Electrification et avenir de l'industrie européenne

Avatar de l’utilisateur
ze_shark
Site Admin
Site Admin
Messages : 43087
Inscription : 05 août 2005 22:54
Véhicules : Audi RS6, 997 GT3, 355 GTS F1, 550M, 225xe
Localisation : Star Alliance & Starwood Inc
Contact :

Re: Electrification et avenir de l'industrie européenne

Message par ze_shark » 21 sept. 2023 14:19

_nicolas a écrit :
21 sept. 2023 08:08
On va rapidement finir par arriver à cette même situation qu'en Chine:

China’s Abandoned, Obsolete Electric Cars Are Piling Up in Cities
Ces cimetières chinois ne sont pas les restes de start-up de ride hailing qui ont capoté ? Comme les fantastiques montagnes de bike-shares à Guangzhou à la grande époque de la bulle Uber/Didi ?

Avatar de l’utilisateur
Huntox
F1
F1
Messages : 5644
Inscription : 07 avr. 2008 18:14
Véhicules : Cupra
Localisation : -12.199707, 96.853885
Contact :

Re: Electrification et avenir de l'industrie européenne

Message par Huntox » 21 sept. 2023 14:39

Les raisons de ces cimetières de VE.... La même chose s'est passé avec les vélos, impressionnant et affligeant !


Avatar de l’utilisateur
Corsugone
F1 Champion
Messages : 16787
Inscription : 04 mars 2008 20:10
Localisation : Chez Guignol
Contact :

Re: Electrification et avenir de l'industrie européenne

Message par Corsugone » 22 sept. 2023 06:51

La Tribune

Le combat de Bruxelles contre les voitures chinoises risque de créer des remous entre la France et l'Allemagne

L'Europe a annoncé ces dernières semaines une série de mesures protectionnistes pour faire face à l'afflux des voitures électriques chinoises sur le marché. Si, côté Français, on se réjouit de la volonté européenne de protéger son industrie automobile de l'arrivée massive des marques chinoises et de leurs prix agressifs, en Allemagne, les constructeurs s'inquiètent de ces mesures qui pourraient présenter plus de risques que d'avantages pour leur développement.


L'automobile va-t-elle raviver les tensions franco-allemandes? Récemment, la guerre en Ukraine a creusé des tensions entre les deux pays, notamment autour de l'énergie et de la défense. La semaine dernière, l'Union européenne a annoncé ouvrir une enquête sur les subventions massives du gouvernement chinois à son industrie automobile électrique. Une initiative fortement poussée par les constructeurs et le gouvernement français. Quelques jours plus tard, le commissaire européen chargé du Marché intérieur Thierry Breton, ajoutait sur LCI :

« Généralement - je ne veux pas préjuger de ce que vont donner les résultats de l'enquête que nous ouvrons - mais généralement, si je regarde ce qui se passe pour les enquêtes qu'on ouvre, ça se traduit souvent par des augmentations de droits de douane de 10 à 20 % »

En outre, mercredi, l'Etat français a annoncé la publication du décret qui va conditionner le bonus écologique attribués aux voitures électriques qui auront une plus faible empreinte carbone.

Ainsi, en deux semaines, l'Europe a sorti les griffes pour protéger son industrie automobile de l'arrivée massive des constructeurs chinois et de leurs prix agressifs, environ 10.000 euros en dessous du marché.

Menaces de Pékin

Mais cette annonce de l'ouverture d'une enquête par l'UE a, sans tarder, été suivie d'effets en Chine qui a menacé l'Europe d'un « impact négatif sur les relations économiques et commerciales », dénonçant ainsi une mesure « prise au nom d'une "concurrence loyale" » et « ouvertement du protectionnisme ».

Pas de quoi effrayer la France à l'instar du ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, qui a estimé qu'il s'agissait « d'une bonne nouvelle que l'Europe prenne conscience de la nécessité de défendre ses intérêts économiques ». Son homologue allemand s'est, lui, montré plus prudent dans ses propos : « S'il y a des doutes sur l'équité, il faut les examiner. Le commerce mondial est basé sur des règles et (elles) s'appliquent naturellement aussi aux véhicules électriques ».

Car la Chine pourrait sanctionner l'Europe par différents moyens : de l'augmentation des coûts des matières premières à l'interdiction de vente de certains constructeurs, dans les cas les plus extrêmes. « Une situation peu probable », estime toutefois Julien Pillot, économiste et enseignant-chercheur à l'INSEEC, qui souligne l'importance du continent européen sur le marché mondial. « L'Union européenne regroupe 450 millions d'habitants avec un des plus forts pouvoirs d'achat mondiaux et parfois 2 à 3 voitures par foyer. Il ne faut pas sous-estimer notre force non plus ».

Les constructeurs allemands inquiets

Pour autant, les constructeurs allemands, contactés par La Tribune, craignent que les mesures protectionnistes ne comportent plus de risques que d'avantages pour leur industrie et prônent le libre-échange. Une réaction que ne partage pas totalement Julien Pillot qui nuance la situation allemande :

« L'industrie allemande a intérêt à protéger son industrie automobile, car si elle a une position dominante sur le thermique, le futur ne dit pas si elle pourra garder l'avantage sur l'électrique », explique-t-il, avant d'ajouter néanmoins que « si l'Allemagne a beaucoup à gagner avec des mesures protectionnistes, c'est également elle qui a le plus à perdre en cas de représailles. Et tant qu'on ne connaît pas la réaction de la Chine, il est difficile d'évaluer à l'avance si les avantages prendront le pas sur les risques. »

L'Allemagne, une industrie tournée vers la Chine

La première puissance européenne est résolument portée par l'automobile et s'est largement tournée vers la Chine pour vendre ses modèles. La filière est le premier secteur industriel dans le pays et sa part dans le PIB représente environ 13 %. Cette production est en grande partie exportée en dehors de l'Europe, contrairement aux constructeurs français, et particulièrement vers la Chine. À titre d'exemple, le géant automobile Volkswagen y vend presque 40 % de ses véhicules, soit plus que toute l'Europe réunie, malgré une baisse de part de marché récemment. BMW et Mercedes ne sont pas très loin en termes de ventes. En tout, près de 30 % du chiffre d'affaires des constructeurs allemands est réalisé en Chine.

Sans compter que ces derniers sont davantage positionnés sur le premium, rappelle le cabinet Roland Berger, et sont donc, de fait, moins menacés par les importations chinoises, à la qualité plus basse. Les constructeurs français, de leur côté, se sont éloignés du marché chinois, à l'instar de Renault, qui regarde désormais vers l'Inde. Leur positionnement sur la moyenne gamme, en confrontation directe avec les véhicules chinois, a quant à lui tout intérêt à être protégé par les mesures européennes.

Autre variable désormais : l'électrique, qui rebat les cartes. Aucune marque européenne n'est parvenue à se positionner dans le top 10 des voitures les plus vendues en Chine en 2022. Toutes les places ont été occupées par les nouveaux constructeurs chinois spécialistes de l'électrique ainsi que par Tesla. Mais sur l'électrique justement, les Allemands comptent bien imposer leur style en Chine et garder leur part de marché. Par conséquent, les constructions d'usines se multiplient. Récemment, c'est BMW qui a annoncé 1,3 milliard d'euros d'investissements pour sa future gamme de voitures électriques et de batteries associées à partir de 2026. Des efforts qui pourraient donc être mis à mal par les ambitions protectionnistes de l'UE.
"I have a problem with Porsches. They're wonderful cars, but I know I could never live with one. I don't go around saying that Porsches are a pile of dung, but I do know that psychologically I couldn't handle owning one" Rowan Atkinson.

Avatar de l’utilisateur
_nicolas
Membre V8
Membre V8
Messages : 12677
Inscription : 12 sept. 2005 18:05
Véhicules : Macan S/Ex-997.1/997.2 S/991.1 S/991.1 C4 GTS
Localisation : La Côte

Re: Electrification et avenir de l'industrie européenne

Message par _nicolas » 13 oct. 2023 10:54

Emmanuel Faber, président de l'ISSB, l'International Sustainability Standards Board, elle-même une émanation de l'IFRS, a lâché une bombe dans Le Monde cette semaine en expliquant qu' "exiger que la matérialité s’étende au-delà du domaine économique est en réalité simpliste". Autrement dit en termes de critères de reporting extra-financier (que l'on appelle aussi reporting ESG), seule compte la matérialité financière. Pour l'ISSB, seuls les éléments extérieurs à l'entreprise qui présentent un risque d'impacter sur la performance financière d'une entreprise doivent être considérés (outside-in). Bye-bye la prise en compte de l'impact des activités de l'entreprise sur l'extérieur, ce que l'on appelle matérialité d'impact (inside-out).

Au-delà du fait que cela n'est, à mon sens, pas une bonne nouvelle pour la suite s'il s'agit de s'affairer à améliorer l'état de la planète et que cela ternit quelque peu l'image d'Emmanuel Faber montagnard amoureux de la nature (peut-être trouve-t-il son inspiration chez Yvon Chouinard, voir Patagonia Billionaire Who Gave Up Company Skirts $700 Million Tax Hit), cette position affaiblit l'Europe qui a récemment adopté une directive appelée CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) exigeant la double matérialité dans le reporting extra-financier des entreprises. Il faut savoir que l'IRFS, ce sont d'abord le Canada et les USA. Cela va évidemment compliquer encore la vie des entreprises en Europe, industrie automobile comprise. La lutte est féroce et les pressions viennent de tous les côtés.

A noter qu'en 2021, la candidature de Genève pour accueillir le siège de l'IFRS n'avait pas été retenue.
Nicolas

”Simplicity is the keynote of all true elegance” - Coco Chanel

Avatar de l’utilisateur
_nicolas
Membre V8
Membre V8
Messages : 12677
Inscription : 12 sept. 2005 18:05
Véhicules : Macan S/Ex-997.1/997.2 S/991.1 S/991.1 C4 GTS
Localisation : La Côte

Re: Electrification et avenir de l'industrie européenne

Message par _nicolas » 19 oct. 2023 05:18

L’électrification ne concerne pas que les voitures :

Volta Trucks en faillite : coup de tonnerre sur le marché du camion électrique
Nicolas

”Simplicity is the keynote of all true elegance” - Coco Chanel

Avatar de l’utilisateur
ze_shark
Site Admin
Site Admin
Messages : 43087
Inscription : 05 août 2005 22:54
Véhicules : Audi RS6, 997 GT3, 355 GTS F1, 550M, 225xe
Localisation : Star Alliance & Starwood Inc
Contact :

Re: Electrification et avenir de l'industrie européenne

Message par ze_shark » 19 oct. 2023 13:22

Pas l'impression que Volvo ou Daimler ont tant de problèmes avec leurs camions.

Pour les start-ups, c'est nettement plus dur, surtout dans un business aussi exigeant en capital. Faut avoir les reins solides. Ou frauder plus ou moins adroitement, cf Tesla et Nikola.

Avatar de l’utilisateur
Corsugone
F1 Champion
Messages : 16787
Inscription : 04 mars 2008 20:10
Localisation : Chez Guignol
Contact :

Re: Electrification et avenir de l'industrie européenne

Message par Corsugone » 20 oct. 2023 09:12

Voiture électrique, acier, éoliennes, Bruxelles contre-attaque au « made in China »

« Oui, l'Europe a été trop naïve vis-à-vis de la Chine.» De passage à Paris, le ministre estonien de l'Économie, Tiit Riisalo, résume bien la situation. Et déplore que les Européens, pionniers dans la technologie photovoltaïque, aient fini par « subventionner massivement des panneaux solaires chinois ». Mais depuis qu'en 2019 la Commission a qualifié la Chine de « rival systémique » , elle étoffe son arsenal pour protéger son industrie. Avec un renforcement accéléré ces dernières semaines.

Mi-septembre, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, a lancé l'offensive sur la voiture électrique avec l'ouverture d'une enquête sur les subventions chinoises.

La Commission affirme avoir d'ores et déjà « trouvé des preuves de l'octroi de prêts, de crédits à l'exportation et de lignes de crédit fournis par des banques publiques ». La liste des aides dont auraient bénéficié les constructeurs chinois, au détriment de leurs concurrents européens, inclut aussi « la fourniture d'une assurance à l'exportation préférentielle (...) , des réductions et exonérations de l'impôt sur le revenu, une exonération fiscale des dividendes, des remises de taxe à l'importation et à l'exportation, des exonérations et abattements de TVA, ainsi que la fourniture de biens tels que des matières premières et des composants» à des tarifs préférentiels. L'agence Reuters estime que les subventions publiques directes de Pékin pour les véhicules électriques ou hybrides se sont élevées à 57 milliards de dollars entre 2016 et 2022.

Au bout de longs mois, l'enquête pourrait aboutir à une hausse des droits de douane actuellement fixés à 10 % pour les véhicules importés de Chine - ils sont de 15 % pour les véhicules exportés d'Europe vers la Chine. D'ici là, des milliers de voitures chinoises vont continuer de débarquer sur le Vieux Continent.

Les importations de véhicules électriques de Chine représentaient 9 milliards d'euros en 2022, contre pratiquement rien quatre ans plus tôt. En France, les voitures électriques chinoises, et en particulier les modèles de MG, 20 % moins chers que leurs concurrents occidentaux et coréens, profitent encore du bonus écologique (de 5 000 et 7 000 euros).

La donne va changer l'année prochaine. La France va en effet fixer un « score environnemental » à chaque modèle électrique vendu dans l'Hexagone. Selon sa note - établie en fonction des émissions de CO2 produites lors de sa fabrication, celle de ses composants, sa batterie, son transport... -, le véhicule pourra ou non bénéficier du bonus écologique financé par l'État. Le score de chaque véhicule sera connu mi-décembre. Sans surprise, les marques chinoises mais aussi Tesla ou Dacia, qui importent leurs voitures de Chine, seront exclues. Limitée à la France, la mesure aura un impact très relatif. Sauf si d'autres pays d'Europe dupliquent le dispositif.

Enquête sur la sidérurgie

Sur l'acier, la Commission européenne semble se préparer à agir comme elle l'a fait avec les véhicules électriques. Bruxelles devrait en effet lancer une enquête sur les subventions versées par Pékin à son industrie sidérurgique.

L'acier est l'un des produits subissant le plus la concurrence de producteurs chinois vendant à bas prix. La situation est d'autant plus tendue que la demande mondiale n'est pas très soutenue. La capacité de production d'acier excédentaire dépasse 600 millions de tonnes dans le monde, s'alarme Eurofer, l'association des producteurs européens. Et cette situation à des conséquences. La semaine dernière, ArcelorMittal a annoncé qu'un des deux hauts-fourneaux de son site de Fos-sur-Mer, dans les Bouches-du-Rhône, ne redémarrerait pas comme prévu, à la fin d'un arrêt technique. L'arrêt pourrait se prolonger jusqu'en début d'année prochaine.

L'Europe mène régulièrement des enquêtes sur la pratique des aciéristes chinois. Cela a été le cas en 2014, 2016 ou 2018. Et elles débouchent souvent sur des sanctions financières à l'importation. Le problème est que les acteurs chinois s'adaptent à ces sanctions. Pékin finance aujourd'hui largement l'installation d'usines sidérurgiques de groupe chinois en Indonésie, leur permettant ainsi de les contourner.

Le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF) qui est entré, en octobre, en phase de test, répondra en partie à ces contournements. Il doit permettre de faire payer une taxe en fonction du contenu carbone des produits. De quoi pénaliser les aciers chinois produit en utilisant largement du charbon. Mais cette « taxe carbone aux frontières » ne devrait entrer dans une phase active qu'à partir de 2026. Surtout, les industriels lui reprochent de s'appliquer aux matières (acier, aluminium, ciment, hydrogène et engrais azotés) mais pas aux produits finis. Un four micro-onde fabriqué en Chine avec de l'aluminium carboné et peu cher échappera à ce bouclier.

Champions en sursis

Dans le secteur des renouvelables, les acteurs de la filière éolienne s'attendaient à un geste fort de l'Europe, avec l'ouverture d'une enquête formelle pour pratiques déloyales par l'Autorité de la concurrence à l'encontre des industriels chinois. Or, le « paquet éolien » qui doit être présenté le 24 octobre par Ursula von der Leyen semble éviter l'ouverture d'un nouveau front avec la Chine. La Commission se contenterait de « surveiller de près les éventuelles pratiques commerciales déloyales ». Les industriels européens sont appelés à remonter des éléments de preuve. « Il faut soutenir la filière existante européenne pour qu'elle ne disparaisse pas sous le coup d'une concurrence déloyale», résume Jules Nyssen, président du syndicat des énergies renouvelables. « Il est encore possible de travailler sur des critères de contenus locaux lors de l'appel d'offres pour l'attribution de parcs éoliens, en imposant un pourcentage de composants fabriqués en Europe», veut croire Michel Gioria, délégué général de France Renouvelables. L'Europe a encore quelques champions dans le domaine avec Vestas, Nordex, Enercon ou encore Siemens Gamesa et GE, les deux derniers ayant des usines en France. Au-delà des opérateurs, toute une filière est à défendre. Un écosystème fragile face à la machinerie chinoise. Les fabricants de l'empire du Milieu, comme Goldwin ou Sany, peuvent proposer aux développeurs de parcs éoliens un paiement des matériels deux ans après la mise en service du parc. Quand en Europe, il faut payer les machines pour pouvoir les installer. Ce décalage de trésorerie vaut de l'or, surtout en période de forte inflation. Les producteurs chinois commencent aussi à proposer des turbines en location, un autre moyen de faire baisser les tarifs.

« Il faut éviter que l'éolien subisse le même sort que l'industrie du panneau photovoltaïque », résume Jules Nyssen. En vingt ans, celle-ci a en effet quasiment disparu du Vieux Continent, balayée par la concurrence asiatique. Aujourd'hui, l'heure est à la reconstruction, mais il est beaucoup plus compliqué de faire revenir une industrie que de conserver l'existant. L'Europe et notamment la France, ne manque pas de projets de giga-factories. Elle dispose encore de compétences dans le domaine, mais là encore, la filière industrielle attend des prises de position forte de l'Europe pour résister au rouleau compresseur chinois. D'autant que les industriels de l'empire du Milieu ne restent pas inactifs : « La Chine a envoyé 50 GW de panneaux solaires dans les ports européens pour assurer les soldes et saturer le marché » , glisse Michel Gioria. Tous les coups sont permis.
"I have a problem with Porsches. They're wonderful cars, but I know I could never live with one. I don't go around saying that Porsches are a pile of dung, but I do know that psychologically I couldn't handle owning one" Rowan Atkinson.

Avatar de l’utilisateur
Corsugone
F1 Champion
Messages : 16787
Inscription : 04 mars 2008 20:10
Localisation : Chez Guignol
Contact :

Re: Electrification et avenir de l'industrie européenne

Message par Corsugone » 23 oct. 2023 15:34

Voitures électriques : « La fulgurante montée en cadence de la Chine a convaincu l’Europe que la survie même de cette industrie sur le Vieux Continent était en jeu »

Le secteur automobile chinois est en train de se consolider autour de quelques grands constructeurs, qui se tournent vers l’étranger avec des modèles électriques moins chers que leurs concurrents américains et européens, relève dans sa chronique Jean-Michel Bezat, journaliste au « Monde ».

Les salariés d’Aiways sont inquiets, six ans seulement après la naissance de leur start-up à Shanghaï, en 2017. Une pléiade de bonnes fées s’étaient alors penchées sur le berceau du nouveau constructeur de véhicules électriques, un de plus sur un marché déjà pléthorique : d’anciens dirigeants de Volvo pour le management ; le géant de la technologie Tencent, le leader chinois des VTC Didi et le champion des batteries CATL pour les capitaux ; et le gouvernement chinois pour l’onction politique. Las, l’entreprise, qui n’a jamais gagné d’argent, a dû arrêter sa production en août et se bat pour payer des employés qui en ont appelé à l’Etat. L’affaire Aiways ? Un exemple, parmi d’autres, de l’atterrissage du secteur automobile chinois sur fond de surcapacités, de baisse des ventes locales et de guerre des prix lancée par l’américain Tesla fin 2022.

Le président chinois, Xi Jinping, a toujours affiché l’ambition de faire de son pays, comme dans les autres domaines industriels, une superpuissance de l’automobile, l’égale des Etats-Unis, du Japon et de l’Allemagne. Depuis plus de dix ans, start-up et sociétés d’Etat se sont engouffrées sur le marché, soutenues par Pékin qui les subventionnait et sécurisait leur accès au lithium, au nickel, au cobalt, au graphite et aux terres rares indispensables à la fabrication des batteries. Aujourd’hui à un carrefour, le pays aligne une cinquantaine de marques de voitures électriques ou hybrides rechargeables sur un marché presque mature.

En 2022, la Chine a sorti de ses chaînes de montage plus de 27 millions de véhicules en tous genres, dont 70 % produites par des constructeurs chinois. Avec de tels volumes, les économies d’échelle, l’innovation technologique et une main-d’œuvre encore bon marché, leurs coûts de production sont de 15 % à 40 % inférieurs à ceux des constructeurs européens et américains, suivant les modèles et les marques. Nées récemment dans l’univers de la tech, certaines sociétés chinoises avaient l’avantage de partir d’une feuille blanche ; elles sont aujourd’hui courtisées pour des partenariats avec des constructeurs occidentaux marqués, voire handicapés, par une culture du « thermique » vieille d’un siècle.

« L’industrie automobile mondiale va connaître de profonds bouleversements au cours des dix prochaines années », pronostique Paul Gong, analyste senior chez UBS. La consolidation du secteur ne devrait laisser qu’une dizaine de groupes puissants, comme BYD, GAC, SAIC, Geely ou Li Auto. Avec l’étranger comme nouvel horizon. « La mondialisation est la seule voie de sortie », déclarait Wang Fengying, patronne de Great Wall Motor, citée dans une étude du cabinet Roland Berger (août 2022). « Dans les dix ans, on assistera à la naissance de marques chinoises de classe mondiale », ajoutait dans cette note le patron de Chang’an Automobile. Un esprit de conquête qui anime aussi William Li, fondateur de Nio : « La Chine est le marché le plus difficile, et si nous sommes capables d’y survivre, je ne vois aucune raison pour que nous ne puissions pas survivre en Europe et aux Etats-Unis. »

Arsenal d’exonérations fiscales

Patron de Stellantis, Carlos Tavares s’attend à une « invasion ». En 2023, la Chine a détrôné le Japon pour devenir le premier exportateur mondial. Ses ventes à l’étranger ont doublé sur les douze derniers mois. La fulgurante montée en cadence de sa production a convaincu les dirigeants européens que la survie de l’industrie du véhicule électrique était en jeu sur le Vieux Continent ; et qu’il était exclu de reproduire les lourdes erreurs commises avec les panneaux solaires. L’enquête antidumping déclenchée fin 2012 par Bruxelles était arrivée trop tard, et la Chine avait balayé les fabricants allemands du secteur photovoltaïque.

« Les marchés mondiaux sont inondés de voitures électriques chinoises bon marché, dont le prix est maintenu artificiellement bas par des subventions publiques massives », a dénoncé Ursula von der Leyen, le 13 septembre, dans son discours sur l’état de l’Union. La présidente de la Commission européenne a annoncé l’ouverture d’une « enquête antisubventions », ses services ayant « des preuves » que les concurrents de Stellantis, Renault ou Volkswagen bénéficiaient de prêts de banques publiques, de crédits à l’export et de tout un arsenal d’exonérations fiscales. Quelque 54 milliards d’euros entre 2016 et 2022, a calculé le cabinet AlixPartners.

Sans attendre les conclusions de l’enquête, rendues dans un an, la France a ouvert un autre front, dans le cadre de la planification écologique et de son projet de loi sur l’industrie verte, adopté par le Parlement le 11 octobre : l’empreinte carbone de la fabrication et du transport des véhicules chinois. Un « score environnemental » va permettre d’établir une liste des modèles éligibles au bonus écologique pour l’achat d’une voiture neuve. Attendue le 15 décembre, elle ne devrait compter aucun modèle chinois. Paris a ainsi opté pour la défense de l’industrie et de l’environnement, quitte à sacrifier en partie le pouvoir d’achat. Mais qui achètera européen, alors que ses constructeurs ont privilégié les petites citadines mais, surtout, le haut de gamme à fortes marges ?

En France, pas grand monde, selon une étude de l’Institut de l’économie pour le climat I4CE publiée jeudi 19 octobre. Malgré le bonus actuel, le reste à charge pour l’achat d’une citadine standard électrique et l’installation d’une borne de recharge est compris entre 26 000 euros et 28 000 euros pour les classes moyennes – de 65 % à 130 % de leurs revenus annuels. « Les conditions économiques ne sont pas réunies pour que tous les ménages puissent investir », concluent ses auteurs. Les géants BYD, Geely ou MG (groupe SAIC) y trouveront un solide argument de vente. Comment le gouvernement pourra-t-il dissuader longtemps d’acheter chinois sans s’exposer au rejet de sa politique de transition écologique ?
"I have a problem with Porsches. They're wonderful cars, but I know I could never live with one. I don't go around saying that Porsches are a pile of dung, but I do know that psychologically I couldn't handle owning one" Rowan Atkinson.

Qui est en ligne ?

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit et 151 invités

Axa Aubonne Accessoires Auto - Jantes Alu - Pneus