Ricciardo épingle Monaco à son palmares.
Étape mythique et incontournable du calendrier, le Grand-prix de Monaco a été remporté par Daniel Ricciardo, auteur d’un week-end magnifique et dominateur. Il faut toutefois bien le reconnaître, nous n’avons pas assisté à la course du siècle. L’édition 2018 a même été d’une tristesse certaine, exemptée d’imprévu significatif ou d’aléa climatique.
Or, sans ces facteurs inopinés, Monaco peut tourner à la procession à laquelle nous avons malheureusement assisté, et qui ne manquera d’apporter de l’eau au moulin des détracteurs d’une épreuve certes anachronique mais également propice à la démonstration de la magie du pilotage. Pour ne rien arranger, la procession ci-dessus évoquée a cette saison été lourdement accentuée par une gestion exacerbée des pneumatiques de l’ensemble des acteurs, avec à la clé des temps au tour en course à des années lumières de ce qui avait été produit en qualifications. Regrettable face au spectacle incroyable produit lors des séances d’essai, ou le terme “pilotage” prend toute sa dimension.
RedBull comme prévu
Ces complaintes ne doivent pas faire oublier la grande performance monégasque de l’équipe autrichienne. Arrivé en Principauté avec un statut de favori, l’équipe autrichienne a fait parler la poudre tout le week-end. Malheureusement pour lui, ce n’est une nouvelle fois pas Max Verstappen qui en profitera, auteur pour la 6ème fois en six courses d’une grosse erreur, d’ailleurs copier/coller de son accident de 2016. Incapable de participer aux qualification et parti dernier il achevait sa remonté en course au 9ème rang. Et toujours cette tendance, tenace, à sur-piloter, sans arriver à contrôler son agressivité au volant.
Bien maigre bilan et contraste saisissant face à la démonstration de Daniel Ricciardo. Pole de toute beauté, et course menée de bout en bout malgré, excusez du peu, la perte du 7ème rapport ainsi qu’un MGU-K (moteur d’énergie cinétique) en panne à partir du 28ème tour engendrant 25% de puissance en moins et avec comme conséquence annexe de mettre en défaut les freins arrière.
Tout ceci fut géré de main de maître par Ricciardo, capable de s’adapter à cette situation de crise aiguë avec sang-froid. Le voici donc auréolé de 2 victoires cette saison, soit le même total qu’Hamilton et Vettel. Le voici également replacé au championnat, avec de nouvelles ambitions. Le voici par ailleurs ultra dominateur face à son encombrant coéquipier, et le voici enfin replacé au centre du jeu de l’équipe RedBull, où il se dit que l’on serait dorénavant prêt à accéder à toutes ses demandes pour l’avenir.
Ferrari manque de jus
La domination de l’année dernière à Monaco est bien loin. Sans réaliser une mauvaise performance d’ensemble avec une 2ème place pour Vettel et une 4ème pour Railkkonen ainsi que des Mercedes tenues en respect, Ferrari n’a pas semblé en mesure de contester la supériorité des RedBull de tout le week-end. Même en course et malgré les problèmes de Ricciardo, Vettel était incapable de suivre le rythme de d’australien. L’allemand était bien trop occupé à essayer de sauvegarder sa monte pneumatique.
Les dégâts sont limités mais la performance globale interroge, d’autant que le paddock bruisse de rumeurs sur la légalité de la Ferrari dont nous nous étions fait l’écho dans notre article post Barcelone. Il se dit à présent que la question aurait été réglée discrètement par la FIA, mais que la Scuderia y aurait perdu une belle poignée de chevaux. La méforme des deux dernières épreuves comparativement aux précédentes pourrait y trouver son origine. Ceci sera à surveiller de près à Montréal, circuit où la puissance moteur est un facteur de performance autrement plus important qu’il ne l’est à Monaco.
Un mot sur Kimi Raikkonen qui n’a pas réussi cette année à se porter à la hauteur de son leader sur une piste qu’il affectionne pourtant particulièrement. Rien de dramatique, mais la courbe de performances ne s’inverse malheureusement pas.
Hamilton de nouveau lui-même
A l’inverse de Ferrari, la performance 2018 de Mercedes à Monaco ressemble à celle de 2017. La monoplace argentée n’est pas plus adaptée cette saison au tourniquet qu’elle ne l’était l’année dernière, présentant un sous-virage persistant et particulièrement inadapté à ce circuit où la réactivité du train avant est une nécessité pour performer.
Dans ce contexte, et avec son immense talent, Lewis Hamilton a eu le mérite de réaliser un week-end solide, de limiter sa perte avec une belle 3ème place et de garder une belle marge en tête du championnat avant de revenir sur des circuits où les qualités de sa monture sauront bien mieux se mettre en valeur.
Manque de réussite en course pour Valtteri Bottas, qui termine 5ème après avoir pourtant eu la clairvoyance d’opter pour les pneus super soft à flancs rouges lors de son unique arrêt, tandis que les quatre pilotes devant lui chaussaient les ultra soft violets. Le finlandais avait clairement tout bon mais cela ne suffira pas pour dépasser son compatriote.
Ocon retrouve son rang
Sur un circuit “de pilotes”, Esteban Ocon a retrouvé le chemin des bons résultats dont il était coutumier en 2017. 6ème en qualifications, il gardait ce résultat jusqu’à l’arrivée, se montrant souvent le plus rapide en piste au fil de la course. Très beau travail donc pour le jeune français, et résultat qui tombe à point nommé pour lui redonner confiance et faire repartir sa saison dans la bonne direction.
D’autant plus important que son coéquipier Perez s’est régulièrement montré un ton moins performant que lui tout au fil du week-end, ayant de surcroit la malchance d’être victime d’un arrêt au stands manqué pour obtenir une 12ème place à l’arrivée. Il est aléatoire d’avancer que le mieux est profond mais ce résultat prouve que Force India sait toujours trouver de l’appui aérodynamique.
Par ailleurs, et avec un championnat aussi serré, cette performance permet après celle de Baku d’améliorer lourdement le bilan comptable de l’écurie et de gagner une place au championnat. Toujours bon à prendre pour une écurie que l’on dit toujours en grande difficultés financières mais dont les performances remarquables depuis plusieurs saisons en dépit de moyens limités aiguisent dit-on l’appétit de Mercedes pour en faire une équipe satellite à part entière.
Un Gasly de Gala
Retour en forme de l’écurie B du clan RedBull, et un autre superbe résultat à la clé pour Pierre Gasly. Entré en Q3 le samedi, il se permettait de terminer 7ème le dimanche notamment grâce à un premier relais de 37 tours en hyper tendre, quand les leaders s’étaient eux arrêtés autour du 16ème tour. D’autant plus impressionnant que les temps au tour restaient particulièrement compétitifs jusqu’à son arrêt.
C’est donc un parfait mélange de gestion et de vitesse qu’a réussi le pilote français, bien aidé il est vrai par une monoplace avec des liaisons au sol efficaces. Avec 6 points de plus engrangés, Gasly pointe à la 11ème place du classement pilote dans les roues de Magnussen ou Sainz.
Ce fut une nouvelle fois bien plus compliqué pour Brendon Hartley, contraint à l’abandon après avoir été heurté par Charles Leclerc alors en perdition au freinage de la chicane du port. Pas grand chose à se repprocher pour le néo-zelandais, si ce n’est de ne pas avoir réussi une meilleure qualification, d’autant plus qu’il était performant jusque-là et largement dans le ton de son coéquipier.
C’est tout de même un résultat très encourageant pour Toro Rosso et Honda, qui confirme ses gros progrès en fiabilité et annonce par ailleurs quelques nouveautés pour le Canada. Il y en aura bien besoin sur un circuit très exigeant niveau moteur.
Parenthèse sur ce sujet, les discussions avec RedBull se poursuivent en coulisses pour l’équipement de la “grande” écurie. Rien n’est fait toutefois, et comme depuis plusieurs saisons il est toujours fortement possible que le partenariat avec Renault soit reconduit.
Renault s’installe
Avec une nouvelle double arrivée dans les points Renault confirme la 4ème place au championnat constructeur obtenue à l’issue de la course de Barcelone. De plus en plus à l’aise au volant de la monoplace jaune, Carlos Sainz a pris la mesure de son coéquipier Hulkenberg en qualifications. Entré en Q3 et 8ème sur la grille, l’espagnol pouvait nourrir de gros espoirs pour la course.
Pourtant, les choses se sont inversées le dimanche puisque Nico Hulkenberg, parti 11ème en gommes ultra tendres était capable, à la manière de Pierre Gasly, de faire tenir ses pneus 50 tours avant de les remplacer. Par voie de conséquences, il repartait et terminait la course en hyper tendres sur un rytme qui lui permettait de sécuriser la 8ème place et terminer devant son coéquipier, 10ème à l’arrivée.
Sans jamais faire de gros coups d’éclat, Renault poursuit son sérieux travail de construction et démontre une belle constance quel que soit le type de circuits proposé. Elle est bien entendu plus ou moins performante, mais cela reste globalement dans une fourchette étroite et des points ont récompensé chaque sortie cette saison.
Quand on constate les résultats en dents de scie des autres écuries en lutte pour cette 4ème place (c’est parfois peu de le dire), la régularité de Renault mérite d’être soulignée à sa juste valeur. D’autant que le meilleur est sans doute à venir, notamment maintenant que Carlos Sainz trouve petit à petit les clés pour sérieusement concurrencer son co-équipier.
Sauber continue la lutte
Encore un week-end ou l’écurie helvétique a su exploiter son potentiel au maximum et entrevoir des performances qu’il était compliqué d’espérer en début de saison. Certes, entrer dans les points semblait hors de portée à Monaco à moins d’une course à élimination qui n’eut pas lieu.
Cependant, il ne faut ni oublier la 11ème place de Marcus Ericsson dans les roues de Carlos Sainz et auteur d’un très beau week-end, ni oublier la très belle qualification du régional de l’étape Charles Leclerc, 14ème sur la grille. Le gros bémol du week-end vient de l’accident de ce dernier dont nous parlions ci-dessus, causé par une casse de disque de freins avant gauche.
Cette casse a été causée par une surchauffe du système alors que Leclerc suivait Brandon Hartley de près depuis plusieurs tours, se montant bien plus rapide que la Toro Rosso. Plus de peur que de mal pour un crash somme toute violent et qui aurait pu bien plus mal se terminer.
Il n’en reste pas moins que Sauber confirme savoir exploiter au mieux l’outil et les moyens dont elle dispose. En coulisses les choses s’activent par ailleurs pour resserrer encore un peu plus les liens avec Ferrari. En atteste le recrutement de Simone Resta en qualité de Directeur Technique, auparavant designer en chef de la Scuderia. C’est d’ailleurs un mouvement général qui se joue, chaque équipe “majeure” mettant ses pions en place, ne voulant prendre le risque de se retrouver moins influente que les autres.
McLaren reste à quai
C’est l’un des perdants du week-end. McLaren enregistre en effet à Monaco son premier résultat blanc de la saison, par la faute d’un abandon pour Fernando Alonso sur bris de transmission alors qu’il se dirigeais vers une 8ème place. Avant cela, le week-end n’avait pas non plus été particulièrement avantageux du point de vue de la performance, malgré un Alonso toujours capable de se sublimer pour aller chercher une 7ème place en qualifications.
Du côté de Stoffel Vandoorne c’est une modeste 14ème place qui venait clôturer le week-end. Comment expliquer qu’un pilote de ce talent ait autant de difficultés depuis début 2017 pour s’adapter à la F1 et produire les résultats attendus ? A Monaco, Stoffel s’était pourtant montré plus rapide qu’Alonso lors de l’ensemble des essais, jusqu’à la Q2. Après l’arrivée, le belge évoquait d’ailleurs une stratégie d’équipe destinée à favoriser Fernando Alonso au détriment de son propre rythme. Laissé en piste trop longtemps avec des pneus usés dans le but de ralentir la meute derrière lui, il tombait dans les profondeurs du classement après son arrêt.
Plus généralement, il se dit que les monoplaces d’Alonso et Vandoorne ne seraient pas exactement aussi bien préparées l’une que l’autre. Quoi qu’il en soit, ce week-end particulièrement, le parallèle entre RedBull et McLaren est cruel. Il devient même de plus en plus improbable que Mclaren puisse terminer la saison devant l’écurie Renault.
Mauvaise p’Haas
On savait dès Barcelone que le week-end de l’écurie Haas serait compliqué, mais pas forcément à ce point. Manifestement à côté du sujet tout le week-end, jamais l’écurie ne parvenait à exploiter la monoplace maison correctement sur le tourniquet monégasque, à quoi venait s’ajouter la pénalité de 3 places sur la grille reçue par Romain Grosjean après sa bévue barcelonaise.
18ème et 19ème sur la grille, Grosjean et Magnussen ont passé leur course en fond de peloton, Magnussen faisant meilleure figure que le français puisqu’il remontait au 13ème rang quand Grosjean devait se contenter du 15ème à un tour. Il faut toutefois noter l’absence de faute de la part des pilotes sur ce tracé exigeant. L’inconstance de l’écurie Haas est frappante, particulièrement face aux résultats de l’écurie Renault.
Il est acquis que lorsque tout est bien aligné, Haas dispose de la 4ème meilleure monoplace du plateau. Le problème étant d’arriver à démontrer ce potentiel sur la durée, et matérialiser les temps forts par des points sonnants et trébuchants. Avec trois résultats blancs en six courses, auxquels s’ajoute un seul point récolté en Chine, c’est à ce jour très loin d’être le cas, et se ressent lourdement aux classements.
Williams toujours sous l’eau
Une nouvelle fois cette saison, Williams s’est montrée l’équipe la moins performante du plateau avec les 16ème et 17ème places pour Sirotkin et Stroll, derniers classés de la course. Au manque de vitesse connu depuis le début de saison se sont ajoutées des failles manifeste d’exploitation.
De loin le plus performant des deux pilotes maison au fil du week-end, Sirotkin a été frappé d’une énorme pénalité (stop and go de 10 secondes) avant même le début de la course, ses roues n’ayant pas été montées avant le signal des 3 minutes avant le départ. Du côté de Stroll, manifestement mal à l’aise tout le week-end, le grand prix tournait à la bérézina, avec deux crevaisons au fil de la course, toutes deux dues à un problème de surchauffe des freins finissant par fragiliser les jantes. Les jours meilleurs paraissent toujours bien loin pour Williams.
Ricciardo relancé
Cette victoire de Ricciardo le replace au centre du jeu, tant dans son équipe qu’au classement du championnat. Bien entendu, les tracés aussi favorables à sa monture que ne l’a été ce circuit de Monaco seront très peu nombreux d’ici la fin de la saison. Ceci ne l’empêchera pas de s’affirmer comme trouble-fête majeur du duel entre Hamilton et Vettel, d’autant que la Mercedes comme la Ferrari ont leurs moments de faiblesse. Comme souligné plus avant, l’écurie italienne n’est certainement plus aussi à l’aise en performance pure qu’elle ne l’était avant Barcelone. Côté Mercedes, il faut toujours composer avec l’inconstance d’une monoplace capricieuse.
Rien n’interdit donc à RedBull de continuer d’espérer empocher le gros lot, surtout si Renault apporte les évolutions attendues, et si Max Verstappen arrive à trouver la clé pour maitriser son agressivité. Rien n’est encore joué. Plus loin dans le paquet, et grâce à sa régularité, Renault semble se dessiner comme 4ème force du plateau.
Qu’en sera-t-il après Montréal et son tracé également atypique ?
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