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Essai Nissan GT-R 2014

La dissection

Nissan GT-R 2014 Nissan GT-R 2014 Nissan GT-R 2014

Une belle soirée d’automne, un tracé routier sélectif et un objectif clair: comprendre l’incidence des réglages châssis, transmission et ESP sur le comportement de l’auto en conduite sportive. Les trois commutateurs de la console centrale offrent les possibilités de réglages suivantes:

  • 1) Transmission: le mode SAVE est destiné à l’abaissement de la consommation; le mode R est optimisé pour la performance et permet l’accès à la fonction de launch control
  • 2) Suspension: le mode Comfort adoucit l’amortissement, le mode R le raffermit
  • 3) ESP: lois de répartition du couple en mode R, et désactivation complète en mode OFF.

Nissan GT-R 2014

Je fais une première montée avec les trois contacteurs en position médiane pour établir une base de comparaison. En sortie d’épingle en deuxième, l’ESP intervient de manière intrusive, mais pour le reste, la GT-R est remarquablement à son aise. Les changements d’appuis rythmés ne révèlent ni inertie ni lourdeur. Roulis et cabrage sont limités au maximum, jamais 1800kg ne m’ont paru si légers. La bonne qualité du revêtement rend la voiture moins nerveuse qu’elle ne l’était dans les Alpes, mais la vitesse et les accélérations latérales et longidutinales requièrent toute mon attention. La sonorité est par contre fade de l’intérieur, la rondeur de la note d’échappement qui se réverbérait contre les parois rocheuses des alpes se perd ici entre feuillus et conifères.

Le passage en mode R demande à être quittancé en maintenant le commutateur en position pendant 1 seconde. Je commence par l’amortissement, mais après un aller-retour, j’en conclus que le mode adaptatif normal est déjà tellement orienté vers la fermeté que le mode R n’apporte pas de changement notable, sur route du moins. Le mode normal effectue un travail remarquable dans la régulation des amortisseurs Bilstein, en partant d’une base ferme, parfois sèche, mais qui évite toutefois que l’auto se désunisse. En enquillant un aller retour supplémentaire, je reviens avec le même constat sur le mode R pour la boîte. Les passages devraient être plus rapides, mais la différence n’est pas flagrante. Nissan s’est gardé d’adopter les égalisations de régime caricaturales de certaines italiennes, et c’est tant mieux.

Nissan GT-R 2014

Le mode ESP R, par contre, amène des changements plus notables sur la gestion de la motricité à la limite. Le seuil d’intervention est clairement repoussé – trop loin pour que j’ose aller le chercher sur route ouverte – et une exploitation généreuse du couple en sortie de virages serrés se traduit par une motricité balistique. On sent la torture des Dunlop – la paire arrière surtout – qui ripent en s’accrochant aux aspérités du revêtement. J’ai confié à ma passagère le soin de surveiller la répartition du couple sur l’écran central, mais les indices d’un transfert de couple vers l’avant restent étonnament rares. L’efficacité et la précision de l’ensemble sont redoutables et imposent le respect, mais ne m’inspirent pourtant ni verve ni euphorie. Il manque ce côté addictif qu’on cherche dans une super sportive, un trait charismatique, particulier et unique.

En rentrant au bercail à la nuit tombante, je cherche à rationaliser cette sensation bizarre. La GT-R a passé l’examen haut la main, mais j’avais éprouvé plus de plaisir à me battre contre ses imperfections dans les alpes qu’à analyser ses qualités dans le jura vaudois. Que manque-t-’il donc pour transformer l’essai ? De la voix, sans doute, l’auto manque de personnalité sonore sans réverbération du relief. De la performance peut-être aussi, je n’ai jamais éprouvé la sensation d’un moteur débordant que des supercars coûtant le double distillent avec tant de brio. Le technophile en moi est également resté sur sa faim: les possibilités de configuration de la GT-R sont sommes toutes limitées dans leurs dimensions et limitées dans leur effet, l’interface machine-pilote finalement assez low tech aux standards de 2014. Peut-être tout simplement que la réputation d’aptitudes surnaturelles place la barre trop haut.

Nissan GT-R 2014 Nissan GT-R 2014

La GT-R n’est pas cet équivalent copulatoire d’une double ration de Viagra accompagnée d’un préservatif triple couche auquel ses détracteurs – si peu en ont pris le volant – se plaisent à la comparer. Son enveloppe de performance est telle que n’importe qui arrivera sans peine à avaler beaucoup d’autos moins puissantes, mais au-delà des 7/10èmes de son potentiel et sur terrain imparfait, elle représente un challenge que tout amateur de pilotage devrait apprécier à plein.

Elle n’est pas non plus la panacée que les inconditionnels ont voulu faire d’elle. Affichée dès 122’800 CHF, il est difficile de lui trouver des concurrentes directes sur le papier, ce qui en fait son argument de vente principal: un rapport prix/performances sans nulle autre pareille (nous ignorerons le cas de la GT-R Nismo affichée 188’920 CHF/150’000 €). Pour ce tarif, on obtient une sportive authentique mais une GT imparfaite, affectée par une boîte maladroite qui trahit son âge, un confort très relatif et des aspects pratiques discutables. La semaine passée à son volant a renforcé mon respect pour les compétences des ingénieurs de Nissan, mais n’en fait pas une auto incontournable dont il me tarde de reprendre le volant un jour.

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