La Classe E All-Terrain: l’anti-SUV pour conducteurs avertis ?
Aller là où les breaks conventionnels doivent souvent abandonner. C’est l’ambition de la classe E All-Terrain. C’est la première Mercedes à poursuivre la niche des breaks “baroudisés”, alors qu’Audi a déjà trois générations d’A6 Allroad dans la besace, accompagné notamment de Volvo avec son XC70, remplacé depuis peu par le V90 Cross Country.
Alors que la demande pour les SUVs demeure solide, tant sur le vieux continent qu’aux Etats-Unis ou en Asie, le choix de lancer un break tout-chemins peut paraître singulier. Il s’explique par le fait que la nouvelle classe E S213 se prête particulièrement bien à l’exercice: par rapport à un break classe E standard, seulement 5% des pièces diffèrent. En intégrant cette variante dans le cahier des charges, Mercedes a donc pu couvrir ce sous-segment en minimisant ses coûts de développement.
La classe E All-Terrain est surélevée de 29 mm par rapport aux autres breaks classe E, répartis à raison de 14 mm grâce des roues de diamètre supérieur (245/45 R19 contre 245/45 R18 de série), et de 15 mm avec un réglage plus élevé de la suspension pneumatique multichambres Air Body Control. Elle peut être surélevée de 35 mm supplémentaires à basse vitesse, soit en appuyant sur la touche idoine, soit en sélectionnant le mode de conduite All-Terrain, ce qui fait passer la garde au sol de 121 à 156 mm. Suffisant pour parcourir des chemins à ornières, mais pas pour négocier des angles d’attaque en tout-terrain hardcore, ce que l’écrasante majorité des propriétaires de SUVs ne font de toute manière jamais.
Mercedes ne propose la Classe E All-Terrain qu’avec deux motorisations turbodiesel: une E220d de 194ch et la E350d qui est l’objet de cette essai. Il s’agit de l’ancien V6 turbodiesel OM642, pas du toute nouveau six-cylindres en ligne OM656 présenté notamment sur la CLS. Ce V6 développe un couple maxi de 620 Nm à 1600 t/min, et sa puissance culmine à 258 ch à 3400 t/min. Si l’observation du compte-tours et de sa zone rouge à 5’300 t/min vous fait espérer un caractère dynamique, vous serez déçu. Ce V6 est un turbodiesel classique, placide et bien moins démonstratif que sa valeur de couple ne pourrait le suggérer. Le 0-100 km/h revendiqué en 6.2s peut apparaître comme probant, mais il n’y a pas de satisfaction particulière à tirer de l’exercice. L’exigence minimale d’un turbodiesel et des sacrifices en raffinement qu’il impose est la sobriété. Avec 7.7L/100km relevés pour 7.5L/100km affichés, le résultat est parfaitement satisfaisant sur ce point.
Sonore (au sens le moins élogieux du terme) au démarrage, le V6 de 3.0 litres se fait oublier en conduite apaisée, surtout sur autoroute. Il est accouplé à la boîte 9G Tronic qu’il faut en l’occurrence appréhender comme une boîte 7+2 ou 8+1. Le neuvième rapport est long, le V6 tournant en-dessous de son régime de couple maxi à 130 km/h affichés sur autoroute. La conséquence est que la moindre reprise ou côte entraîne un rétrogradage en huit voire septième. Au plat, la classe E file par contre dans un silence relaxant, sans doute bien aidée par le pack confort acoustique.
La boîte 9G Tronic est dans la bonne moyenne, mais comme la plupart de ses homologues, elle n’est ni exempte d’à-coups occasionnels, ni particulièrement rapide dans l’exécution de ses changements. A la décharge de la boîte, l’inertie du turbodiesel est peut-être le facteur limitant dans l’exécution des changements de rapports. Si le mode Eco est sélectionné, elle applique le coasting, soit le débrayage au lever de pied pour laisser la voiture filer sur sa lancée, sans frein moteur.
Le tarage de la suspension pneumatique est asservi aux cinq modes de conduite disponibles par le Dynamic Select. Je m’attendais un mode Comfort un peu plus typé, plus flottant, comme sur la classe C. L’amortissement reste prévenant et rend la voiture reposante sur long trajet. La rigidité de la plateforme est bonne, aucune vibration n’est perceptible dans le plancher au passage de cassures, les sièges bien dessinés et confortables sur la durée. La finition est conforme aux standards Mercedes. La facture est bonne, mais les matériaux de qualité inégale. Les amateurs de belle sellerie seront rapidement confrontés à un dilemne: le cuir texturé n’est pas particulièrement flatteur, mais le cuir nappa designo est très cher (CHF 6’920). J’ai trouvé les applications en bois à pores ouverts réussies.
L’habitabilité arrière de la classe E est correcte pour la catégorie, sans plus. La place est suffisante dans les trois dimensions pour un homme adulte, mais l’assise n’est pas particulièrement profonde. C’est la réalité des plateformes contemporaines: pour 5m, t’as plus de place. Ou en tous cas pas assez pour se sentir vraiment à son aise comme dans une berline de 5.20m.
Même si rien dans le comportement moteur ne l’y prédispose, je me suis astreint à tenter une conduite plus rapide sur route sinueuse. En mode Sport, la tenue de caisse est bonne, et les sorties d’épingle serrées démontrent une bonne aptitude du système 4Matic à reporter le couple sur le train arrière et à contenir le sous-virage. La conduite plus rapide ne sombre donc pas dans l’exercice contre-nature, et le rythme dont la classe E All-Terrain est capable donnerait sans doute du fil à retordre à la plupart des SUV full size, hormis quelques exceptions notables au châssis affuté.
Cet essai est également l’opportunité de découvrir les nouveautés de la classe E. La plus flagrante est l’adoption du Widescreen Cockpit, une paire d’écrans LCD de 12.3″ diagonale juxtaposés. Le premier remplace le combiné d’instruments classique, le second l’écran multimédia est lui pile-poil dans l’axe de la voiture. Hérité de la classe S et annoncé sur la nouvelle classe A, l’approche semble destinée à la prolifération dans le portefeuille de Mercedes-Benz, à l’instar du Virtual Cockpit chez Audi.
Verdict ? Mitigé. Le système est fonctionnel, l’affichage de qualité et dépourvu de reflets indésirables. La nouvelle interface utilisateur du système Comand marque également un progrès par rapport à l’ancien système à deux bandes horizontales. L’exécution laisse toutefois l’impression d’une opportunité manquée. L’écran principal est utilisée pour afficher des instruments classiques. Trois modes sont proposés, Classic, Sport et Progressive, ce dernier étant le seul qui propose un minimum d’originalité dans son arrangement. Dans tous les cas, beaucoup d’espace vide et un contenu qui, somme toute, est équivalent à ce que les anciens systèmes proposaient.
Le groupe VW, Audi en tête, reste donc le seul à proposer une nouvelle approche avec l’incrustation de cartes 3D, des planches thématiques et, surtout, la possibilité de changer les modes d’affichage depuis le volant. Chez Mercedes, les modes d’affichage sont enfouis dans les sous-menus de configuration du système et sont, somme toute, d’un intérêt mineur.
Notre exemplaire est équipé de l’assistant de trajectoire et de bouchons Driving Assistance Package Plus, une option à CHF 3’148. En conduite normale, il agit comme alerte de franchissement de ligne en générant des alarmes. Si le régulateur de vitesse Distronic est activé, il assiste activement le maintien de la trajectoire et, sous les 60 km/h, entre en mode d’assistance de bouchon en gérant direction et démarrage arrêt de manière autonome. Le problème, comme sur ses homologues, est que l’action du système n’a rien de relaxante, surtout dans des encombrements qui imposent des arrêts fréquents. La surveillance du système demande une attention plus aiguë que si l’on garde le plein contrôle de la voiture, le pied prêt à agir sur la pédale de frein si le système devait venir à défaillir. Subjectivement, je l’ai trouvé moins fluide que celui de la BMW série 5.
Pourquoi choisir une classe E All-Terrain plutôt que le GLE ? La comparaison des mensurations montre que les deux produits sont très comparables en termes d’habitabilité. Si l’âge vénérable du GLE (ex-ML à peine facelifté) et en impérieux besoin de remplacement est une considération, la décision se fera probablement sur 2 critères: le côté trendy d’un SUV, un coffre un peu plus grand, et une position de conduite plus élevée. Objectivement, la classe E All-Terrain offre une habitabilité comparable, un seuil de chargement plus bas, un comportement routier et des performances supérieurs, et des aptitudes tous chemins largement suffisantes. Le cocktail All-Terrain est donc solide pour celui ou celle qui a besoin d’un peu plus de polyvalence de franchissement, mais n’a pas d’attirance pour un SUV ou ne souhaite pas consentir aux sacrifices inhérents à une poids et un centre de gravité élevés. Une approche raisonnée, mais minoritaire.
Prix et options du véhicule essayé
Mercedes E350d 4Matic AllTerrain | CHF 78’796 | € 72’101 |
Comand Online | CHF 3’148 | € 2’600 |
Driving Assistance Package Plus | CHF 3’148 | € 2’900 |
Toit ouvrant panoramique | CHF 2’319 | € 2’200 |
Intérieur cuir noir | CHF 2’269 | € 2’200 |
Pack pilote automatique de stationnement à distance | CHF 2’032 | € 1’500 |
Peinture rouge jacinthe métallisé designo | CHF 1’616 | € 1’600 |
Pack confort acoustique | CHF 1’444 | € 1’400 |
Phares Multibeam LED | CHF 1’426 | € 1’400 |
Pack Mémoires | CHF 1’338 | € 1’600 |
Affichage tête haute | CHF 1’301 | € 0 |
Climatisation Thermotronic | CHF 1’116 | € 1’100 |
Poste de conduite Widescreen | CHF 1’116 | € 900 |
Système audio Burmester | CHF 1’116 | € 1’100 |
Pack keyless Go | CHF 1’051 | € 0 |
Pack confort de chauffage | CHF 1’037 | € 1’000 |
Sièges avant climatisés | CHF 972 | € 900 |
Pare-brise chauffant | CHF 764 | € 700 |
Pack miroirs | CHF 722 | NC |
Ciel de pavillion en tissus noir | CHF 463 | € 0 |
Balance package Air | CHF 440 | € 500 |
Radio numérique | CHF 435 | € 550 |
Inserts frêne noir à pores ouverts | CHF 315 | € 0 |
Recharge sans fil et connection Bluetooth | CHF 264 | NC |
Lave glace avec buses chauffantes | CHF 227 | € 250 |
Baguettes de seuil éclairées | CHF 199 | € 200 |
Interface media | CHF 69 | € 76 |
Total incl TVA | CHF 118’724 | € 97’276 |
Face à la concurrence – caractéristiques techniques
Mercedes E 350d AllTerrain | Mercedes GLE 350d 4Matic | Volvo V90 Cross Country D5 | Audi A6 Allroad (C7) | |
Moteur | V6 turbodiesel 2987 cm3 | V6 turbodiesel 2987 cm3 | L4 turbodiesel 1969 cm3 | V6 turbodiesel 2967 cm3 |
Puissance (ch / t/min) | 258 / 3400 | 258 / 3400 | 235 / 4000 | 272 / 3500-4250 |
Couple (Nm / tr/min) | 620 / 1600 | 620 / 1600 | 480 / 1750-2250 | 580 / 1250-3250 |
Transmission | 4Matic | 4Matic | AWD | Quattro |
Boite à vitesses | 9G Tronic | 9G Tronic | Geartronic 8 | S-Tronic 7 |
RPP (kg/ch) | 8.05 | (8.18) | (8.17) | (6.97) |
Poids DIN (constr.) | (2035) 2077 54.3% AV 45.7% AR |
(2110) | (1920) | (1895) |
0-100 km/h (sec.) | 6.2 | 7.1 | 7.5 | 6.2 |
Vitesse max. (km/h) | 250 | NC | 230 | 250 |
Conso. Mixte (constr.) | 7.7 (6.8) | (7.5) | (5.3) | (5.6) |
Réservoir (l) | 66 | 93 | NC | 73 |
Emissions CO2 (g/km) | 179 | 192 | 139 | 149 |
Longueur (mm) | 4947 | 4853 | 4939 | 4938 |
Largeur (mm) | 1861-2065 | 1935-2141 | 1879 -2052 | 1898-2086 |
Hauteur (mm) | 1497 | 1796 | 1543 | 1534 |
Empattement (mm) | 2939 | 2915 | 2941 | 2905 |
Coffre (L) | 640–1820 | 690–2010 | 913-1526 | 565 |
Pneumatiques | 245/45 R19 | 235/65 R17 | 235/55 R18 | 235/55 R18 |
Prix de base (CHF) | 78’796 | 75’900 | 74’900 | 76’550 |
Prix de base (EUR) | 72’101 | 71’100 | 59’350 | 63’390 |
Nos remerciements à Mercedes Suisse pour le prêt de cette Classe E All-Terrain.
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