Re: Le futur proche des électriques et hybrides
Publié : 05 févr. 2024 09:36
Les Echos
La course à la batterie solide, le « Graal de la voiture électrique »
Grands constructeurs et start-up veulent être les premiers à trouver la batterie offrant rapidité de recharge et grande autonomie.
Le monde de la batterie joue son avenir au « Mille Bornes ». Start-up et grands constructeurs automobiles, en passant par les géants chinois de la batterie, tous veulent être le premier à inventer la batterie qui combinera rapidité de recharge et autonomie de 1.000 kilomètres. Et ce, tout en abaissant les coûts,
Dans cette compétition, la batterie dite « solide » semble être celle qui offre les meilleures chances. L'adjectif « solide » caractérise l'électrolyte, l'un des éléments de la pile, qui laisse passer les électrons entre les deux pôles de la batterie. Jusqu'à présent, cet électrolyte est liquide. Dans les batteries des prochaines générations, il sera solide.
« Le principal atout réside dans sa densité énergétique : à masse équivalente, une batterie à lithium métal et à électrolyte solide permet d'aller beaucoup plus loin, de l'ordre de 1,5 à 2 fois », résume Xavier Veillard, directeur associé chez McKinsey. « Nous observons depuis 2016 la recherche d'un nouveau paradigme pour tenter de sortir du plafonnement des performances en densité d'énergie du lithium-ion, en développant la technologie dite 'solide' qui trouve son origine dans les travaux sur les conducteurs ioniques de la fin des années 1970 », explique Sébastien Patoux, responsable du service batteries au CEA.
Les gros moyens de l'industrie automobile
L'arrivée de l'industrie automobile dans le monde des batteries - qui représente aujourd'hui 80 % de la demande - a permis d'apporter les dollars nécessaires au développement des nouvelles technologies. Depuis la fin des années 2010, les constructeurs ont injecté des centaines de millions d'euros dans cette technologie en devenir. L'américain QuantumScape a convaincu Volkswagen. Solid Power s'est allié à BMW et au fabricant de batteries coréen SK. Mercedes a investi dans le taïwanais ProLogium (qui a aussi séduit le vietnamien VinFast) et l'américain Factorial, aux côtés de Stellantis et du coréen Hyundai.
Mais en dépit des moyens mis en oeuvre, les premières promesses des start-up n'ont pas été tenues. Même les grands acteurs se sont laissés surprendre par les difficultés en chemin. Toyota évoquait des fabrications de série pour 2020. Puis 2025. L'an dernier, le japonais a promis des batteries dans des voitures, de petite série certes, pour 2030. Néanmoins, cet horizon semble se stabiliser, alors que les technologies maturent dans les laboratoires. Un exemple parmi d'autres : tout début janvier, les équipes de QuantumScape ont pu valider les résultats des tests d'endurance sur 1.000 cycles de charges et décharges de leur produit avec Volkswagen.
« Nous avons demandé l'année dernière aux acteurs du secteur quand ils s'attendaient à voir la batterie solide devenir une réalité industrielle, rapporte Christophe Pillot, directeur d'Avicenne Energy, société de conseil spécialisée dans le domaine. Tout le monde nous a répondu 2030, voire 2035. Nous pensons en conséquence qu'elle représentera 5 % du marché au milieu des années 2030, puis 10 % en 2040. »
Dans cette course d'obstacles, il n'y a pas d'échappée. « Si quelqu'un annonce demain l'invention d'une batterie qui recharge en trois minutes pour faire 1.000 kilomètres, c'est qu'il y aura quelque chose qui cloche », continue Christophe Pillot.
Mais certains sont en tête de peloton et d'autres en queue, tant sur les performances que le calendrier. Car chacun a pris des options technologiques légèrement différentes sur les matériaux. « Quand on regarde les annonces faites par les différents développeurs de batteries solides, on observe des écarts de densité énergétique selon les choix technologiques de l'ordre de plus ou moins 20 % », observe Xavier Veillard.
ProLogium figure parmi les plus avancés. Même si ses batteries, dites « semi-solides », sont moins en rupture que les 100 % solides. Après avoir fait tourner une ligne pilote depuis 2017, la société a inauguré mi-janvier un premier petit site de production à Taïwan, dernière étape avant de débuter, fin 2024, la construction de sa gigafactory des Hauts-de-France. La filiale du groupe Bolloré Blue Solutions figure aussi parmi « l'une des entreprises les plus en pointe dans le monde », salue Cristopher Iacò, qui conseille les investisseurs dans le secteur des batteries. Leur dossier de subvention pour la construction à horizon 2029 d'une gigafactory en France serait en cours d'instruction, précise une source au fait du dossier.
Le défi de la production
Aucun acteur n'a toutefois encore surmonté le redoutable défi de la production en grande série. Pour espérer être rentable sans faire exploser les prix, il faut produire et assembler à haute cadence des films de matière de 20 à 30 microns d'épaisseur, quand les plus avancés ne sont descendus que jusqu'à 50 microns. « Les fournisseurs de machines pour produire les batteries solides n'existent quasiment pas aujourd'hui, ce qui signifie que le secteur est encore loin d'être mûr », pointe Cristopher Iacò.
Au début, les prix devraient être élevés. Mais à long terme, prévoit Christophe Pillot, « le prix d'une batterie à électrolyte solide devrait être inférieur à celui d'une batterie à électrolyte liquide ». Elles ne nécessiteront plus de matières liquides ni de solvants, ce qui simplifiera la fabrication. De quoi améliorer, à terme, la compétitivité des voitures électriques par rapport aux thermiques.
La course à la batterie solide, le « Graal de la voiture électrique »
Grands constructeurs et start-up veulent être les premiers à trouver la batterie offrant rapidité de recharge et grande autonomie.
Le monde de la batterie joue son avenir au « Mille Bornes ». Start-up et grands constructeurs automobiles, en passant par les géants chinois de la batterie, tous veulent être le premier à inventer la batterie qui combinera rapidité de recharge et autonomie de 1.000 kilomètres. Et ce, tout en abaissant les coûts,
Dans cette compétition, la batterie dite « solide » semble être celle qui offre les meilleures chances. L'adjectif « solide » caractérise l'électrolyte, l'un des éléments de la pile, qui laisse passer les électrons entre les deux pôles de la batterie. Jusqu'à présent, cet électrolyte est liquide. Dans les batteries des prochaines générations, il sera solide.
« Le principal atout réside dans sa densité énergétique : à masse équivalente, une batterie à lithium métal et à électrolyte solide permet d'aller beaucoup plus loin, de l'ordre de 1,5 à 2 fois », résume Xavier Veillard, directeur associé chez McKinsey. « Nous observons depuis 2016 la recherche d'un nouveau paradigme pour tenter de sortir du plafonnement des performances en densité d'énergie du lithium-ion, en développant la technologie dite 'solide' qui trouve son origine dans les travaux sur les conducteurs ioniques de la fin des années 1970 », explique Sébastien Patoux, responsable du service batteries au CEA.
Les gros moyens de l'industrie automobile
L'arrivée de l'industrie automobile dans le monde des batteries - qui représente aujourd'hui 80 % de la demande - a permis d'apporter les dollars nécessaires au développement des nouvelles technologies. Depuis la fin des années 2010, les constructeurs ont injecté des centaines de millions d'euros dans cette technologie en devenir. L'américain QuantumScape a convaincu Volkswagen. Solid Power s'est allié à BMW et au fabricant de batteries coréen SK. Mercedes a investi dans le taïwanais ProLogium (qui a aussi séduit le vietnamien VinFast) et l'américain Factorial, aux côtés de Stellantis et du coréen Hyundai.
Mais en dépit des moyens mis en oeuvre, les premières promesses des start-up n'ont pas été tenues. Même les grands acteurs se sont laissés surprendre par les difficultés en chemin. Toyota évoquait des fabrications de série pour 2020. Puis 2025. L'an dernier, le japonais a promis des batteries dans des voitures, de petite série certes, pour 2030. Néanmoins, cet horizon semble se stabiliser, alors que les technologies maturent dans les laboratoires. Un exemple parmi d'autres : tout début janvier, les équipes de QuantumScape ont pu valider les résultats des tests d'endurance sur 1.000 cycles de charges et décharges de leur produit avec Volkswagen.
« Nous avons demandé l'année dernière aux acteurs du secteur quand ils s'attendaient à voir la batterie solide devenir une réalité industrielle, rapporte Christophe Pillot, directeur d'Avicenne Energy, société de conseil spécialisée dans le domaine. Tout le monde nous a répondu 2030, voire 2035. Nous pensons en conséquence qu'elle représentera 5 % du marché au milieu des années 2030, puis 10 % en 2040. »
Dans cette course d'obstacles, il n'y a pas d'échappée. « Si quelqu'un annonce demain l'invention d'une batterie qui recharge en trois minutes pour faire 1.000 kilomètres, c'est qu'il y aura quelque chose qui cloche », continue Christophe Pillot.
Mais certains sont en tête de peloton et d'autres en queue, tant sur les performances que le calendrier. Car chacun a pris des options technologiques légèrement différentes sur les matériaux. « Quand on regarde les annonces faites par les différents développeurs de batteries solides, on observe des écarts de densité énergétique selon les choix technologiques de l'ordre de plus ou moins 20 % », observe Xavier Veillard.
ProLogium figure parmi les plus avancés. Même si ses batteries, dites « semi-solides », sont moins en rupture que les 100 % solides. Après avoir fait tourner une ligne pilote depuis 2017, la société a inauguré mi-janvier un premier petit site de production à Taïwan, dernière étape avant de débuter, fin 2024, la construction de sa gigafactory des Hauts-de-France. La filiale du groupe Bolloré Blue Solutions figure aussi parmi « l'une des entreprises les plus en pointe dans le monde », salue Cristopher Iacò, qui conseille les investisseurs dans le secteur des batteries. Leur dossier de subvention pour la construction à horizon 2029 d'une gigafactory en France serait en cours d'instruction, précise une source au fait du dossier.
Le défi de la production
Aucun acteur n'a toutefois encore surmonté le redoutable défi de la production en grande série. Pour espérer être rentable sans faire exploser les prix, il faut produire et assembler à haute cadence des films de matière de 20 à 30 microns d'épaisseur, quand les plus avancés ne sont descendus que jusqu'à 50 microns. « Les fournisseurs de machines pour produire les batteries solides n'existent quasiment pas aujourd'hui, ce qui signifie que le secteur est encore loin d'être mûr », pointe Cristopher Iacò.
Au début, les prix devraient être élevés. Mais à long terme, prévoit Christophe Pillot, « le prix d'une batterie à électrolyte solide devrait être inférieur à celui d'une batterie à électrolyte liquide ». Elles ne nécessiteront plus de matières liquides ni de solvants, ce qui simplifiera la fabrication. De quoi améliorer, à terme, la compétitivité des voitures électriques par rapport aux thermiques.