. Porsche annonce un régime de 2800 tours à 200 km/h sur la Panamera Turbo, un revendication que nous n’avons pu vérifier mais qui illustre bien la chose. Pas de mesures de consommation, mais une moyenne à 15 L/100km sur une Panamera S/4S ne devrait surprendre personne. Heureusement, un réservoir de 100 litres était au cahier des charges afin d’obtenir une autonomie à l’épreuve des vessies les plus tenaces.
Aux dires de Porsche, le compromis le plus difficile à peaufiner dans le développement de la Panamera fut le rapport sportivité/confort. Pari gagné sur les Panamera S et 4S avec un gros bémol sur l’agrément de leur motorisation, et verdict réservé sur la Panamera Turbo qui aura beaucoup à prouver sur un essai routier complet. Porsche affiche des tarifs réalistes s’échelonnant de CHF 147900 pour la S à 159900 pour la 4S, alors que la Turbo aura fort à faire pour justifier ses 216200 CHF.
Face à la concurrence
Porsche Panamera S | Maserati Quattroporte GTS | BMW 750i | Mercedes S500 4Matic | |
Moteur | V8 – 4806 cm3 | V8 – 4691 cm3 | V8 – 4395 cm3 | V8 – 5461 cm3 |
Transmission | Roues AR* | Roues AR | Roues AR** | 4-Matic |
Boite de vitesses | PDK 7 rapports | 6 rapports auto | 6 rapports auto | 7 GTronic |
RPP (kg/ch) | 4.65 | 4.52 | 4.95 | 5.25 |
Poids à vide (constr.) | (1860) | (1990) | (2020) | (2030) |
Puissance (ch/régime) | 400 / 6500 | 440 / 7000 | 408 / 5500 | 386 / 6000 |
Couple (Nm/régime) | 500 Nm / 3500-5000 | 490 / 4750 | 600 / 1750-4500 | 530 / 2800-4800 |
0-100 km/h | 5.0 | 5.1 | 5.2 | 5.4 |
Vitesse max. | 282 | 285 | 250 | 250 |
Conso. Mixte (constr.) | (11.1) | (15.7) | (11.4) | (11.0) |
Longueur | 4970 | 5’097 | 50’72 | 5096 |
Largeur | 1931 / 2114 | 1885 / 1991 | 1902 | 1871 / 2120 |
Hauteur | 1418 | 1423 | 1479 | 1479 |
Pneumatique | 245/50/18 275/45/18 |
245/35/18 295/30/18 |
245/50/18 | 255/45/18 |
Prix de base (CHF) | 147’900 | 196’000 | 138’500 | 159’700 |
Prix de base (EUR) | 96’133 | 135’416 | 99’900 | 115’000 |
* intégrale sur 4S **xDrive en option
Liens
Le sujet du forum – les articles Porsche – la liste des essais – à lire également: