Constructeurs & sport-auto, le mouvement perpétuel
Publié : 26 juil. 2017 19:37
Comme évoqué dans le sujet du DTM, je lance là un sujet d'échange dédié aux évolutions de l'implication des constructeurs en sport-auto.
De tous temps, le sport-auto a été l'un des vecteurs d'image favoris des constructeurs, certains plus que d'autres bien entendu, mais tous y ont gouté à un moment ou un autre.
Les stratégies d'implication sont en revanche extrêmement variables au fil du temps, souvent faites de revirements inattendus aux gré des impératifs économiques bien entendus, des évolutions technologiques, mais également de changements des équipes de direction, de nouvelles orientations marketing ou d'accidents sportifs majeurs (Mercedes en 1955).
Si la proportion est variable d'un constructeur à l'autre, le sport-auto est pour eux un mélange de passion et de rationalisation, cette dernière prenant de toutes façons le pas sur la première.
Les exemples historiques d'aller/retours sont très nombreux. Pour ne citer que la F1 époque moderne (depuis 1950), chaque décennie a vu son lot de venue et départs.
Aujourd'hui, nous semblons être à un tournant de l'histoire puisque se mêlent à des difficultés économiques ou "accidents industriels" qui remettent en cause les investissement de plus en plus énormes dédié au sport, des considération techniques et environnementales de plus en plus pressantes.
En une année, les constructeurs allemands ont ainsi lancé un mouvement radical d'évolution de leurs stratégies sportives.
Suite au dieselgate, Audi a lancé le mouvement l'année dernière en stoppant net le programme LMP1 lancé en 1999, pour se recentrer sur le DTM, le WRX (rallycross) et la Formule e, cette dernière implication étant entérinée il y a peu avec le rachat total du team Abt.
Dans la foulée, VW a arrêté son implication en WRC.
Ce mois-ci, c'est Mercedes qui annonce son retrait du DTM (formule dont elle était le pilier depuis 1988) fin 2018 pour se tourner vers la Formule e.
Le constructeur maintient toutefois son engagement en F1, malgré quelques rumeurs d'un abandon fin 2018 qui s'étaient faites jour l'année dernière.
Le mouvement pourrait ne pas s'arrêter là, puisqu'il est question que Porsche annonce au mois d'août l'arrêt de son programme LMP1 dès la fin de la présente saison.
On attend là aussi une implication en Formule e, et le constructeur étudierait également un retour en F1 comme motoriste à horizon 2020/2021.
Enfin, BMW a annoncé l'année dernière son arrivé officielle en Formule e pour la saison 2018/2019.
La stratégie sportive de Béhème se démarque toutefois de celle de ses petits camarades, puisque l'abandon de son dernier programme mondial date de 2009 avec le retrait de la F1.
Depuis lors, seul un engagement en DTM était venu compenser, avant une arrivée en WEC en 2018 avec une M8 en catégorie GTEPro.
J'ai toujours trouvé cette relative retenue comme étrange pour un constructeur de cette taille et avec des racines sportives aussi présentes. L'image de la marque s'est tout de même construite là dessus.
Peut-être les lourds investissements dans la branche i ont-ils forcé quelques sacrifices?
Ce n'est pas mieux en France, Renault et PSA étant coutumiers des revirements de dernière minute.
Pas mieux non plus au Japon. Nissan nous a fait une blague en LMP1 il y a trois ans, Honda navigue en eaux troubles en F1 depuis 10 ans, et Toyota qui garde au moins un programme mondial depuis très longtemps butine de l'un à l'autre.
Pas mieux enfin de l'autre côté de l'Atlantique.
Reste juste la stabilité de Maranello, finalement.
Pour regrouper par catégorie, nous assistons donc à une orientation massive des constructeurs européens vers la Formule e :
Renault, PSA, BMW, Mercedes, Audi, Jaguar, peut-être Porsche.
Mahindra est présent aussi pour l'Inde mais les japonais sont eux pour l'instant étrangement absents, tout comme les américains (je ne compte pas Faraday).
A ce jour, le budget d'une saison est ridicule pour un constructeur puisque l'on parle de 2m$. Il augmentera nécessairement avec la libéralisation des packages mais j'ai tout de même l'impression que les constructeurs communiquent à bon compte sur une série naissante présentée comme innovante, mais qui ne ressemble concrètement que de loin au sport-auto en plus d'être encore un peu folklo.
A voir si le buzz va continuer.
La catégorie tourisme, elle, et à tout le moins en Europe, est de plus en plus moribonde. Le DTM subit un très gros coup avec l'arrêt de Mercedes.
Je ne suis pas certain qu'Audi et BMW puissent et acceptent de soutenir la série à eux deux dans l'environnement actuel.
Le WTCC, que je n'affectionne pas à titre personnel depuis sa dernière mouture, ressort lui sursitaire des années de domination Citröen, qui a lâché la série fin 2016.
Il n'y a plus de vrai championnat en France et l'Italie vivote.
Reste l'exception anglaise et le BTCC qui survie. Cela fait très longtemps que je ne me suis pas penché sur ce championnat qui avait failli disparaitre il y a quelques saisons.
A noter pour les deux derniers (et même le WTCC) que les autos ne sont plus des berlines du segment D mais des compactes segment C.
On peut se poser la question de la survie de cette catégorie, très prisée par les constructeurs dans les années 70 à 90 pour promouvoir directement et montrer les qualités d'un modèle grand public, dont la version compétition était alors l'extrapolation. On avait aussi une grande variété de modèles, de motorisations, de types de propulsion. Il était facile de s'identifier, de préférer l'un ou l'autre et au final de s'intéresser. Et le spectacle était très agréable!
Peut-être que l'on estime aujourd'hui que les foules ne rêvent plus devant le modèle qu'elle peuvent acheter?
J'estime donc pour ma part que c'est la mise en place généralisée des "silhouettes" qui a quelque peu cassé la chose.
Le GT est intéressant aujourd'hui parce que, que se soit en GT3 (surtout) ou en GTE, on voit s'affronter une grande variété de modèles aux spécifications différentes.
Certes, tout cela est entouré de BoP qui nivellent tout ce petit monde mais chaque auto garde son caractère propre.
Le LMP1 est aussi en grand danger, et à plus brève échéance même que le DTM, ce qui est l'exemple typique de la fragilité des disciplines.
Voici un championnat du monde qui était porté au nues il y a 1 ans. Après le départ d'Audi, et si Porsche se retire fin 2017, il ne restera plus que Toyota qui reconsidèrera nécessairement son implication. L'engagement à Spa puis Le Mans devraient rester au programme, le WEC vraisemblablement pas.
Et il faudrait alors attendre 2020 et le nouveau règlement pour espérer une renaissance et un retour de nouveau constructeurs (il est question notamment de Peugeot). Dans l'intervalle, qui pourrait financer une LMP1 hybrid? Personne.
Peut-être y aurait-il aussi un effort d'harmonisation à faire entre WEC et IMSA pour sauver tout cela, au niveau technique (des protos compatibles pour les deux) comme de calendrier (mettre le meilleur des deux mondes sous le même championnat).
Rien n'est joué non plus pour la F1, même si sa suprématie lui permettra sans doute de garder une grande attractivité, si tant est que les futurs règlements l'y aident.
Mercedes déclare rester, Renault ne devrait pas partir à court terme, Ferrari non plus, et Porsche s'interroge (RedBull serait dit-on dans la boucle). Honda est un cas à part, un hara-kiri est possible en fin de saison.
Quant à la compétition client ou les formules de promotion, tant que des gens sont prêt à payer ou sponsoriser pour rouler, les constructeurs répondront la à la demande.
J'ai surtout évoqué ici le circuit, mais le rallye est lui aussi régulièrement "victime" des allers/retours des constructeurs, le dernier en date étant VW.
Pas (encore) d'hybridation en jeu ici, et il y a à ce jours suffisamment de constructeurs investis au niveau mondial pour soutenir ce championnat, 3 directement (Hyundai, Toyota et Citroën) et 1 indirectement (Ford).
Et c'est bien de la promotion de la voiture de "Monsieur tout le monde" dont on parle, ce qui fonctionne encore à cette grande échelle mondiale.
Il est toutefois amusant de constater l'émoi particulier provoqué par le passage des quelques Porsches engagées...
Moins amusant en revanche est l'appauvrissement des championnats nationaux, en particulier le championnat de France. Et je dis cela sans dévaluer le moins du monde ses acteurs pour qui j'ai le plus grand respect. Mais il n'y plus là non plus d'équipe "d'usine".
J'ajouterais enfin une parenthèse ici sur le World RX, qui su donner un nouveau souffle au rallycross, et polarise pas mal d'intérêt chez les constructeurs.
Peugeot, VW, Audi et Ford en sont et il faut reconnaitre que, bien que de base citadines (et une Focus), les autos sont totalement dantesques et les courses très sympa à regarder.
Espérons que les budgets n'explosent pas pour la pérennité de la chose.
Le débat est ouvert!
De tous temps, le sport-auto a été l'un des vecteurs d'image favoris des constructeurs, certains plus que d'autres bien entendu, mais tous y ont gouté à un moment ou un autre.
Les stratégies d'implication sont en revanche extrêmement variables au fil du temps, souvent faites de revirements inattendus aux gré des impératifs économiques bien entendus, des évolutions technologiques, mais également de changements des équipes de direction, de nouvelles orientations marketing ou d'accidents sportifs majeurs (Mercedes en 1955).
Si la proportion est variable d'un constructeur à l'autre, le sport-auto est pour eux un mélange de passion et de rationalisation, cette dernière prenant de toutes façons le pas sur la première.
Les exemples historiques d'aller/retours sont très nombreux. Pour ne citer que la F1 époque moderne (depuis 1950), chaque décennie a vu son lot de venue et départs.
Aujourd'hui, nous semblons être à un tournant de l'histoire puisque se mêlent à des difficultés économiques ou "accidents industriels" qui remettent en cause les investissement de plus en plus énormes dédié au sport, des considération techniques et environnementales de plus en plus pressantes.
En une année, les constructeurs allemands ont ainsi lancé un mouvement radical d'évolution de leurs stratégies sportives.
Suite au dieselgate, Audi a lancé le mouvement l'année dernière en stoppant net le programme LMP1 lancé en 1999, pour se recentrer sur le DTM, le WRX (rallycross) et la Formule e, cette dernière implication étant entérinée il y a peu avec le rachat total du team Abt.
Dans la foulée, VW a arrêté son implication en WRC.
Ce mois-ci, c'est Mercedes qui annonce son retrait du DTM (formule dont elle était le pilier depuis 1988) fin 2018 pour se tourner vers la Formule e.
Le constructeur maintient toutefois son engagement en F1, malgré quelques rumeurs d'un abandon fin 2018 qui s'étaient faites jour l'année dernière.
Le mouvement pourrait ne pas s'arrêter là, puisqu'il est question que Porsche annonce au mois d'août l'arrêt de son programme LMP1 dès la fin de la présente saison.
On attend là aussi une implication en Formule e, et le constructeur étudierait également un retour en F1 comme motoriste à horizon 2020/2021.
Enfin, BMW a annoncé l'année dernière son arrivé officielle en Formule e pour la saison 2018/2019.
La stratégie sportive de Béhème se démarque toutefois de celle de ses petits camarades, puisque l'abandon de son dernier programme mondial date de 2009 avec le retrait de la F1.
Depuis lors, seul un engagement en DTM était venu compenser, avant une arrivée en WEC en 2018 avec une M8 en catégorie GTEPro.
J'ai toujours trouvé cette relative retenue comme étrange pour un constructeur de cette taille et avec des racines sportives aussi présentes. L'image de la marque s'est tout de même construite là dessus.
Peut-être les lourds investissements dans la branche i ont-ils forcé quelques sacrifices?
Ce n'est pas mieux en France, Renault et PSA étant coutumiers des revirements de dernière minute.
Pas mieux non plus au Japon. Nissan nous a fait une blague en LMP1 il y a trois ans, Honda navigue en eaux troubles en F1 depuis 10 ans, et Toyota qui garde au moins un programme mondial depuis très longtemps butine de l'un à l'autre.
Pas mieux enfin de l'autre côté de l'Atlantique.
Reste juste la stabilité de Maranello, finalement.
Pour regrouper par catégorie, nous assistons donc à une orientation massive des constructeurs européens vers la Formule e :
Renault, PSA, BMW, Mercedes, Audi, Jaguar, peut-être Porsche.
Mahindra est présent aussi pour l'Inde mais les japonais sont eux pour l'instant étrangement absents, tout comme les américains (je ne compte pas Faraday).
A ce jour, le budget d'une saison est ridicule pour un constructeur puisque l'on parle de 2m$. Il augmentera nécessairement avec la libéralisation des packages mais j'ai tout de même l'impression que les constructeurs communiquent à bon compte sur une série naissante présentée comme innovante, mais qui ne ressemble concrètement que de loin au sport-auto en plus d'être encore un peu folklo.
A voir si le buzz va continuer.
La catégorie tourisme, elle, et à tout le moins en Europe, est de plus en plus moribonde. Le DTM subit un très gros coup avec l'arrêt de Mercedes.
Je ne suis pas certain qu'Audi et BMW puissent et acceptent de soutenir la série à eux deux dans l'environnement actuel.
Le WTCC, que je n'affectionne pas à titre personnel depuis sa dernière mouture, ressort lui sursitaire des années de domination Citröen, qui a lâché la série fin 2016.
Il n'y a plus de vrai championnat en France et l'Italie vivote.
Reste l'exception anglaise et le BTCC qui survie. Cela fait très longtemps que je ne me suis pas penché sur ce championnat qui avait failli disparaitre il y a quelques saisons.
A noter pour les deux derniers (et même le WTCC) que les autos ne sont plus des berlines du segment D mais des compactes segment C.
On peut se poser la question de la survie de cette catégorie, très prisée par les constructeurs dans les années 70 à 90 pour promouvoir directement et montrer les qualités d'un modèle grand public, dont la version compétition était alors l'extrapolation. On avait aussi une grande variété de modèles, de motorisations, de types de propulsion. Il était facile de s'identifier, de préférer l'un ou l'autre et au final de s'intéresser. Et le spectacle était très agréable!
Peut-être que l'on estime aujourd'hui que les foules ne rêvent plus devant le modèle qu'elle peuvent acheter?
J'estime donc pour ma part que c'est la mise en place généralisée des "silhouettes" qui a quelque peu cassé la chose.
Le GT est intéressant aujourd'hui parce que, que se soit en GT3 (surtout) ou en GTE, on voit s'affronter une grande variété de modèles aux spécifications différentes.
Certes, tout cela est entouré de BoP qui nivellent tout ce petit monde mais chaque auto garde son caractère propre.
Le LMP1 est aussi en grand danger, et à plus brève échéance même que le DTM, ce qui est l'exemple typique de la fragilité des disciplines.
Voici un championnat du monde qui était porté au nues il y a 1 ans. Après le départ d'Audi, et si Porsche se retire fin 2017, il ne restera plus que Toyota qui reconsidèrera nécessairement son implication. L'engagement à Spa puis Le Mans devraient rester au programme, le WEC vraisemblablement pas.
Et il faudrait alors attendre 2020 et le nouveau règlement pour espérer une renaissance et un retour de nouveau constructeurs (il est question notamment de Peugeot). Dans l'intervalle, qui pourrait financer une LMP1 hybrid? Personne.
Peut-être y aurait-il aussi un effort d'harmonisation à faire entre WEC et IMSA pour sauver tout cela, au niveau technique (des protos compatibles pour les deux) comme de calendrier (mettre le meilleur des deux mondes sous le même championnat).
Rien n'est joué non plus pour la F1, même si sa suprématie lui permettra sans doute de garder une grande attractivité, si tant est que les futurs règlements l'y aident.
Mercedes déclare rester, Renault ne devrait pas partir à court terme, Ferrari non plus, et Porsche s'interroge (RedBull serait dit-on dans la boucle). Honda est un cas à part, un hara-kiri est possible en fin de saison.
Quant à la compétition client ou les formules de promotion, tant que des gens sont prêt à payer ou sponsoriser pour rouler, les constructeurs répondront la à la demande.
J'ai surtout évoqué ici le circuit, mais le rallye est lui aussi régulièrement "victime" des allers/retours des constructeurs, le dernier en date étant VW.
Pas (encore) d'hybridation en jeu ici, et il y a à ce jours suffisamment de constructeurs investis au niveau mondial pour soutenir ce championnat, 3 directement (Hyundai, Toyota et Citroën) et 1 indirectement (Ford).
Et c'est bien de la promotion de la voiture de "Monsieur tout le monde" dont on parle, ce qui fonctionne encore à cette grande échelle mondiale.
Il est toutefois amusant de constater l'émoi particulier provoqué par le passage des quelques Porsches engagées...
Moins amusant en revanche est l'appauvrissement des championnats nationaux, en particulier le championnat de France. Et je dis cela sans dévaluer le moins du monde ses acteurs pour qui j'ai le plus grand respect. Mais il n'y plus là non plus d'équipe "d'usine".
J'ajouterais enfin une parenthèse ici sur le World RX, qui su donner un nouveau souffle au rallycross, et polarise pas mal d'intérêt chez les constructeurs.
Peugeot, VW, Audi et Ford en sont et il faut reconnaitre que, bien que de base citadines (et une Focus), les autos sont totalement dantesques et les courses très sympa à regarder.
Espérons que les budgets n'explosent pas pour la pérennité de la chose.
Le débat est ouvert!