Infiniti FX50S : la croisée des mondes


Le SUV Infiniti FX50S à l’essai: à la croisée des mondes.

Ironie du sort, si le FX est sorti depuis des années sur d’autres marchés, et a depuis inspiré certains constructeurs allemands, il arrive le dernier sur nos terres, et devra se battre avec une concurrence qui a eu le temps de s’affûter. Heureusement, une excellente réputation le précède, mais saura-t-il se montrer à la hauteur?
Le moins que l’on puisse dire de ce FX, c’est qu’il en impose. La couleur aide, je vous l’accorde, mais même dans des teintes plus banales, il ne passe pas inaperçu. Le design du FX a, dès la première génération apparue en 2003 (FX35 et FX45), été unanimement salué dans le petit monde des designers automobiles. Depuis, l’eau a coulé sous les ponts, les autres constructeurs ont emboîté le pas des SUV design (je pense entre autres au BMW X6), mais grâce à un récent lifting, le FX50 tient toujours son rang.

On ne change pas une équipe qui gagne, et fort logiquement, ce FX50S ne tranche pas radicalement avec son prédécesseur, mais évolue légèrement vers un design encore plus baroque. Les phares arborent un dessin plus agressif et la calandre un motif en vague. C’est peut-être l’un des plus beaux cross-over de la production actuelle, et même si certains lui reprocheront  un côté “m’as-tu-vu”, il est sans conteste l’un des plus originaux.
Les proportions contribuent également à cette impression de mastodonte. J’emploie à dessein le terme, car mis à coté de son lointain cousin le Nissan Murano, on se rend compte que ce SUV n’est pas si SUV que ça. Si la hauteur de caisse ne trompe pas, le toit reste très bas. C’est tout bon pour la ligne générale, très dynamique, et c’est de bon augure pour le comportement, car cela devrait abaisser le centre de gravité.

L’intérieur est, sans grande surprise, très ressemblant à celui du coupé essayé précédemment. On retrouve la même philosophie que dans la G37, mais avec une coloration plus luxueuse. Ainsi les sièges, si ils gardent leur excellente forme alliant subtilement confort et maintien, gagnent de jolies surpiqûres en devenant matelassés. Il ne se contentent plus d’être chauffants, il deviennent réfrigérants, un détail qu’apprécieront certainement à sa juste valeur les porteuses de jupe en été, surtout si vous avez opté pour le cuir noir. La caméra de recul a également fait des petits, puisqu’à présent, ce  ne sont pas moins de quatre caméras qui travaillent de concert pour cerner intégralement le périmètre de la voiture, vous offrant une vue de haut, de la voiture et des alentours, sur l’écran du GPS. Détail agréable lorsqu’il faut garer Goliath dans un mouchoir de poche: la caméra reste active lorsque vous enclenchez la marche avant. De plus vous avez à tout instant le choix entre cette vue de haut, et une vue devant/derrière, suivant la vitesse engagée, ainsi qu’un vue trois quarts avant. D’autant plus que le FX semble attirer les mouchoirs de poche, allez comprendre.

Passons à l’arrière où la banquette est heureusement rabattable en deux partie, mais surtout où l’inclinaison du dossier de chaque siège est réglable individuellement. Le doute m’assaille à la vue du coffre qui parait vraiment rikiki à priori. En réalité, avec 410L, il n’est pas si ridicule que ça. C’est surtout par rapport au gabarit de la voiture qu’on est surpris, même si dans l’absolu, ça reste moins qu’un Murano, par exemple, ou qu’une grande berline. Il présente au moins l’avantage d’une surface de chargement parfaitement plate, ce qui s’avère très pratique quand vous devez improviser une table à langer sur le bord de la route.

Et puisque nous sommes au chapitre dommage, citons rapidement les plastiques à la fois un peu trop présent vu le standing de la voiture et à l’aspect pas toujours très flatteur.

Pour le reste, pas de grosse surprise. Comme sur les autres modèles en provenance de Tochigi, on retrouve le toit ouvrant, l’équipement audio en provenance de chez Bose, le bloc de navigation, etc. L’originalité vient plutôt du fait qu’ici la notion d’option a été gommée du vocabulaire, tout est de série, ou presque. Seule l’inévitable peinture métallisée est en option, ainsi qu’une roue de secours temporaire.La position de conduite est finalement surprenante, vu la catégorie. Si l’assise est logiquement haute, du fait du châssis, on a malgré tout une impression de confinement, toutes proportions gardées, avec un habitacle très massif, une implantation des sièges relativement basse, et une vue sur le long capot bombé typique de la marque. Au final, on a le sentiment de prendre place dans une berline sportive, qui aurait été monté sur des roues trop grande, façon Monster Truck.
Surprenant, mais pas désagréable.

Je retrouve au démarrage ce soin particulier apporté à l’échappement que l’on trouvait déjà dans la G37S. Ce son est tout simplement jouissif. Interdiction de parquer la voiture dehors, vous devez absolument avoir un garage fermé à la maison, les réverbérations du V8 étant largement plus efficace qu’un ristretto pour vous reconnecter les neurones le matin.

Hélas, les premiers tours de roues me font cependant vite déchanter… Commençons par le freinage, repris du coupé de la marque. Si les disques de 355mm sont parfaitement à leur aise sur le G37, ils sont ici soumis à des contraintes beaucoup plus importantes, et ont un peu plus de peine à ralentir les quelques 400 kg supplémentaires. Au passage, décernons un mentions spéciale à Infiniti qui doit là détenir la palme de l’exactitude du chiffre officiel (2121 kg), avec un écart de… 1kg. Même si l’utilisation d’aluminium a permis de gagner quelques kilos par-ci par là, faisant de ce SUV l’un des plus léger de sa classe,  ça n’en demeure pas moins un fort beau gabarit. Il faudra combler l’allongement des distances de freinage par un surplus d’anticipation, ce qui n’a finalement rien d’étonnant vu la catégorie de la voiture. Sur autoroute, le régulateur de vitesse adaptatif est toujours aussi bluffant d’efficacité, mais l’assistance au freinage est malgré tout un peu déconcertante. Il n’est pas rare en effet de sentir la pédale se dérober sous votre pied, le système décidant quasiment en même temps que vous qu’il est grand temps de freiner.

Ce n’est guère mieux en ce qui concerne le contrôle continu des amortisseurs (Continuous Damping Control), censé s’adapter automatiquement à la route et au style de conduite. Après quelques kilomètres d’autoroute et de routes principales à des allures plus que légales avec la suspension en mode automatique, un dur constat s’impose. Je n’y avais encore jamais fait attention, mais “auto” rime avec “matelas à eau”. A moins d’être américain ou marin breton, peu de chances que ce réglage vous convienne. Arrivé en ville, je laisse sa chance au mode “Sport”, et le bilan s’améliore nettement même si les suspensions deviennent sèches. Fuyez comme la peste les travaux publics. Dès lors que le revêtement se dégrade. on est facilement ballotté comme un fétu de paille en pleine tempête, le mouvement étant amplifié par la hauteur du véhicule et on est content d’avoir des sièges qui tiennent bien le corps. La hauteur de caisse démultiplie les mouvements, et si le mode sport limite efficacement les oscillations parasites, les secousses restent présentes et on a l’impression d’être ballotté.

A noter encore que la visibilité périphérique n’est pas extraordinaire, avec notamment ces énormes rétroviseurs, qui arrivent à masquer totalement une Twingo dans un rond point. Finissons le tableau par le plein d’essence auquel on est vite contraint vu l’appétit gargantuesque de l’engin. Sans atteindre les sommets d’indécence de l’Audi RS6, mon premier passage à la pompe suite à cette prise de contact sénatoriale a révélé une consommation moyenne de 16.6 L/100km, soit un écart de 0.5L avec un ordinateur de bord qui se voulait rassurant. Au terme de l’essai, la consommation se sera stabilisée à 16.9 L/100 km, avec une belle pointe à 19.9L lors des essais en montagne. On est bien loin des 13L annoncés, preuve que les normes sont parfois bien peu représentatives des conditions réelles.

Un peu déçu de ce cross-over que j’imaginais beaucoup plus confortable à rouler, je l’emmène malgré tout sur  mon circuit habituel de l’arrière pays vaudois, plus par rigueur scientifique que par conviction. Et pourtant…  La vie est souvent étrangement faite, et c’est souvent quand on n’attend plus rien que les plus belles surprises arrivent.

La boite automatique semble plus à son aise que dans la G37S. Sans doute convient-elle au coffre du V8. Vous me direz, ça tombe bien, on n’a pas le choix. La première accélération modérée surprend. Les 500Nm du V8 s’expriment à merveille, dans un joli grondement. On est transporté sans aucun effort. Une belle ligne droite en vue, aucun trafic à des kilomètres à la ronde, j’écrase la pédale de droite, la boite passe en mode kick-down, et le V8 se déchaîne. L’accélération est franchement impressionnante, pas forcément dans l’absolu, ou un bon coupé fera aussi bien (les temps officiels de 0-100 sont d’ailleurs identiques au G37S), mais vu le gabarit du véhicule, on ne l’attend vraiment pas à pareille fête, d’autant plus que la bande son convient à merveille à l’ambiance.

Autre bonne surprise, le comportement est vraiment plaisant, avec un bon équilibre. Le poids est bien réparti, avec 46% sur l’essieu arrière, ce qui assure des accélération sereines. Même en pleine  accélération, le train avant reste réactif. Si la transmission se fait aux quatre roues au démarrage, le couple est rapidement basculé intégralement sur l’arrière, donnant une agilité indéniable à l’ensemble. Faite un tour de rond point, et vous verrez. Sur une belle route comme on peut en trouver ici, la suspension Sport fait merveille, devenant plus efficace au fur et à mesure que le rythme augmente. Les roues de 21 pouces constituent ici un précieux allié, en tandem avec le poids malgré tout contenu, et la plate-forme reprise du G37, roues arrières directrices comprise. Le roulis est maîtrisé, les vitesses de passage en courbe presque plus limitées par l’appréhension légitime de lancer plus de deux tonnes d’acier dans une épingle ou un virage aveugle que par les caractéristiques de la voiture. Bien sûr, la physique est ce qu’elle est, mais  in fine, on prend énormément de plaisir à rouler la bête, à des années lumières d’un ML 55 AMG par exemple.

Au détour d’un village de basse montagne, un petit garçon m’interpelle au stop sur son vélo, et me demande, sceptique, si c’est ma voiture qui fait ce joli bruit qui manifestement a résonné à travers les ruelles. Je lui réponds que oui, mais devant son air sceptique, je me sens obligé de prouver mes dires par un petit coup de gaz, puis par un autre, plus appuyé. Son oeil pétille, je souris, la conversation s’enchaîne. J’y vois là la plus belle confirmation que c’est bel et  bien une voiture passion comme on n’en fait pas assez.

Je déteste les SUV, mais ce FX m’a donné la banane pendant tout l’essai. Pour une fois, le marketing ne mentait pas, on a vraiment là un croisement de SUV et de coupé sport, dans une exécution très homogène et cohérente, réunissant avec bonheur les avantages des deux mondes. C’est un mélange atypique, non sans défaut, mais vraiment attachant. Dans la morosité plus ou moins ambiante, il est une véritable bouffée d’air frais, un antidote radical à la dépression. Surtout qu’à CHF 105’000, toutes options, il me parait difficile de trouver mieux dans cette catégorie de niche. Surtout qu’en fait, il n’y a pas d’options. A équipement équivalent chez les teutons, il vous faudra allonger CHF 30’000 de plus, au bas mot. Du coup, l’addition paraît presque bon marché.

Face à la concurrence

Infiniti FX50S Porsche Cayenne GTS BMW X6 Mercedes ML 500 4Matic
Moteur V8, 5026 cm3 V8, 4806 cm3 V8, 4395 cm3 V8, 5461 cm3
Transmission Intégrale Intégrale Intégrale Intégrale
Boite de vitesse 7, automatique 6, manuelle automatique automatique
RPP (kg/ch) 5.4 5.7 5.6 5.6
Poids à vide (constr.) 2121 kg (2120 kg) (2300 kg) (2265 kg) (2185 kg)
Puissance (ch/régime) 390 / 6500 405 / 5800 407 / 5500 388 / 6000
Couple max (Nm/régime) 500 / 4400 500 / 3500 600 / 1750 530 / 2800 – 4800
0-100 km/h 5.8 sec 6.1 sec 5.4 sec 5.8 sec
Vitesse max. 250 km/h 253 km/h 250 km/h 250 km/h
Conso. mixte (constr.) 16.9 (13) (15.1) 12.5 (11.1) (13.1)
Pneumatique 265/45 R21 295/35 R21 255/50 R19 255/50 R19
Prix de base (CHF) 105’500.- 122’300.- 113’600 114’100.-
Prix de base (EUR) env. 76’350.- 80’214.- 84’400.- 75’450.-

Nos remerciements à Infiniti Suisse pour le prêt de cette voiture de test.

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