Le Q7 e-tron: recette gagnante pour un SUV frugal ?
Le meilleur des deux mondes. C’est par ces termes qu’Audi présente la version hybride plug-in du SUV full-size Q7. Un grand écart entre luxe et efficience, entre performance et frugalité. Une recette qui pourra sembler paradoxale pour beaucoup, en tous cas à deux titres.
Primo, l’hybridisation de grands et lourds 4×4 pourrait être taxée de contradictoire voire d’hypocrite, mais les normes de mesure de consommation et d’émissions sont ainsi (mal) faites que les grands constructeurs peuvent bénéficier d’un plus grand abaissement de leurs émissions de flotte en électrifiant leurs grands SUVs plutôt que d’autres modèles de gabarits plus raisonnables. La règle est la même pour tous, et BMW, Porsche, Volvo ou Audi parviennent à la même conclusion en électrifiant leurs X5, Cayenne, XC90 ou Q7. Les règles du jeu sont dictées par Bruxelles, les constructeurs n’ont d’autre choix que de s’y adapter.
Secondo, le mariage diesel-électrique. Sur le papier, la recette semble rationnelle: allier la motorisation thermique la plus économe en carburant fossile avec une électrification permettant non seulement de se déplacer avec d’autres sources d’énergie (nucléaire, hydroélectrique, éolien, solaire, ou charbon selon le lieu, la saison voire l’heure), mais aussi de récupérer la formidable énergie cinétique qu’emmène ces monstres de plus de deux tonnes. En termes d’image, le résultat peut paraître plus discutable, le diesel traînant la stigmate de carburant sale, ternie qui plus est par la litanie de scandales issus du dieselgate. Depuis septembre 2015, plusieurs constructeurs (dont Audi) ont été mis en cause dans une retentissante et ruineuse affaire de contournement frauduleux des protocoles d’homologation.
C’est précisément dans ce contexte tumultueux que le Q7 e-tron est lancé sur le marché à la fin 2015. Les ingrédients de la recette adoptée par Audi sont donc plus techniquement rationnels que circonstanciellement heureux. La motorisation thermique est confiée à un V6 turbodiesel de 2967 cm3 qui développe 600 Nm de 1250 à 3000 t/min, et 258 ch de 3250 à 4500 t/min. Par rapport au 3.0 diesel du Q7 de base, il est optimisé pour délivrer son couple maxi à plus bas régime au détriment de la puissance de crête, en retrait de 14ch. Ce TDI est accouplé en sortie de vilebrequin à un moteur électrique capable brièvement (sic) de 350 Nm à 2550 t/min et 128 ch à 2600 t/min. Audi ajoute en aval une boîte tiptronic à 8 rapports et une transmission quattro permanente avec distribution asymétrique du couple et différentiel central autobloquant. Les ingénieurs ont logé sur le train arrière un pack de batteries Lithium Ion contenant 17.3 kWh. On peut donc faire l’hypothèse qu’il s’agit de la capacité utile du pack, et non pas de la capacité maximale théorique.
L’ensemble est spécifié à un couple maximal de 700 Nm, toujours brièvement selon la fiche technique, et 275 kW soit 374 chevaux. De quoi, sur le papier, propulser les 2445 kg DIN du Q7 e-tron de 0 à 100 km/h en 6.2 secondes et atteindre une vitesse de pointe de 230 km/h. Le protocole de mesure NEDC amène Audi à revendique une autonomie électrique de 54 km, le système étant capable de maintenir une vitesse maxi de 135 km/h avant que le turbodiesel doive reprendre le relais.
Nous avons réalisé cet essai dans la foulée de celui du formidable SQ7, nous étions donc en terrain familier. A part des détails cosmétiques dans le traitement des boucliers avant et arrière, c’est un Q7, avec ce que ça a de bien (habitabilité) et ce qui suscite quelques réserves parmi la plupart des observateurs. Mon avis demeure que le pack optique noir est une piste à creuser pour concocter un combo susceptible de donner de l’élégance aux lignes et proportions du Q7. A l’intérieur, notre exemplaire est équipé des sièges massants ventilés, ce qui les rend incompatibles avec les jolis motifs matelassés en losange. Le cuir reste de premier choix, souple et soyeux, et la fonction de massage à 10 coussins et 5 niveaux d’intensité est divinement relaxante sur longs trajets.
L’espace réservé au passagers avant et arrière est généreux, et si la capacité du coffre est légèrement restreinte par la présence du pack de batteries sous le plancher, elle reste confortable (de 650L à 1835L avec les sièges rabattus). Le Q7 est long (505 cm), large (197cm hors rétroviseurs), mais la contre-partie est d’être capable d’accueillir quatre adultes ainsi que leurs bagages en tout confort.
Au démarrage, le vrouf velouté du V8 TDI du SQ7 est remplacé par le silence absolu du système électrique e-tron. Les deux alternatives ont leurs attraits respectifs, mais diffèrent radicalement en termes de performances. Les accélérations en mode électrique sont modestes. Audi annonce un 0-60 km/h en 6.5s, ce qui illustre mal l’éternité qu’il faut pour atteindre une vitesse de croisière sur autoroute sans déclencher la mise-en-marche du turbodiesel. Pas de miracle, une centaine de chevaux pour 2.5 tonnes sont suffisants pour des évolutions paisibles, pas pour des accélérations franches. La définition est parfaitement cohérente et logique, mais l’acheteur(euse) ne doit pas s’attendre au côté ludique des reprises d’un Tesla Model S ou Model X.
La position du moteur électrique en amont du convertisseur de couple et de la boîte dans la chaîne cinématique signifie que la boîte tiptronic égrène ses rapports en mode EV, ce avec des pauses marquées lors du passage de rapport, bien plus qu’elles ne le sont en mode thermique. Je ne connais pas la raison technique sous-jacente, mais le phénomène est perceptible.
La suspension pneumatique (une option à 2670 CHF) offre elle-aussi un excellent confort. Son tarage est notablement plus souple que sur le SQ7. En fait, le SQ7 reste plus ferme dans son réglage le plus confortable que le Q7 e-tron dans son réglage le plus dur. Vous suivez ? Ceci fait du Q7 e-tron un véritable tapis volant en mode confort, pompant légèrement sur les compressions, ce qui est agréable à allure légale sur autoroute. Je trouve un peu plus regrettable que Audi n’ait pas choisi un réglage un peu plus rigoureux pour le mode dynamique. Ne peut-on pas être hybridé et arsouilleur occasionnel ? Audi offre une suspension adaptative typée sport en option, dommage qu’il faille choisir. Sur autoroute, le silence de fonctionnement est excellent, même lorsque le turbodiesel se met en action. Celui-ci sait rester discret, mais dans les évolutions à basse vitesse, fenêtres ouvertes, les cognements lugubres restent audibles.
L’Audi Virtual Cockpit prend une dimension accrue avec cette motorisation hybride. En plus des modes d’affichage habituels avec carte Google Earth affichée en large format sur l’écran LCD de 12.4 pouces, Audi offre différentes configurations pour le cadran de gauche: un compte tours classique, un puissance-mètre, ou un puissance-mètre incrusté d’un petit compte-tours qui a eu ma préférence.
Le puissance-mètre fournit non seulement une bonne indication de la sollicitation du système en propulsion, mais également de ses capacités de régénération. Le frein moteur électrique par défaut est faible, et la puissance de freinage régénérative reste faible. Il est donc crucial d’anticiper les ralentissements pour maximiser la récupération d’énergie cinétique plutôt que de la dissiper en chaleur dans les disques de frein. Le système de charge sur le secteur a fonctionné à satisfaction, ingérant jusqu’à 16.7 kWh pour refaire le plein (ce qui reste inférieur aux 17.3 kWh de contenu énergétique annoncé, sans même compter le rendement de charge). Je n’ai fait que deux tentatives de recharge sur un réseau de recharge public (EVite en l’occurrence). Une en faisant mes courses dans un hypermarché Migros (1 km d’autonomie en 12 minutes chrono), l’autre sur la borne payante d’un restoroute qui semblait coopérative mais a refusé tout service dès le moment où j’ai verrouillé le Q7 pour aller me sustenter. Le recours à une prise domestique pour la routine et aux bonnes vieilles pompes d’hydrocarbures pour les plus longs trajets reste, à ce jour, le plus pragmatique.
D’une autonomie NEDC (très) théorique de 56 km, le Q7 e-tron a toujours annoncé une autonomie électrique projetée de 42 à 43 km. L’autonomie effective dépend très fortement du type de trajet: vitesse, dénivelé, style de conduite. Cette projection semble plausible pour une conduite calme sur terrain plat, mais diminue dès que les conditions s’en écartent: j’ai relevé 36 km sur autoroute, et 27 km sur un trajet me menant jusqu’à Engelberg, toujours avec un pied droit prévenant.
Tout ceci nous amène au bilan de consommation: j’ai relevé 7.34 L/100 km de gazole, une valeur proche des 7.2L/100km enregistrés par l’ordinateur de bord, pour une moyenne horaire de 79 km/h. A ceci s’ajoutent 76.6 kWh en provenance de la grille électrique, soit une dépense d’environ 15.3 CHF pour une source d’énergie pas (encore) taxée pour financer l’entretien du réseau routier. La consommation électrique en mode éco-drive resort à 38.8 kWh/100km, ce qui est élevé pour un véhicule électrique. Si l’on combine les deux sources d’énergie, on arrive à l’équivalent économique (à 1.70 CHF/litre de diesel) de 7.9 L/100km. C’est une valeur louable pour un SUV de 2.5 tonnes, mais nous n’avons consommé que 9.27 L/100km avec un SQ7 dont les prestations sont d’un tout autre niveau et dont le prix de base est dangereusement voisin.
Plus de 25’000 CHF séparent également le Q7 e-tron d’un Q7 3.0 TDI “de base”, et c’est une somme considérable. L’achat de la version e-tron vaut-elle l’investissement ? Aux coûts énergétiques actuels, il faudrait plus de 500’000 km parcourus exclusivement en mode électrique pour atteindre un point de retour sur investissement. Ce calcul ne tient pas compte des avantages fiscaux octroyés aux véhicules selon les cantons, mais l’économie d’un millier de francs de taxe annuelles ne changerait pas cette conclusion: quitte à s’astreindre à une utilisation électrique, autant acheter un Tesla Model X.
Le Q7 e-tron se retrouve ainsi en porte-à-faux entre une tarification peu attractive et une définition atypique. Sa capacité de batterie autorise une autonomie électrique supérieure à ses concurrents directs, mais cette hybridisation reste un luxe, celui de pouvoir accomplir des trajets pendulaires dans la quiétude de la propulsion électrique avec la polyvalence qui reste la fondation de la mobilité individuelle. L’hybridisation choisie par Audi pour ce Q7 offre les attraits de la mobilité électrique sans ses servitudes en termes de facilité d’utilisation, mais sans le côté ludique que Tesla a insufflé à ses produits avec des accélérations addictives. Une électrification calme et raisonnable, qui peut effectivement tenir la promesse du meilleur des deux mondes à des clients pour qui l’électrification de la mobilité n’est pas une question économique.
Cette version e-tron du Q7 ne démérite pas: elle préserve toutes les qualités intrinsèques de ce grand SUV, spacieux et luxueux, tout en lui donnant une particularité distinctive qui pourrait résonner avec une partie de la clientèle. Elle conserve également un autre attribut moins enviable du Q7, un catalogue d’options dont l’énumération et les montants pourrait donner le vertige. Pour ma part, à un tarif et pour une consommation de carburant aussi proches, le SQ7 reste irrésistible.
Prix et options du véhicule essayé
Audi Q7 e-tron | CHF 98’950 | € 82’680 |
Sièges climatisés avant | CHF 4’420 | € 4’150 |
Sièges en cuir valcona | CHF 3’320 | € 3’100 |
Suspension pneumatique | CHF 2’670 | € 2’490 |
Décoration alu Sono / bois Beaufort | CHF 2’560 | € 2’390 |
Pack d’assistance tour | CHF 2’470 | € 2’290 |
Toit panoramique | CHF 2’280 | € 2’150 |
Pack d’assistance ville & parking | CHF 2’120 | € 2’450 |
Pack cuir 1 | CHF 2’020 | € 1’900 |
Affichage tête haute | CHF 1’810 | € 1’690 |
Préparation attelage | CHF 1’760 | € 0 |
Garantie +2 ans/100’000km | CHF 1’560 | € 1’335 |
Jantes Aero 20″ | CHF 1’560 | € 2’300 |
Système audio Bose 3D | CHF 1’500 | € 1’490 |
Peinture Gris Graphite | CHF 1’290 | € 1’200 |
Clé confort | CHF 1’270 | € 1’190 |
Phares LED matrix | CHF 1’250 | € 3’125 |
Fermeture assistée des portes | CHF 840 | € 790 |
Laquage complet | CHF 720 | € 675 |
Siège avant à mémoire | CHF 710 | € 0 |
Sièges massants ventilés | CHF 600 | € 1’900 |
Vitrage privacy | CHF 590 | € 550 |
Chauffage sièges AV/AR | CHF 520 | € 960 |
Colonne de direction électrique | CHF 520 | € 490 |
Banquette arrière Plus | CHF 510 | € 475 |
Airbags latéraux à l’arrière | CHF 470 | € 450 |
Volant multifonctions | CHF 450 | € 420 |
Audi Connect 3 ans | CHF 410 | € 0 |
Ciel de toit en tissus noir | CHF 410 | € 375 |
Store de protection solaire manuel | CHF 370 | € 0 |
Plancher de chargement variable | CHF 370 | € 0 |
Eclairage d’ambiance | CHF 360 | € 700 |
Télécommande de porte de garage | CHF 320 | € 300 |
Préparation rear seat entertainment | CHF 250 | € 0 |
Accoudoir central en deux parties | CHF 160 | € 0 |
Filet de séparation | CHF 120 | € 0 |
Bonus Premium | CHF -5’930 | – |
Prix catalogue du véhicule de test | CHF 135’580 | € 125’675 |
Face à la concurrence – caractéristiques techniques
Audi Q7 e-tron | BMW X5 xDrive 40e | Porsche Cayenne S E-Hybrid | Volvo XC90 T8 AWD TwinEngine | |
Moteur thermique | V6 turbodiesel 2967 cm3 | L4 1997 cm3 turbo | V6 2995 cm3 compresseur | L4 1969 cm3 turbo |
Puissance (ch / t/min) | 258 / 3250-4500 | 245 / 5000 – 6500 | 333 / 5500-6500 | 320 / 5700 |
Couple (Nm / t/min) | 600 / 1250-3000 | 350 / 1250 – 4800 | 440 / 3000-5250 | 400/2200-5400 |
Puissance électr. | 128 / 2600 | 113 / 3170 | 95 / 2200-2600 | 88/117 |
Couple électr. | 350 / 2550 | 250 / 0 | 310 / 1700 | 240/0-50 |
Puissance système | 374 | 313 | 416 / 5500 | 320+87 / 5700 |
Couple système | 700 | N.C. | 590 / 1250-4000 | 400+240 / 2200-5400 |
Transmission | Quattro | xDrive | 4 RM | eAWD 2+2 |
Boite à vitesses | Tiptronic 8 | Steptronic 8 | Tiptronic S | Automatique 8 |
RPP (kg/ch) | (6.54) | 7.57 | (5.65) | 5.75 |
Poids DIN (constr.) | (2445) | 2369 (2230) 46% AV 54% AR |
(2350) | 2340 (2050) 52.1% AV 47.96% AR |
0-100 km/h (sec.) | 6.2 | 6.8 | 5.9 | 5.6 |
Vitesse max. (km/h) | 230 | 210 | 243 | 230 |
Conso. Mixte (constr.) | 7.34 (1.8) | 8.74 (3.3) | (3.4) | 9.96 (2.1) |
CO2 (g/km) | 48 | 77 | 79 | 49 |
Batterie (kWh) | 17.3 | 9.0 | 10.8 | 9.2 |
Réservoir (l) | 75 | 85 | 80 | 50 |
Longueur (mm) | 5069 | 4886 | 4855 | 4950 |
Largeur (mm) | 1968/2212 | 1938/2184 | 1939 | 2008/2140 |
Hauteur (mm) | 1741 | 1762 | 1705 | 1776 |
Empattement (mm) | 2996 | 2933 | 2895 | 2984 |
Coffre (L) | 650/1835 | 650/1870 | 618/1728 | 314-692-1868 |
Pneus | 285/45R20 | 255/55 R 18 | 255/55 R 18 | 275/45 R20 |
Prix de base (CHF) | 98’950 | 84’100 | 106’200 | 96’000 |
Prix de base (EUR) | 82’680 | 75’150 | 89’600 | 90’750 |
Nos remerciements à Audi Suisse pour le prêt de ce Q7 e-tron.
Galerie de photos
Afficher la galerie de photosLiens
Le sujet du forum – les articles Audi – la liste des essais – à lire: