Essai Ford Mustang V6 Convertible


A la découverte de la Mustang V6 Cabriolet dans le sud du Nevada. 

Rares seront les lecteurs suisses considérant l’achat d’une Mustang Cabrio, le modèle n’étant pas importé et le marché gris se concentrant autour du GT Coupé et son V8. La version cabriolet est, elle, un grand classique des flottes de location aux Etats-Unis, Californie, Nevada et Hawaï en tête. Hertz offre d’ailleurs une version GT-H cabriolet à l’esthétique ravageuse – peinture noire à bandes dorées – mais pour un tarif double par rapport à un cabriolet pour merlu moyen en mal d’insolation. Débarquant à l’aéroport de Las Vegas d’une bétaillère de Southwest airlines – l’Easy Jet américain – c’est une placide et modeste Mustang V6 cabriolet bleue « Vista » comme l’azur immaculé du Nevada qui nous attend chez Avis.

Chargement de nos maigres bagages dans un coffre exigu (283 litres), à l’ouverture étroite et au seuil ridiculement haut, nous voilà au volant en direction du piège à fric que nous avons hâtivement sélectionné. La nuit tombe et je cherche vainement dans l’habitacle LE gadget qui épate : le réglage chromatique de l’illumination des compteurs. Economies sur les versions V6 ou exécution spéciale pour les grands loueurs, le bidule est absent et les fonds de compteurs d’un vert blanchâtre. Dommage, sur Asphalte on aime l’orange. Le graphisme rétro plaira peut-être aux nostalgiques, mais la lisibilité est problématique.

Tout autant problématique, la visibilité avec la capote relevée est significativement restreinte, surtout aux 3/4 arrière, rendant les manœuvres malaisées, surtout en regard du gabarit imposant de la voiture. Dans l’absolu, les mensurations n’ont rien d’intimidant, mais la Mustang est une grande voiture dans toutes les dimensions, longue, large et haute surtout. L’intérieur est loin de la claustrophobie d’une Audi TT première génération mais incite à décapoter au premier feu rouge. Autant profiter de l’agréable tiédeur du crépuscule.

La capote est de facture rudimentaire, tout comme son maniement d’ailleurs. Loin de la chorégraphie sophistiquée des réalisations germaniques, l’ensemble se plie rapidement (15 secondes chrono pour l’ouverture ou la fermeture), sans compter la manipulation des deux verrous situés aux extrémités du pare-brise. Mécanisme « manuellement automatique » donc, couplé à une logique inepte qui interrompt l’ouverture dès que le véhicule se met en mouvement. Je conçois que des considérations de sécurité interdisent de déclencher la manœuvre en roulant, mais une fois entamée, pourquoi ne pas terminer l’ouvrage ? Passer pour un merlu dans une Mustang de loc’ est une chose, mais circuler sur autoroute avec une capote à moitié ouverte franchit allègrement les limites du ridicule.
     
Difficile de parler de la finition d’une Mustang sans s’attirer les inimitiés des divers clubs de fans du modèle, d’Omar Sharif, de l’association des amis du cheval charentais et de quelques Vipéristes solidaires. Proclamons donc l’abomination et cherchons à comprendre.

 

Oubliez les tarifs surréalistes pratiqués en Suisse par certains importateurs parallèles, la Ford Mustang est avant tout conçue pour le marché américain où le modèle de base (V6 coupé) est vendu 19250$, soit 25’000 CHF toutes taxes comprises. C’est vraiment bon marché. Pour le prix, on a une gueule inimitable, rappel des fastback des années 70, une grosse voiture (le prix au mètre cube est probablement imbattable) et une finition intérieure qui ferait passer une Peugeot 205 pour une Bentley Continental GT. Les coréens ont démontré qu’on peut avoir un intérieur correctement fini à des coûts serrés. Même General Motors a récemment produit des intérieurs d’une finition décente dans le même segment de prix, alors que fait Ford ? Plastiques durs grossièrement texturés, faux chromes clinquants, les assemblages sont corrects mais le choix des matériaux vraiment peu flatteur, ni à l’œil, ni au toucher, et vieillira probablement fort mal. Même des détails qui comptent comme le levier de sélection de la boîte ont été bâclés, dommage car faire bien ne coûte pas nécessairement plus cher et transformerait l’expérienc. Par soucis d’exhaustivité, je confirme la présence de réglages d’avance et d’inclinaison du siège conducteur, mais je n’ai par contre pas compris comment remettre le dossier à son réglage original lorsqu’on le bascule pour accéder aux places arrières. Irritant, et là aussi, le j’menfoutisme domine.


Red rock national park, 30 minutes à l’ouest de Vegas. Une jolie boucle de 20 kilomètres, loin de la folie du strip

Au démarrage, le V6 fait illusion, réagissant promptement à la moindre sollicitation de la pédale de gaz. La note d’échappement est flatteuse, ronde et suffisamment présente pour inciter à jouer la terreur des feux rouges, du moins au début, la mollesse des accélérations rendant l’exercice un peu futile. Avec 210 poneys tractant un gros cabriolet de 1643kg (RPP 7.82 kg/ch), inutile de porter une combinaison anti G pour éviter un malaise à chaque accélération. Le gros V6 (664 cm3 de cylindre unitaire tout de même) est un exemple de complaisance nord américaine, développant 52 chevaux syndicaux au litre, avec un arbre à came en tête par banc de cylindres, douze soupapes : rudimentaire, éprouvé. Bonne surprise cependant côté consommation : 11.6 L/100 km mesurés, pil poil dans les revendications du constructeur,  en adoptant un style de conduite en phase avec la philosophie gériatrique de l’engin.

La boîte 4 vitesses est équipée d’un overdrive qui allonge de la démultiplication finale pour faire baisser la consommation sur longue distance. Son comportement est têtu, aux antipodes des boîtes allemandes qui descendent un voire deux rapports à la moindre sollicitation. Très nonchalante une fois en mouvement, elle surfe sur la courbe de couple plutôt timide du V6, n’hésitant pas avaler patiemment des faux plats à 1000 t/min. Il faut appuyer franchement pour provoquer un kick-down qui aura d’ailleurs plus d’effet sur le volume sonore que sur le défilement du paysage. Un contacteur logé dans le levier de vitesse permet d’endiguer l’action de l’overdrive, agréable sur route sinueuse mais inadapté pour cruiser sur highways, freeways et interstates, le V6 moulinant à 3000 tours au lieu de 2000 avec la démultiplication longue. La boîte est sans doute plus adaptée au couple du V8 de la GT, également disponible en cabriolet.


Au bord du Lac Mead, formé artificiellement par l’accumulation de la rivière Colorado retenue par le barrage Hoover.

Juger du comportement d’une voiture sur route ouverte aux Etats-Unis confine souvent à un dilemme : l’ignorance ou la tôle. Les rectilignes déserts ne manquent pas, mais les patrouilleurs ne manquent pas dans les rares secteurs où l’on pourrait s’amuser. L’essieu rigide est bien présent, avec son inégalable tendance à guider l’arrière sur les inégalités. La perte de rigidité du cabriolet est très perceptible elle aussi, les vibrations se propageant dans le creux de vos reins n’ayant rien d’émoustillant, à part peut-être pour les hordes d’octogénaires qui forment une part croissance (et préoccupante) de la population de l’état. La direction est complètement frigide, avec un tarage artificiel. Rien d’engageant pour aller titiller les limites d’adhérence des gros pneus série 65 ( !). En y mettant un peu de soin, il est possible de faire patiner la roue arrière intérieure pendant quelques brèves secondes, mais l’intérêt de la manœuvre demeure limité.

Pour la débauche, il faudra se reporter sur les autres spécialités du cru : tables de poker ou black jack, sports bars, cocktails dilués à gogo et strip club si affinités. La Mustang se prête bien à la balade paisible en appréciant la température agréable de ce début d’automne, la démesure environnante en format panoramique, coude à la portière et casquette vissée sur le crâne. C’est probablement là 80% de l’intérêt du modèle : le style, combiné à l’agrément d’une décapotable. Parcourir Las Vegas boulevard (le “strip”) en s’en mettant plein les mirettes de ce grand parc d’attractions pour adultes. Une GT donnerait un peps indéniable et bienvenu à la chose, mais l’intérêt est marginal si on se tient au domaine de compétences de l’auto.

     

Difficile de trouver une concurrente à la Ford Mustang Convertible dans cette gamme de prix, Chevrolet à cessé la production de l’ancienne Camaro, la Chrysler Sebring Convertible est légèrement plus spacieuse mais d’une rare fadeur esthétique. La craquante Pontiac Solstice/Saturn Sky/Opel GT reste probablement la meilleure alternative, mais si elle n’offre que deux places.

 

Ford Mustang V6 Convertible

Moteur

V6 – 3986 cm3

Poids*

1643 kg

Puissance (ch/régime)

210 / 5300

Couple (Nm/régime)

325 / 3500

Rapport poids/puissance

7.82

0-98 km/h*

7.3s

Vitesse max (constr.)

180 km/h

Conso  (mesurée)

11.6 L/100 km

Pneumatiques AV/AR

215/65/R16

Longueur (mm)

4775

Largeur (mm)

1877

Hauteur (mm)

1381

Prix de base aux Etats-Unis (CHF)

25’000 TTC

* Mesures Car and Driver

Liens

Le sujet du forum – les articles Ford – la liste des essais – à lire également:

        

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