Essai VW Multivan T6: le transporteur

J-C Etter

8 ans ago

Le VW Multivan T6 est-il une alternative réaliste aux SUVs et monospaces traditionnels ?

Depuis plus de 30 ans, VW commercialise le Multivan, désormais en sixième génération. C’est en tous cas ce que le communiqué de presse de la marque prétend, ignorant singulièrement l’héritage sexagénaire du modèle avec le fameux “Bulli” (contraction de Bus et Lieferwargen, véhicule de livraison), dont la première génération – le T1 – fut lancée en 1950. Tour à tour bête de somme, véhicule de loisirs et tourisme ou transporteur de personnes, le Transporter/Multivan est un pilier de la marque de Wolfsburg.

C’est dans sa configuration de “business van” que j’ai eu l’occasion de faire des centaines de kilomètres à son bord en tant que passager. Le Multivan est le véhicule utilisé par les marques du groupe Volkswagen pour véhiculer des brigades de journalistes blasés – ou qui prétendent l’être – d’aéroports ensoleillés vers des hôtels de luxe largement au-dessus de leurs moyens pour essayer des véhicules qui ne le sont pas moins – voire plus. Spacieux et confortable, j’en suis venu à me demander si le Multivan n’est pas une alternative pragmatique à des SUVs somme toute limités en termes de capacités de transport de plus de 4 adultes. La grande inconnue était de découvrir ce Multivan non pas comme passager, mais comme conducteur. Se rapproche-t-il plus d’un utilitaire en costume de ville, ou est-ce un réel monospace au format XL ?

Ce que je considérais comme une saine curiosité s’est vite transformé en accès d’angoisse, les deux semaines au volant du fringant T6 coïncidant avec, vous l’aurez deviné, un voyage vers un aéroport du sud de l’Europe en compagnie d’une escadrie de journalistes, conforme en tous points à la description du paragraphe précédent. Et mon cerveau de faire immédiatement la connection entre les dimensions du Multivan et les gabarits d’entrée du parking sous-terrain de l’aéroport de Zürich, prévenant les étourdis avant qu’ils aillent encastrer le toit de leur véhicule dans une dalle de béton. Ou arracher des luminaires. Ou déglinguer de la plomberie anti-feu. Ou applatir des conduits d’aération. Les scénarios catastrophe s’enchaînant en spirale dans ma tête, j’entreprends de fébrilement consulter le site du Flughafen Zürich pour déterrer la précieuse information: la jauge est à 2.00 m, avec peut-être pas un centimètre de plus.

La documentation de VW indiquant 1950mm, je vérifie ensuite, double mètre en main, que cette configuration particulière ne dépasse pas la spécification. Au prix de quelques acrobaties pour minimiser les effets de parallaxe, j’arrive à me convaincre que mon exemplaire est conforme aux mensurations sur catalogue. Arrivé au nord de Zürich, c’est la tête rentrée dans les épaules que j’aborde les barrières d’alerte sur la rampe d’accès, puis m’engouffre dans le parking P2, me répétant “jusqu’ici ça va” tous les dix mètres.

Dieu que c’est haut. Jamais je n’ai scruté la topographie d’un plafond avec autant d’attention. Malgré la longueur et l’empattement conséquents du T6, la rampe en colimaçon qui m’amène à la place 6-158 est facile à négocier, bien plus qu’avec une berline de taille équivalente. La vue dominante se transforme en avantage pour placer les roues arrière gauche et avant droite à une saine distance des sinistres rebords. Les volumes de boîte à chaussure font le reste. Aéroport à 2m00, barrière anti-camping car de place de sport communale à 2m10, centre commercial à 2m20, VW a bien pensé les dimensions du Multivan, maximisant le volume intérieur sans handicaper les possibilités d’accès. Mes craintes étaient légitimes, mais s’avèrent infondées.

La gamme Multivan est large et riche, c’est un euphémisme. Sur la base de deux versions d’empattement (nous avons la “courte” de 3 mètres, une exécution à 3.40m est également au catalogue), on a le choix de 7 motorisations, 3 boîtes de vitesse, 2 transmissions et 4 finitions, sans même compter les innombrables accessoires et options d’arrangement intérieur pour adapter le Multivan à votre utilisation. La configuration la plus courante compte 7 places (2+2+3), mais le Multivan peut être livré en 5 places (2+3) en entrée de gamme, et la version à empattement long peut également être livrée en configuration à 8 places (2+2+2+2). Les sièges sont montés sur des rails, ce qui rend leur coulissement relativement facile. Ils peuvent également pivoter sur leur axe pour former une configuration face-à-face. Nous avons hérité d’une version Highline Liberty plutôt orientée luxe et affaires, et richement équipée. La petite table pliante intégrée à la console centrale coulissante offre relativement peu de surface – la table de picnic encastrable est une alternative à considérer selon les utilisations.

Si deux 2.0 TSI essence de 110kW et 150 kW sont proposés pour la bonne forme, ce ne sont pas moins de cinq 4 cylindres TDI qui peuplent le catalogue avec des versions 62 kW (85 ch), 75 kW (102 ch), 84 kW (115 ch), 110 kW (150 ch) et 150 kW (204 ch). C’est ce dernier qui équipe notre Multivan, dans une exécution un peu assagie par rapport à celle essayée dans la Passat Variant. Le 1968 cm3 bi-turbodiesel voit son couple maxi ramené de 500 à 450 Nm, mais à un régime abaissé à 1400 t/min. La puissance culmine à 204 chevaux à 4000 t/min au lieu de 240. Il est accouplé à une boîte à double embrayage DSG à 7 rapports (c’est une option) et à la transmission intégrale 4Motion (c’est une option également).

Les tarifs débutent à 33’460 CHF pour le Multivan Trendline TDI 85ch en boîte manuelle à 5 rapports, notre version Highline Liberty 204ch DSG 4Motion est affichée à plus du double, 69’700 CHF. Il y a donc de quoi satisfaire tous les budgets. Cette sixième génération du Multivan a adopté les directions de style du groupe. Des lignes droites, tendues, partout où c’est possible, une nervure géométrique qui court des phares avant à leurs homologues de poupe. Pas vraiment de fioritures, mais un style sobre qui a son élégance.

A l’intérieur, on est assis très haut (pour comparaison, un monumental Range Rover Sport ne culmine qu’à 1.78m), avec une vaste planche de bord et un volant fortement incliné vers l’horizontale. J’aurais apprécié la possibilité de ramener le volant plus près du corps pour adopter une position de conduite plus décontractée. La finition est sans fioritures particulières, mais de bon niveau, et la combinaison cuir-alcantara de cette finition Highline est agréable. L’ensemble dégage une impression austère, confortable sans être opulente.

La prise-en-main ne pose par ailleurs pas de difficulté particulière. La boîte DSG rend la conduite facile, exécutant des montées de rapport au scalpel en évitant de trop faire mouliner le turbodiesel. Elle n’est pas infaillible, et des à-coups peuvent occasionnellement survenir en relance dans le trafic lorsqu’on la prend à contre-pied. Le rapport poids-puissance de 10.4 kg/ch n’en fait pas un véhicule particulièrement alerte, mais les accélérations du Bi-TDI sont respectables, comme en témoigne le 0-100 km/h annoncé en 10.1s. Il est même légitime de s’interroger sur la pertinence du choix de ce moteur, mais l’échelon inférieur – le 2.0L mono-turbo de 340 Nm et 150ch pourrait s’avérer mince à pleine charge, soit 3 tonnes à tirer.

Assis derrière le volant plutôt que sur les places arrière, le Multivan T6 est étonnamment plaisant à conduire. J’avais déjà constaté en tant que passager la bonne rigidité de la plateforme. Le passage de joints de dilatation et autres cassures ne se traduit pas par la propagation de vibrations dans le plancher, ce qui n’est pas le cas pour tous les véhicules de la catégorie. La hauteur du centre de gravité reste en handicap sur des parcours plus sinueux, mais sur autoroute, même à un rythme de croisière pressé, la tenue de cap est sereine et je n’ai pas constaté de sensibilité particulière au vent latéral. Le silence à bord est de bon niveau, l’isolation phonique est efficace.

En utilisation quotidienne, le T6 s’avère relativement polyvalent si l’on s’adapte à ses spécificités. Le coffre est petit en configuration 7 places, et la porte demande passablement de dégagement. Les portes latérales coulissantes électriques offrent un accès beaucoup plus pratique pour déposer un sac ou des emplettes. Une autre particularité à intégrer est le fait que le Multivan est un véhicule à 4+3 places. L’accès aux 3 places arrière demande la manipulation des dossiers de siège, assez aisée pour un adulte, mais qu’on ne pourrait pas par exemple confier à un enfant que l’on dépose ou embarque devant une école par exemple. Sans autres informations sur la manipulation des dossiers des sièges de la rangée intermédiaire, des passagers occasionnels attendront d’être libérés par le conducteur pour s’extraire de places arrière par ailleurs très confortables. La capacité de chargement totale, tous sièges arrière retirés, est de 5800 litres, mais le travail pour libérer cet espace est significatif.

Un domaine que je dois avouer ne pas avoir exploré autant que sur d’autres voitures est le comportement routier. Rien dans la définition du Multivan, la hauteur de son centre de gravité ou la position de conduite n’incite pas à taquiner du virolet. L’amortissement réglable a un effet perceptible, mais j’ai la plupart du temps préféré la position Confort. Je n’ai rien constaté de scabreux, le freinage apparaît suffisant, mais il faut se rendre à l’évidence: c’est un véhicule que l’on conduit paisiblement, et il est rassurant dans ces conditions. La transmission intégrale 4Motion se fait totalement oublier, mais procure une motricité irréprochable lorsqu’on doit solliciter le couple maxi pour s’extirper d’une intersection.

Nous avons mesuré une consommation de 9.0 L/100km de diesel sur l’ensemble de cet essai, avec un chargement faible, mais une part significative d’autoroute où la surface frontale considérable est pénalisante. Nous avions relevé 6.9 L/100km avec le même moteur (en version 240ch) sur la Passat Variation 4Motion, beaucoup plus légère et aérodynamiquement fine, donc la logique est respectée.

Au bilan, ce Multivan est tout sauf une punition à conduire. C’est même un choix parfaitement raisonnable pour une personne dont les loisirs sont encombrants et qui doit utiliser son véhicule au quotidien. Moins trendy qu’un SUV, il offre une polyvalence appréciable, avec un véritable espace à vivre ou une capacité de chargement gargantuesque. La gamme de moteurs et de finitions permet également de configurer un T6 pour un large plage de budgets. La classe V de Mercedes offre une alternative qui mérite examen et comparaison en fonction du cahier des charges retenu. Ford, Peugeot ou Renault offrent également des versions tourisme de leurs utilitaires, mais un examen attentif de leurs aptitudes routières est conseillé. Un domaine dans lequel le Multivan T6 délivre une prestation convaincante. La clientèle semble suivre, puisque le T6 fait un véritable carton sur le marché suisse: plus de 3000 unités ont été immatriculées sur le marché suisse sur les dix premiers mois de 2016, ce qui le place onzième au hit parade des ventes, tous modèles confondus !

Prix et options du véhicule essayé

VW T6 Multivan Highline Liberty 204ch	CHF 69’700
Soundsystem Dynaudio	CHF 1’775
Side assist	CHF 450
Roue de secours	CHF 340
Vitrage isolant/privacy	CHF 330
Pare-brise chauffant	CHF 265
Light Assist	CHF 165
Préparation galerie de toit	CHF 150
Jantes Cascavel	CHF 100
Réservoir 80L	CHF 80
Ecrous anti-vol	CHF 55
Kit tiroirs	CHF 45
Prix catalogue du véhicule de test	CHF 74’440

Face à la concurrence – Caractéristiques techniques

	VW Multivan T6 2.0 BiTDI DSG 4Motion	Mercedes V250D 4Matic
Moteur	L4 bi-turbodiesel 1968 cm3	L4 turbodiesel 2143 cm3
Puissance (ch / t/min)	204 / 4000	190 / 3800
Couple (Nm / tr/min)	450 / 1400-2400	440 / 1400-2400
Transmission	4Motion	4 Matic
Boite à vitesses	DSG7	7G-TRONIC PLUS
RPP (kg/ch)	(10.4)	(10.9)
Poids DIN (constr.)	(2120)	(2080)
0-100 km/h (sec.)	10.1	10.6
Vitesse max. (km/h)	199	199
Conso. Mixte (constr.)	9.03 (6.6)	(6.6)
CO2 (g/km)	172	174
Réservoir (l)	N.C.	57
Longueur (mm)	4904*	4895**
Largeur (mm)	1904/2297	1928/2249
Hauteur (mm)	1950	1880
Empattement (mm)	3000	3200
Coffre (L)	N.C./5800	610
Pneus	255/45R18	225/55 R17
Prix de base (CHF)	69’700	61’662
Prix de base (EUR)	103’270***	65’789